Longtemps, son racisme l’a exclu du débat public. Mais dans cette campagne législative, la percée de ce député extrémiste inquiète et illustre une radicalisation d’une partie des Israéliens.
Pour mesurer la popularité d’Itamar Ben-Gvir auprès des classes populaires israéliennes, il faut le suivre en campagne sur le marché de Petah Tikvah, dans la banlieue de Tel-Aviv. A peine descendu de voiture, le député provoque une cohue. Passants et commerçants se bousculent pour obtenir un selfie, une accolade. « Toi au moins, tu sais parler aux Arabes ! », lui lance un maraîcher. Un vieux monsieur clame : « Itamar, roi d’Israël, tu seras notre prochain Premier ministre si Dieu veut ! »
La jeunesse juive sépharade, en particulier, plébiscite ce quarantenaire, né d’un père irakien et d’une mère kurde. Elle aime tout chez lui : son allure débraillée, sa kippa blanche tricotée et sa simplicité. « On le sent sincèrement proche des gens, il leur ressemble, plaide Meïr Ben Hayoun, un fidèle de la première heure et porte-parole francophone de sa campagne. Il représente un outsider auquel on peut s’identifier. »
Dans le reste du pays, le chef du parti « Puissance Juive » suscite une peur panique. Le 6 septembre, il prend la parole devant des lycéens de Ramat Gan, la banlieue chic de Tel-Aviv, et doit affronter des manifestants révoltés par sa présence dans cet établissement laïc. « Ben-Gvir n’a rien dans la tête, c’est un homme dangereux. Il va vous imposer une théocratie », prévient un homme muni d’un mégaphone. « Nous ne devrions pas inviter une personne qui a mis la photo d’un meurtrier et d’un terroriste sur le mur de sa maison », s’indigne le député travailliste Gilad Kariv, présent dans la manifestation. Une allusion au portrait de Baruch Goldstein, un terroriste juif qui tua 29 Palestiniens au caveau des Patriarches de Hébron en 1994, et dont le portrait a longtemps trôné dans le salon de Ben-Gvir.
Le principal allié de Netanyahou pour les élections du 1er novembre
Patriote courageux pour les uns, immonde fasciste pour les autres, Ben-Gvir réalise une percée inédite à l’approche du scrutin du 1er novembre, avec plus de 10% des intentions de vote. L’ancien Premier ministre Benyamin Netanyahou en a fait son principal allié et lui a promis un poste de ministre en cas de victoire, probablement l’Intérieur ou la Justice. Une ascension spectaculaire pour un homme qui a bâti sa carrière en marge de la société israélienne.
Itamar Ben-Gvir milite à l’extrême droite dès l’adolescence, avec un maître à penser sulfureux : le rabbin Meïr Kahane, interdit par la Cour suprême pour racisme et assassiné en 1990 en plein Manhattan par un Egyptien. Le jeune Ben-Gvir s’enflamme pour son idéologie ultranationaliste, que l’on peut résumer ainsi : les Juifs sont les seuls propriétaires légitimes de l’intégralité du Grand Israël, de la mer Méditerranée au Jourdain. Les Arabes peuvent y résider à condition de s’abstenir de toute violence et de toute revendication nationaliste. En cas de violation du pacte, une sanction radicale s’appliquera : le transfert de la population palestinienne vers un pays arabe voisin, la Jordanie ou le Liban. De cette conception découle le célèbre slogan kahaniste : « Pas d’Arabes, pas d’attentats »
Ben-Gvir atteint à peine la majorité lorsque son pays s’engage dans le processus d’Oslo. Accusé de brader la terre d’Israël, le Premier ministre Itzhak Rabin devient la bête noire de la droite et des kahanistes. Ben-Gvir réalise son premier coup d’éclat médiatique en exhibant l’emblème de la Cadillac de Rabin, arraché au capot de sa voiture, devant une caméra de télévision. « Si nous sommes arrivés à faire cela, nous pouvons arriver jusqu’à Rabin », fanfaronne le jeune homme. L’assassinat du Premier ministre israélien quelques mois plus tard par un extrémiste juif donnera une sinistre résonance à ses propos et rangera durablement Ben-Gvir dans le camp des fous dangereux.
A ses meetings, des chants anti-arabes
Cette diabolisation va lui offrir aujourd’hui une précieuse notoriété. Les caméras le suivent partout. Sur les sommets austères de Cisjordanie où il soutient les radicaux de la colonisation. A la très snob piscine Gordon de Tel-Aviv où il paie l’entrée à une quarantaine de migrants soudanais et lance, hilare, aux baigneurs : « Ne soyez pas racistes, il n’y a aucune raison que vous ne profitiez pas vous aussi des immigrés clandestins des quartiers sud ». Et bien sûr à la Knesset, où il assure le spectacle depuis son élection en mai 2021.
M. Ben Gvir dont la famille est originaire d’un pays où l’islam montre son visage de secte dictatorial et sanguinaire, est sûrement bien placé pour combattre cet islam. Il se bat pour défendre son peuple très pacifique et donc trop vulnérable pour combattre les extremismes d’où qu’ils viennent. M. Ben Gvir est très lucide et ne se laisse pas berner par ses adversaires plus encleins à soigner leur image de « démocrate » afin d’atteindre leurs objectifs inavouables..