Le projet de rénovation de la synagogue Copernic fait encore débat

Abonnez-vous à la newsletter

Les critiques sur la rénovation de la synagogue ont repris alors que la demande de permis de construire a été déposée par l’Union libérale israélite de France (Ulif), administrateur de la synagogue. Un historien de l’art et une association de préservation du patrimoine se sont exprimés contre la « démolition » du lieu.

Le dépôt récent de la demande de permis de construire visant à autoriser les travaux de rénovation de la synagogue de la rue Copernic, dans le 16e arrondissement de Paris, a ravivé la controverse. Le journaliste et historien de l’art Didier Rykner a publié, lundi 6 décembre, sur son site Internet, un article à charge intitulé « La synagogue Copernic : encore un monument art déco menacé », tandis qu’une association de protection du patrimoine a diffusé une tribune virulente contre le projet.

« J’avais été alerté de ce problème depuis longtemps », explique Didier Rykner. L’historien de l’art, qui s’oppose vivement à la « démolition » de la synagogue, rappelle que « l’art déco est très menacé de nos jours ». De même, l’association International Coalition for the Preservation of Paris, qui prend régulièrement position contre des décisions de démolition de bâtiments dans la capitale, dénonce dans sa tribune une « opération immobilière profitable ».

Un projet d’agrandissement et de rénovation pour mettre le bâtiment aux normes

Une polémique qui dure depuis plusieurs années déjà. Le projet de travaux de l’emblématique synagogue de la rue Copernic, connue pour l’attentat de 1980, avait suscité l’opposition d’une partie de la communauté juive, au moment de sa présentation, en 2017. L’Union libérale israélite de France (Ulif), à l’initiative de la rénovation et administratrice du lieu, avait alors évoqué un « projet d’agrandissement et de rénovation de la synagogue » pour moderniser un bâtiment et des installations « vétustes ».

« Notre bâtiment n’est pas conforme aux normes de sécurité et inaccessible aux personnes à mobilité réduite », explique Bernard Daltroff, administrateur pour l’Ulif du bâtiment Copernic, dans lequel un escalier unique dessert les cinq étages de la synagogue. Après étude du projet et de l’opportunité de racheter le bâtiment mitoyen, l’Ulif choisit d’agrandir la synagogue. « Nous avons conclu que la salle de culte devait être au premier étage pour utiliser la totalité de la surface », explique-t-il.

Une synagogue art déco « unique en France »

Or, la salle de culte est ornée de décorations art déco, « uniques en France », selon Eva Hein-Kunze, présidente de l’Association pour la protection du patrimoine Copernic (APPC), créée en 2017 pour « empêcher la réalisation du projet de démolition de la synagogue historique ». « C’est le seul héritage de la communauté juive libérale de Paris et de France, aussi bien architectural que mémoriel, et c’est dramatique de le voir disparaître », explique Eva Hein-Kunze, qui se dit aujourd’hui « consternée » de voir le projet se concrétiser.

Selon elle, la présentation des travaux ne s’est pas faite de manière « démocratique » et l’utilisation du terme « reconstruction » dissimule en fait une véritable « démolition ». Incompréhension ou manque de communication sur la véritable nature du projet, les membres de l’assemblée générale de la synagogue ont largement adopté le projet en 2018.

Selon Bernard Daltroff, il y a eu « plusieurs réunions d’information, délibérations, et seules quelques personnes ont voté contre ». Il explique que les membres de l’APPC sont opposés à l’expansion de la synagogue, voulue dans le but de « développer les activités culturelles et cultuelles ». L’administrateur assure par ailleurs que les décorations art déco seront reproduites et restituées dans la salle du premier étage.

Malgré les 10 000 signatures de la pétition lancée sur Internet par l’APPC, en 2017, et l’opposition de ces différents acteurs de conservation du patrimoine, la Direction régionale des affaires culturelles n’a jamais classé la synagogue au titre des monuments historiques. La date du début des travaux n’a pas encore été annoncée.

Juliette Paquier

Source lacroix