Les secrets les mieux gardés des espionnes du Mossad

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Assassinat, kidnapping… Un livre révèle les méthodes des « amazones » des services israéliens. Plus renversant que les meilleurs films d’espionnage.

De Yolande Harmor, journaliste américaine qui joua à la blonde stupide en Égypte et obtint en 1947 les plans arabes d’invasion du Yichouv, la communauté juive qui préfigurait Israël, à Aliza Magen, première femme à devenir, en 1997, la numéro deux du Mossad, les femmes occupent une place prépondérante dans les services secrets d’Israël. Aujourd’hui, elles composent plus de 40  % des unités opérationnelles du Mossad, sont cybernéticiennes, cryptologues, cheffes de division, voire participent à des assassinats ciblés. Au point que le service est devenu l’institution la plus féministe d’Israël, selon l’historien et ancien député travailliste Michel Bar-Zohar.

À travers les portraits de 20 «  guerrières  », il raconte, dans Les Amazones du Mossad (écrit avec Nissim Mishal, éditions Saint-Simon), l’histoire de ces femmes qui sont à l’origine des faits d’armes les plus emblématiques du service : l’enlèvement du nazi Adolf Eichmann en 1960 en Argentine, l’exécution des Palestiniens responsables du massacre de sportifs israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972, le vol des archives du programme nucléaire militaire iranien en 2018 au nez et à la barbe des mollahs… Le Point (édition papier) publie en exclusivité les bonnes feuilles de cet ouvrage et dévoile les destins de quelques-unes des plus redoutables « amazones du Mossad ».

Plusieurs étaient étrangères. La Canadienne Yael recueillit à Bagdad des renseignements qui permirent à Tsahal de bombarder en 1981 le réacteur nucléaire construit par Saddam Hussein avec l’aide de la France. L’ex-soixante-huitarde française Danielle fut cheffe instructrice au Césarée, le service action du Mossad, et joue encore de la guitare sur scène, sous un pseudonyme, depuis qu’elle a pris sa retraite. L’Uruguayenne Isabelle Pedro, toujours perchée sur ses stilettos, séjourna trois ans, dans les années 1960, au Caire, où elle déroba des secrets militaires égyptiens. L’Allemande Yola, la «  reine du désert  », passa plusieurs années clandestinement au Soudan, sous le couvert de diriger un club de plongée, afin d’organiser l’émigration vers Israël des Juifs éthiopiens.

Physiques insignifiants plutôt que beautés ravageuses

Contrairement à une légende, le Mossad préfère embaucher des femmes au physique insignifiant. Elles se font moins remarquer que des beautés ravageuses. Et jamais, assure Michel Bar-Zohar, le service ne leur demande d’user de leurs charmes physiques en mission. Une exception fut l’Américaine Cheryl Bentov, alias «  Cindy  », qui séduisit à Londres le technicien nucléaire israélien Mordechai Vanunu pour l’attirer à Rome, où il fut enlevé et transporté en Israël par le Mossad. Il y passa dix-huit ans en prison pour avoir révélé à la presse britannique des détails sur le programme nucléaire militaire du pays. Grillée par sa mission, amère d’avoir été manipulée, Cheryl Bentov obtint du Mossad une compensation financière et repartit aux États-Unis, où elle vit toujours.

L’histoire des femmes du Mossad a ses côtés sombres. Marcelle Ninio, démasquée au Caire, fut arrêtée et torturée, tenta de se suicider et passa plus de treize ans dans les geôles égyptiennes. Sylvia Rafael, après quelques opérations héroïques, participa en 1973 à la pire bavure du service : l’assassinat d’un serveur marocain en Norvège, pris par erreur pour un terroriste palestinien. Plusieurs autres agentes, dont les actions restent couvertes par le secret, ont payé un lourd tribut pour leur audace : la torture, la prison et parfois la mort.

Par Luc de Barochez

Source lepoint