Yad Vashem, mémorial honorant la mémoire des victimes de l’Holocauste, a récemment dévoilé de rares photos prises durant les pogroms perpétrés par les nazis en novembre 1938 et connus sous le nom de nuit de Cristal.
C’était il y a 84 ans. Dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938, une succession de violentes attaques antisémites était déclenchée sur l’ensemble du territoire allemand sur ordre d’Adolf Hitler. En quelques heures, plus d’un millier de synagogues furent incendiées, des milliers de commerces furent saccagés et une centaine de Juifs furent tués.
Selon les estimations, ces pogroms s’accompagnèrent de l’arrestation et de la déportation de quelque 30.000 hommes envoyés dans des camps de concentration, un an avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Ce sont ces événements tragiques connus sous le nom de « nuit de Cristal » (en allemand « kristallnacht ») qui sont aujourd’hui remis en lumière.
A l’occasion du 84e anniversaire des pogroms de 1938, le Yad Vashem, mémorial honorant la mémoire des victimes de l’Holocauste à Jérusalem, a publié de rares photos des attaques perpétrées par les nazis durant cette nuit. On peut y voir des troupes des sections SS et SA saccager une synagogue et y déverser de l’essence pour l’incendier, dérober des livres ou détruire le mobilier d’une maison.
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Un album conservé pendant des décennies par un soldat américain
Les clichés sont issus d’un album conservé pendant des années par un soldat américain juif ayant servi dans le département de contre-espionnage de l’armée américaine en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale. L’homme n’avait jamais parlé de son expérience quand, après sa mort, sa fille, Ann Leifer, et ses deux petites-filles ont découvert l’album en nettoyant sa maison.
« Quand j’ai ouvert l’album, c’est comme si un trou s’était mis à brûler entre mes mains« , a confié Elisheva Avital, petite-fille du soldat reprise dans un communiqué décrivant le moment où elle a posé les yeux pour la première fois sur les photos. La famille a choisi de faire don de l’album au Yad Vashem dans le cadre du projet visant à rassembler des biens des survivants de l’Holocauste.
Selon le mémorial, les clichés ont été pris par deux photographes nazis durant les pogroms à Nuremberg et dans la ville de voisine de Fürth. « Voir ces images d’humiliation de Juifs et la destruction de leurs maisons, de leurs commerces et même des synagogues est extrêmement perturbant et difficile« , a commenté Dani Dayan, président du Yad Vashem.
« Mais après toutes ces années, nous devons témoigner des atrocités du passé. Ces photographies montrent clairement les vraies intentions des nazis et les efforts systématiques et délibérés entrepris pour accomplir leur agenda meurtrier« , a-t-il poursuivi. Les photos de cette nuit de violence demeurent très rares mais semblent témoigner ici de la volonté des nazis de documenter leurs exactions.
Une preuve des pogroms « dictés d’en haut »
« Nous pouvons voir dans la nature très rapprochée des clichés que les photographies faisaient partie intégrante de l’événement dépeint. Les angles et la proximité des responsables semblent indiquer un but évident de documenter les événements qui se sont déroulés« , a souligné Jonathan Matthews, responsable de la section photographie des archives du Yad Vashem.
« Tout ceci sert de preuve supplémentaire au fait que [ces pogroms] ont été dictés d’en haut et n’étaient pas un événement spontané d’une population en colère, comme ils ont essayé de les faire paraître« , a-t-il ajouté. Cette vague de violence a fait suite à la mort, le 9 novembre 1938, d’Ernst vom Rath, un secrétaire de l’ambassade allemande à Paris.
L’homme avait été grièvement blessé deux jours plus tôt par Herschel Grynszpan, un jeune Juif polonais d’origine allemande réfugié en France. L’événement a fait figure de prétexte idéal pour les responsables nazis qui ont fait croire que la population avait spontanément réagi au décès du secrétaire allemand.
« Il est essentiel que ces images et d’autres documents issus de l’Holocauste soient préservés et gardés pour toujours au Yad Vashem. Ils serviront de témoin éternel bien après que les survivants ne seront plus là pour témoigner de leurs propres expériences et véhiculeront les vécus individuels et l’histoire de l’Holocauste pour les générations à venir, en Israël et au-delà« , a conclu Dani Dayan.