Le poison de l’antisémitisme, par Serge July

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Les violences contre des supporteurs israéliens à Amsterdam la semaine dernière après un match de foot ont montré, une nouvelle fois, que La France insoumise cultive son ambiguïté sur l’antisémitisme.

On se souvient d’un leader de la gauche, ou prétendu comme tel, qui a argué du caractère «résiduel» de l’antisémitisme en France. Ce qui s’est passé dans la nuit de jeudi 7 à vendredi 8 novembre, lors d’un match entre le Maccabi Tel-Aviv et l’Ajax à Amsterdam, la ville qui reste illuminée par le souvenir d’Anne Frank, n’avait rien à voir avec le hooliganisme footballistique. Les images de ceux qui ont été jetés à l’eau et des blessés le prouvent. La maire écolo d’Amsterdam parle d’une «explosion d’antisémitisme» ; elle a annoncé le renforcement des mesures de sécurité encadrant les manifestations. Une trentaine de personnes auraient été blessées, cinq ont été brièvement hospitalisées, 62 personnes ont été arrêtées et on compte dix mises en examen.

Rappeler la chronologie des évènements est utile. Les heurts d’Amsterdam ont éclaté lorsque des fans du Maccabi Tel-Aviv ont arraché un drapeau palestinien et des panneaux «Free Palestine». Puis un groupe de supporteurs, connu pour ses relents racistes, ont entonné des chants anti-arabes et repris des slogans comme «on va baiser la Palestine». Mais comme le remarque le député Jérôme Guedj : «Ça devient franchement inquiétant quand un député [l’insoumis Raphaël Arnault a estimé, dimanche, que les supporteurs du Maccabi étaient venus pour se battre] justifie le recours à la violence sur le thème, ils l’ont bien cherché.» On se croirait revenu à l’époque où les premiers socialistes français du XIXe siècle critiquaient le peuple juif. Les socialistes d’alors croyaient que Dreyfus, en tant que «bourgeois», ne concernait pas la classe ouvrière. Il a fallu attendre Jean Jaurès qui, après avoir lui aussi hésité, avait publié un dossier sur l’affaire pour que les socialistes prennent fait et cause pour Dreyfus au nom de la République et regardent les juifs comme des victimes. Manifestement, la question n’est pas épuisée puisque LFI, avec des arrière-pensées électorales, cultive à nouveau l’ambiguïté au profit des Palestiniens.

Mélenchon entend incarner la vraie gauche. Mais à force de flirter avec l’antisémitisme, il a tendance à autodissoudre son appartenance à la gauche, qui se doit d’être rigoureuse sur cette question. Mélenchon ne l’est pas. Je le sais grand lecteur, alors je lui conseille de relire Jean Jaurès – ça ne fait jamais de mal – mais aussi Jules Guesde et les blanquistes. Il peut aussi relire son dieu d’autrefois : Léon Trotski, qui était juif, et qui après avoir été opposé à la création d’un Etat juif y était devenu favorable à la fin de vie, justement à cause de l’antisémitisme. Tous les mélenchonistes devraient lire ou relire Trotski et surtout Jaurès. Histoire de retrouver de quel côté se trouve la gauche et de quel côté elle dérape.

par Serge July