Une commerçante du quartier des Flanades à Sarcelles, Séverine juive, a été très violemment agressée le lundi 18 novembre dernier en sortant de son magasin.
Depuis l’agression, les questions ne cessent de s’entrechoquer dans sa tête. Séverine, âgée de 44 ans, ne comprend pas ce qui s’est passé lundi soir 18 novembre. Deux hommes qu’elle n’a pas vus s’en sont violemment pris à elle, alors qu’elle regagnait sa voiture. Alors qu’elle avait perdu connaissance, ils lui ont pris sa montre de luxe et ses chaussures, mais pas seulement. C’est toute une part de la personnalité de cette commerçante radieuse et joviale qui a disparu.
Il est 19h10 quand Séverine ferme son magasin d’optique des Flanades à Sarcelles, dans le centre commercial, et se dirige vers sa voiture. Elle n’a pas pu la garer boulevard Henri-Poincaré en raison de travaux. Elle a trouvé une place un peu plus loin. « C’était pas éclairé, il faisait nuit », précise-t-elle. C’est au moment où elle se trouvait devant son véhicule que l’agression a eu lieu. « Ils sont arrivés à deux derrière moi. Ils m’ont étranglé. Ils m’ont dit : Ta montre, ta montre ! Donne ta montre ! » relate-t-elle.
Une montre achetée plus de 10 000 euros
Elle n’a même pas le temps d’obéir à ces injonctions ni de réaliser ce qui lui arrive. L’étranglement lui fait perdre connaissance. « Sur le moment, je ne comprends pas, je ne respire pas », indique-t-elle. Elle se réveille quelques minutes plus tard. Sa montre, une Rolex achetée plus de 10 000 euros a disparu de son poignet. Ses agresseurs sont aussi partis avec ses chaussures. « Je crie, mais il n’y a personne. J’ai la force de me relever et de revenir aux Flanades », se souvient-elle.
En franchissant les portes du centre commercial, elle s’effondre à nouveau. La plupart des magasins sont fermés. Elle trouve de l’aide auprès d’un magasin de téléphonie encore ouvert. Une de ses clientes la reconnaît et lui vient en aide. « Je m’aperçois que j’ai encore mon sac, mon téléphone, mes AirPods, mes bijoux », se rappelle-t-elle. C’est à ce moment où elle réalise à quel point cette agression a été violente.
Elle est ensuite transportée à l’hôpital par les pompiers, puis dépose plainte dès le lendemain à la police. Elle souffre d’une fracture du nez. Son visage est marqué par deux énormes hématomes sous les yeux et diverses contusions. « L’étranglement a été tellement intense que j’ai des douleurs sur tout le cou », décrit-elle. La mâchoire est aussi sensible et lui interdit de manger des aliments solides. Elle pense avoir reçu un coup de poing après avoir perdu connaissance. En arrachant la montre, ses agresseurs lui ont laissé des contusions sur le dessus de la main qui lui rappellent à chaque geste ce qu’elle a vécu. « C’est surtout moralement. Je suis dans le pourquoi », confie-t-elle.
« Pourquoi cette violence ? »
« Je suis quelqu’un qui rigole toute la journée. J’aime plaisanter à propos de tout ce qu’on peut vivre, tout ce qu’on peut voir », résume l’opticienne. Elle partage volontiers sa bonne humeur sur les réseaux sociaux en postant des courtes vidéos où elle se met en scène avec dérision sur son lieu de travail. « On a tout enlevé. Toutes les publications, où je suis dedans, annonce-t-elle. Tout simplement parce que j’ai peur. »
Séverine sait qu’elle est connue à Sarcelles. Pas tellement grâce à ses 700 abonnés sur Instagram, mais parce qu’elle appartient à une famille de commerçants qui s’est fait un nom au bout de 40 ans de présence. Enfant des Flanades, elle a grandi en rêvant d’y travailler. Elle est aujourd’hui à la tête de plusieurs magasins et s’y rend tous les matins avec bonheur, nullement affectée par l’état d’abandon du centre commercial.
C’est ce rêve éveillé qui a été fracassé lundi soir. « Je pensais qu’à Sarcelles, j’étais en famille. Parmi mes clients, j’ai des gens de toutes les communautés et ça se passe très bien », souligne-t-elle. Aujourd’hui la méfiance a envahi son esprit. Elle se demande si elle s’est trop exposée en ligne, si c’est un de ses clients qui est à l’origine de tout ça. « C’est sûr qu’ils m’ont repérée. Ils m’ont attendue. Est-ce qu’ils vont s’en prendre à mes employés ? Est-ce que c’est parce que je suis juive ? Je n’ai pas envie de dire que c’est antisémite parce que je n’ai pas envie d’y croire », explique-t-elle.
Son questionnement bute sur les incohérences de cette agression. « On sait qu’ils voulaient ma montre, d’accord, mais pourquoi tu me frappes ? Pourquoi tu me laisses par terre sans mes chaussures, à côté des déchets, sous la pluie comme une malpropre ? » s’interroge-t-elle. Elle a senti que ses agresseurs étaient plutôt jeunes, mais en aucun cas elle se voyait leur résister. « Pourquoi cette violence ? Pourquoi seulement la montre ? Ils me l’auraient demandée je la leur aurais donnée et mon sac avec », conclut-elle.