La bourse de Tel-Aviv veut créer des ponts avec celle de Paris

Abonnez-vous à la newsletter

Ancien banquier d’investissement chez Merrill Lynch puis Bank Leumi, Ittai Ben-Zeev, dirige le Tel-Aviv Stock Exchange depuis janvier 2017. L’opérateur du marché israélien accompagne pour la première fois en France une délégation d’entreprises israéliennes innovantes.

BFM Bourse: Pouvez-vous nous présenter en quelques mots la Bourse de Tel-Aviv, pas forcément bien connue en France ?

Ittai Ben-Zeev : Le Tel Aviv Stock Exchange (TASE) est l’unique opérateur de marché en Israël. Jusqu’à une date récente, la Bourse de Tel-Aviv était détenue collégialement par ses membres. En 2019, l’entreprise est devenue une public company [l’équivalent d’une SA] cotée elle-même en Bourse, avec plus de 80% de flottant. Nous sommes aujourd’hui un opérateur pleinement intégré, disposant de deux chambres de compensation, d’une entité dédiée à l’exploitation des données de marché, etc.

Quelle est la dynamique actuelle en matière d’introductions en Bourse ?

Au 1er octobre, plus de 100 nouvelles entreprises ont été introduites au cours des 18 mois précédents, ce qui place la Bourse de Tel-Aviv, en termes du taux de nouvelles cotations par rapport à la capitalisation totale, au deuxième rang mondial [derrière Shanghai, NDLR]. Au total, nous recensons 533 sociétés cotées, pour une capitalisation équivalent à 270 milliards d’euros environ.

De l’extérieur, on entend souvent parler des entreprises israéliennes seulement à l’occasion de rachats par des groupes étrangers, comme ce fut le cas de Waze par Alphabet ou de MobilEye par Intel, ou bien de celles qui se cotent au Nasdaq. Est-ce difficile pour ces sociétés de se développer sur place?

Bien que la taille de la population du pays ne soit pas très importante dans l’absolu, l’économie israélienne génère en effet d’importants flux de capitaux et abrite un riche tissu de start-up, en particulier dans les nouvelles technologies. C’est effectivement un terreau favorable à la création d’entreprises, et notre ambition est justement d’apporter à ces sociétés les moyens de croître.

C’est vrai que jusqu’ici le TASE reste un marché dominé par les investisseurs domestiques avec seulement 20 à 25% d’investisseurs internationaux, et en grandissant les entreprises sont souvent allées chercher une double cotation à Wall Street pour lever davantage de fonds. Mais il y a depuis quelques années un changement de perception vis-à-vis de la Bourse locale et la progression de l’indice TA-125 montre que les entreprises peuvent bénéficier d’un essor de leur valorisation. Beaucoup d’entreprises israéliennes, souvent familiales par tradition, font désormais entrer la cotation dans leurs projets stratégiques. De plus un certain nombre de sociétés créées dans les années 1980/90 arrivent à un stade où leurs fondateurs songent à la transmission de leur entreprise, ce qui peut passer par une entrée en Bourse. Pour toutes ces raisons, nous estimons avoir devant nous d’importantes perspectives de croissance !

Pour la première fois, la Bourse de Tel-Aviv conduit cette semaine une délégation d’entreprises israéliennes en France. Dans quel objectif?

Je suis ravi d’emmener pour la première fois une délégation d’entreprises cotées israéliennes passionnantes à la rencontre de la communauté d’affaires françaises. Notre objectif est de favoriser la progression des relations économiques et l’essor des investissements entre la France et Israël. La France a une place primordiale en Europe, une longue histoire et un avenir prometteur mais les entreprises de la tech israélienne jusqu’ici se dirigent plus naturellement vers les États-Unis. Nous souhaitons multiplier les ponts entre les écosystèmes et les investisseurs de nos deux pays afin d’accompagner le développement des entreprises israéliennes en France, un marché de choix en Europe…

Avez-vous rencontre votre homologue d’Euronext?

J’ai eu le plaisir effectivement d’échanger avec Stéphane Boujnah, qui a accompli avec ses équipes un travail remarquable et fait d’Euronext l’opérateur paneuropéen de référence. J’ai beaucoup d’admiration pour ce groupe et on ne peut que souhaiter arriver un jour à voir des sociétés choisir une double cotation Euronext-TASE !

Quelles sont les sociétés qui se sont jointes à la délégation cette semaine?

Parmi ces entreprises israéliennes figurent ElectReon, qui a développé un système permettant de recharger les véhicules électriques pendant les trajets grâce à des bobines de cuivre posées sous l’asphalte, Aquarius Engines, qui développe un nouveau type de moteurs à combustion interne et de groupes électrogènes, Glassbox, fournisseur de solutions d’analyse des actions des clients sur les canaux numériques (sites et applications mobiles), Gencell, qui a développé une technologie de production d’électricité à partir d’hydrogène et d’ammoniac et développe actuellement l’énergie stockage sous forme d’ammoniac « vert ». Nous accompagnent également Trucknet, à l’origine d’une plate-forme automatisée unique pour l’optimisation du fret pour les entreprises qui gèrent des flottes de véhicules, Nofar Energy, qui est engagée dans la construction et l’exploitation de systèmes pour la production d’électricité à partir de l’énergie solaire, et Strauss Group, l’une des plus grandes entreprises d’agroalimentaire du pays, qui a par ailleurs créé une pépinière dédiée à la foodtech, The Kitchen. Toutes se caractérisent par une capacité d’innovation de premier ordre.

Propos recueillis par Guillaume Bayre