Mila sur l’affaire du lycée parisien Maurice-Ravel : « Osons dire non ! »

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La jeune femme menacée de mort pour avoir dit ce qu’elle pensait de l’islam en 2020 dénonce une nouvelle fois « les lâchetés et le déni face aux idées dangereuses et mortifères ».

La menace islamiste, Mila la connaît. Il y a quatre ans – mais qui l’a oublié ? – sa vie basculait. Le 18 janvier 2020, cette jeune Franco-Allemande née dans l’Essonne, installée depuis l’enfance dans la région lyonnaise, lance un live (direct) sur Instagram pour discuter avec sa communauté. Elle en vient à subir un premier raid de harcèlement et d’insultes (« gouine » ; « inch’Allah tu meurs, sale pute… »).

En réaction, Mila réaffirme son athéisme et s’en prend à l’islam en des termes crus désormais passés à la postérité. Cette vidéo – censée rester privée – va vite devenir virale et signer le début de « l’affaire Mila ». Soit une vie bunkérisée sous des milliers de menaces de mort dont certaines, plus d’un an plus tard, seront sanctionnées au tribunal par des peines de prison avec sursis pour leurs auteurs.

Les capitulations de l’Éducation nationale face à la menace islamiste, Mila les connaît aussi. Derrière son triste titre d’adolescente la plus menacée de France, il faut entendre l’exfiltration de son lycée d’alors, incapable de la protéger face au flot des menaces. Le domicile où elle vivait avec ses parents a aussi été mis sous protection nuit et jour.

Fin 2020, le 4 décembre, le président Macron confiait au média en ligne Brut : « Vous avez une jeune fille qui critique l’islam sur les réseaux, elle est harcelée, elle ne peut même plus être dans une école […]. Ça veut dire qu’on est devenus fous. » Une semaine plus tard, Mila était exclue du lycée militaire où elle avait trouvé « refuge », toujours pour les mêmes motifs : impossible d’assurer sa sécurité.

Le Point : En apprenant que le proviseur de la cité scolaire Maurice-Ravel, à Paris, accablé par les menaces de mort, préfère avancer son départ à la retraite car il ne peut plus travailler sereinement, difficile de ne pas penser à vous, qui aviez été obligée de changer d’établissement pour finalement être déscolarisée. Une nouvelle fois, ce sont les victimes qui sont punies, pas les persécuteurs. Qu’est-ce que cela dit de l’Éducation nationale ? De l’État ?

Mila : Je suis fatiguée de constater que, encore aujourd’hui, tant de personnes refusent d’admettre qu’il s’agit bien de fanatiques très nombreux, vicieux, haineux, qui savent pertinemment ce qu’ils font. Ils veulent faire taire, dans la terreur et le sang, ceux qui ne veulent pas se soumettre à leur religion. Ils sont biberonnés à la propagande victimaire et remplis de haine vis-à-vis de ceux qui ne leur ressemblent pas.

Ils ont bien compris, depuis des années, qu’ils pouvaient appliquer des fatwas en toute impunité sur les réseaux sociaux et dans toutes les institutions, jusqu’au sein de l’Éducation nationale. C’est tellement plus facile pour nos dirigeants de saboter la République au profit des bourreaux et de leurs idées dangereuses et mortifères pour acheter la paix sociale.

C’est tellement plus facile de fermer les yeux sur la violence parce qu’on la craint. C’est tellement moins facile pour nos élites d’assumer les conséquences de leur lâcheté et de leur déni depuis des dizaines d’années. Un obscurantisme sinistre qui grignote doucement l’humanité et l’authenticité de chacun. Pas de musique, pas d’amour, pas de libre arbitre, pas d’esprit critique, pas de science, pas d’humour, pas de tolérance.

Comment cela peut-il cohabiter avec le savoir et l’éducation ? Des adeptes qui n’ont pour réponse à ceux qui blasphèment que la menace, le lynchage, le harcèlement, la décapitation ont-ils leur place dans nos établissements scolaires, en France ? L’Éducation nationale et l’État ont la même peur paralysante : celle de heurter des populations qui ont la contrariété facile, et qui représentent dans certaines zones un véritable contre-pouvoir.

Le mensonge lie votre affaire à celles de Maurice-Ravel et de Samuel Paty. Dans votre cas, on omet souvent que votre « doigt dans le cul » d’Allah était une réponse à un harcèlement massif. Samuel Paty a été tué car une élève a menti en disant qu’il avait exclu les élèves musulmans de son cours. Idem avec l’affaire Maurice-Ravel – la lycéenne à laquelle le proviseur avait demandé d’enlever son voile l’a accusé, faussement, de l’avoir frappée. Une rumeur que même des médias « sérieux » ont relayée. Pour citer le titre de votre livre, en plus du prix de la liberté, la résistance – ou la tentative de résistance – aux assauts islamistes ne révèle-t-elle pas aussi le prix de la vérité ?

Évidemment. La plupart des attaques à mon encontre sont basées sur de la diffamation. Les personnes qui prennent le temps de se renseigner un minimum et qui ont un peu d’esprit critique connaissent très bien la vérité. C’est de cette façon qu’ils deviennent bruyants et écrasent leurs victimes. En les diabolisant, pour qu’elles soient seules contre tous. Ils ont conscience que la réalité ne leur permettra pas d’être crédibles, ne recueillera pas l’adhésion de l’opinion publique, alors ils l’effacent. C’est leur mode opératoire avec, comme outil, la vitalité des réseaux sociaux. Quand on est obligé de mentir pour servir sa cause, il faut se demander si celle-ci est digne d’être défendue.

On dit que l’école est bien obligée de faire dans le « pas de vagues » car elle subit une crise massive. Outre qu’il est de plus en plus difficile d’enseigner, l’école a de plus en plus de mal à recruter des enseignants et beaucoup, comme le proviseur de Maurice-Ravel, préfèrent partir au plus vite en retraite. Le « pas de vagues » serait en réalité la traduction d’un « pas le choix ». Comment comprenez-vous une telle stratégie ?

La terreur s’exerce de deux façons : par l’assassinat spectaculaire de professeurs, destiné à marquer les esprits, et par le lynchage médiatique, les menaces et l’ostracisation. De nombreux enseignants, par peur ou tout simplement sous la pression d’élèves de confession musulmane, préfèrent éviter certains sujets. De récents sondages ont montré la part importante de professeurs qui se censurent. Le facteur aggravant est qu’ils sont rarement soutenus par leur hiérarchie. C’est ce qui explique cette stratégie de mise en retrait, due à la crainte d’être montré du doigt, lynché ou pire. Entre ça et le manque de respect croissant des élèves, je comprends qu’il y ait moins de candidats.

Mila, Samuel Paty, Dominique Bernard, affaire après affaire, la « capitulation française » face à la terreur islamiste ne cesse de se confirmer. À part, évidemment, les auteurs directs des crimes et délits, quels en seraient à vos yeux les autres coupables ? Les complices ?

Les complices sont tous ceux qui ne veulent pas voir, qui n’en parlent pas, qui ne dénoncent pas, qui nient l’impact de l’islamisme sur notre société et plus particulièrement sur la jeunesse. Ceux qui vont jusqu’à ne pas croire une victime parce que c’est plus confortable de dire que celle-ci a « provoqué ». Une partie des politiques, une grande partie des médias, et nous, en tant qu’individus, qui avons l’impression que nous ne serons pas des cibles si nous nous taisons.

Libérons notre parole, et défaisons-nous de nos peurs. Osons dire que non, ce n’est pas OK, quand une lycéenne force pour entrer dans le lycée avec son voile ou son abaya, et qu’elle tape un scandale pour ça. Non, ce n’est pas OK, quand un professeur d’histoire-géo qui essaye d’apprendre l’esprit critique à ses élèves en les initiant au dessin de presse se fait accuser d’islamophobie.

Comment vivez-vous aujourd’hui ?

Je suis déterminée, et j’ai pris ma revanche dans la vie. Parfois un peu pessimiste, parce que je subis à répétition la lâcheté ordinaire. Je ne serai plus jamais seule, j’ai fait des rencontres très chères à mes yeux. Des personnes qui n’ont pas froid aux yeux et qui se battent courageusement, des résistants qui défendent corps et âme les mêmes valeurs que moi. Je reste résiliente et productive. Ce qu’il m’est arrivé ne définit plus ma vie. Ils ne sont jamais parvenus à me faire plier, et ça les rend fous de me savoir combative. La pression, les menaces, les insultes par millions ont produit l’effet inverse. Alors oui, cela rend ma vie professionnelle très rude, mais il n’y a pas d’excuse pour défendre ce qu’il reste de mon pays.

La musculation a pris une part très importante dans votre vie depuis 2020. Comment y êtes-vous venue ?

Cela fait bientôt deux ans que je pratique ce sport. La musculation m’a sauvé la vie. Ce fut comme un engrenage qui m’a permis de me relever progressivement au moment où je pensais que plus rien n’en valait la peine. J’ai besoin de me sentir toujours plus forte, d’user de toute la rage qui m’habite désormais pour courir toujours plus vite, soulever toujours plus lourd. Je suis passionnée et je m’apprête à devenir coach sportif.

J’aimerais transmettre la résilience et la puissance que m’a apportées cette discipline, mais aussi apprendre aux gens à prendre soin d’eux de cette façon. J’adore partager ma progression sur mon compte Instagram ainsi que du contenu autour de la musculation, je vois que ça inspire beaucoup de personnes. C’est un vrai plaisir d’être une source de motivation pour ceux qui me suivent.

Face à l’islamisme, les institutions sont évidemment défaillantes, mais qu’en est-il de la population, et en particulier des jeunes, des lycéens ? S’il y avait un message que vous voudriez faire passer à votre génération, quel serait-il ?

J’aimerais qu’ils se rendent compte qu’ils ne pourront pas survivre dans le futur de la France qu’ils sont en train d’abandonner. Qu’ils contribuent au destin sinistre et incertain qui sera le leur. Nous sommes dans une génération perdue, droguée au confort, incapable d’avoir un esprit critique, les neurones cramés par TikTok. Cette jeunesse manque d’éducation, et elle me fait peur.

Les masques sont tombés depuis bien longtemps. J’aimerais qu’ils se réveillent, qu’ils comprennent que c’est une question de survie et qu’ils résistent dans nos rangs face à l’ennemi de la liberté : l’islamisme. Les jeunes devraient d’abord se tourner vers le passé pour savoir que leurs aînés se sont battus pour qu’ils puissent vivre librement sans la contrainte des religions. Savoir d’où l’on vient aide à avancer vers l’avenir.

Par Peggy Sastre