L’assemblée générale du consistoire central a donné dimanche 24 octobre mandat à Élie Korchia pour présider pendant quatre ans cette institution représentant les juifs de France. Pour l’avocat de 50 ans, cette élection vient consacrer un long parcours d’engagement au sein de la communauté juive.
À regarder l’historique de son parcours, cela semblerait presque une évidence. Dimanche 24 octobre, maître Élie Korchia a été élu président du consistoire central de France, cette institution voulue par Napoléon pour représenter les juifs – ou du moins leur courant traditionnel et majoritaire – de France. Il sera ainsi, avec le grand rabbin Haïm Korsia, l’interlocuteur privilégié des pouvoirs publics – pour le volet séculier.
Félicitations à @Elie_Korchia brillamment élu aujourd’hui nouveau Président du Consistoire Central @ConsistoireFr. Je lui souhaite pleine réussite dans ses nouvelles fonctions à la tête du judaïsme français
— Haïm Korsia (@HaimKorsia) October 24, 2021
Son élection s’est faite sans réel suspens, puisque, situation inédite, il fut le seul candidat aligné sur la ligne de départ pour succéder à Joël Mergui, en poste depuis 2008. À tout juste 50 ans, il aura gravi un à un les échelons du judaïsme consistorial.
Félicitations à mon Confrere et ami @Elie_Korchia pour sa brillante élection à la tête du @ConsistoireFr !
Bonne chance pour cette mission.
Tu peux compter sur moi et le @fsju pour avancer dans des projets !
Le @fsju et le @ConsistoireFr sont deux institutions de terrain ! pic.twitter.com/ivSYLiyXR0— Ariel Goldmann #vacciné (@GOLDMANNAriel) October 24, 2021
Enfant de pieds-noirs rentrés d’Algérie à l’indépendance en 1962, Élie Korchia s’inscrit dans une tradition familiale d’engagement. « Mon grand-père est cofondateur de la communauté de Puteaux (Hauts-de-Seine) et mon père en a été le président à partir de 1985, se souvient-il assis derrière son large bureau art déco en ébène de macassar laqué, sur lequel pas un papier ne dépasse. Je l’accompagnais dans toutes ses actions. » Mais en 1990, son père décède brutalement, à l’âge de 43 ans.
En mon nom et au nom du @Le_CRIF j’adresse mes plus vives félicitations à @ElieKorchia nouveau président du @ConsistoireFr. Avec tous nos vœux de plein succès dans sa mission importante au service du Judaisme Français.
— Francis Kalifat (@FrancisKalifat) October 24, 2021
Les « rouages » du judaïsme français
Tout en se lançant dans des études de droit à la faculté de Nanterre où il rencontre sa future épouse – « une grande de deuxième année, cofondatrice de l’antenne de l’Union des étudiants juifs de France » – le fils prend alors peu à peu la relève. Quelques années plus tard, diplôme du barreau en poche, il devient à son tour président de la communauté de Puteaux. Il a alors 26 ans, âge particulièrement jeune pour ce rôle. À partir de là, les responsabilités au sein de la communauté vont croissant, jusqu’à culminer donc, avec l’élection de dimanche.
A l’assemblée générale du @ConsistoireFr qui a élu mon ami @Elie_Korchia nouveau président. Toutes mes félicitations et mes vœux de réussite pour cette mission essentielle au service du judaïsme français. Merci à @JoelMergui pour son action et son engagement ces dernières années. pic.twitter.com/pyxPNgQJWS
— Philippe Meyer (@philippemeyer92) October 24, 2021
« C’est quelqu’un d’engagé depuis longtemps, nous nous côtoyons depuis des années », témoigne par exemple Charles Sulman, président du consistoire régional des Hauts-de-France. « Il ne devient pas président par hasard, il connaît très bien les rouages du judaïsme français, abonde son homologue du consistoire du pays de la Garonne, Yves Bounan. S’il était le seul candidat, c’est que personne n’a estimé avoir la légitimité nécessaire pour se présenter face à lui. » D’autant plus, ce n’est un secret pour personne au sein de la communauté, qu’Élie Korchia est particulièrement proche du grand rabbin de France Haïm Korsia, triomphalement reconduit à cette charge en juin dernier.
Félicitations à @Elie_Korchia, nouveau président du @ConsistoireFr.
Je lui souhaite tout mes vœux de réussite dans sa nouvelle mission. pic.twitter.com/haYFXP8rmh— Serge Dahan (@PresidentBBE) October 24, 2021
Avocat après les tueries de Toulouse et de l’Hyper Cacher
En plus de ces engagements bénévoles, l’avocat installé dans le très chic quartier parisien de Passy, poursuit en même temps ses activités professionnelles. S’il traite essentiellement de droit civil, le pénal n’est pas absent de ses dossiers. En 2012, ses activités professionnelles et associatives s’entrecroisent dramatiquement : après les tueries à Toulouse et Montauban de Mohammed Merah, il devient en effet l’avocat de Samuel et Myriam Sandler, parents et grands-parents de trois des quatre victimes de l’école Ozar Hatorah – et qu’il connaissait bien, Samuel Sandler ayant longtemps présidé la communauté juive de Versailles.
Elie Korchia élu président du @ConsistoireFr pic.twitter.com/L2jJiiEmZv
— Jack Yves Bohbot (@jjackyvesbohbot) October 24, 2021
Me Korchia est également impliqué dans les suites d’un autre attentat antisémite, étant choisi pour les représenter par les deux jeunes caissières de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes ciblé en janvier 2015 par Amedy Coulibaly. « Je me suis beaucoup investi dans ces affaires », raconte-t-il, avant de poursuivre avec une certaine pudeur : « On ne sort pas indemnes de tels procès, mais il ne faut pas oublier que les victimes et les témoins directs en ont bien plus souffert, dans leur chair même. »
Elie Korchia vient d’être élu président du Consistoire central.
Voici son portrait, pour @LaCroix.https://t.co/4bHMkuzu3O
— Xavier LN ﻥ (@LN_Xavier) October 24, 2021
Elle aussi conseil de parties civiles dans ces deux affaires, Me Samia Maktouf ne tarit pas d’éloges sur celui qui est « plus qu’un confrère, un ami ». «Élie Korchia est un avocat engagé, humain, qui prend à cœur tous les dossiers dont il a la charge, assure-t-elle. Lui juif, moi musulmane, nous avons mené une magnifique collaboration qui n’a jamais divergé, avec une ligne de défense humaine, ouverte sur l’autre et empreinte de respect des fondamentaux. »
Cette implication contre l’antisémitisme a renforcé la stature d’Élie Korchia au sein de la communauté juive. Comme le soulignent les responsables communautaires locaux, leur nouveau président national est tout d’abord attendu sur « l’important chantier » de la « sécurité des juifs en France ». Il ne s’y est d’ailleurs pas trompé, faisant de la lutte contre l’antisémitisme le second point de sa profession de foi diffusée à tous les électeurs. Engagement nécessaire, car il en est convaincu : « Bien sûr qu’il y a un avenir pour les juifs en France ! ».
Par Xavier Le Normand