Anne Frank : un destin tragique aux nombreuses interrogations

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Pendant la Seconde Guerre mondiale, Anne Frank s’est cachée avec sa famille à Amsterdam pour éviter la déportation, sort que les nazis réservent alors aux Juifs. Après la visite de la Gestapo, elle rejoint le camp de Bergen-Belsen où elle meurt à 15 ans, laissant derrière elle un journal intime devenu un témoignage privilégié de la Shoah.

La famille Frank déménage à Amsterdam

Annelies Marie Frank naît le 12 juin 1929 à Francfort-sur-le-Main, dans une Allemagne en crise où le chômage et la pauvreté explosent suite à la crise de 1929. Le parti nazi connaît de plus en plus de succès. Surfant sur l’antisémitisme déjà présent en Allemagne, son leader, Adolf Hitler, prend pour cible les Juifs, qu’il rend responsables de tous les maux du pays.

Dans ce climat inquiétant, tant d’un point de vue économique qu’idéologique, Otto et Edith Frank déménagent avec leurs deux filles à Amsterdam. Otto y commence un commerce en pectine, un extrait végétal destiné à épaissir les confitures. Anne apprend le néerlandais, se lie d’amitié avec des jeunes de son âge et fréquente l’école du quartier. Mais en 1941, les Allemands occupent les Pays-Bas, obligeant la jeune fille à rejoindre une école juive tandis que le père est contraint de quitter son travail.

L’« Annexe »

La menace est telle – on pense alors que le risque est d’être déporté vers un camp de travail forcé – qu’il faut trouver une solution pour l’éviter. C’est décidé, il faut se cacher. Le 9 juillet 1942, la famille Frank s’installe dans les locaux situés à l’arrière des bureaux de l’entreprise d’Otto, au 263 Prinsengracht.

Quatre voisins, Hermann van Pels, son épouse et son fils Peter et un dentiste, Fritz Pfeffer, vont leur tenir compagnie durant leur clandestinité dans cet endroit qu’ils surnomment l’« Annexe ». Les huit colocataires ne doivent faire aucun bruit pour ne pas éveiller les soupçons. Des voisins et amis leur permettent de se ravitailler.

Le journal d’Anne Frank

Pour son treizième anniversaire, le 12 juin 1942, Anne a reçu de son père un journal. « C’est une sensation très étrange, pour quelqu’un dans mon genre, d’écrire un journal. Non seulement je n’ai jamais écrit, mais il me semble que plus tard, ni moi ni personne ne s’intéressera aux confidences d’une écolière de treize ans », écrit-elle le 20 juin. Elle est alors loin de se douter que son journal deviendra l’un des ouvrages les plus vendus au monde.

Deux jours après avoir déménagé dans l’« Annexe », Anne Frank raconte leur quotidien : « Nous ne sommes pas trop mal ici, car nous pouvons faire la cuisine et écouter la radio en bas, dans le bureau de Papa. M. Kleiman et Miep et aussi Bep Voskuyl nous ont tellement aidés, ils nous ont déjà apporté de la rhubarbe, des fraises et des cerises, et je ne crois pas que nous allons nous ennuyer de si tôt. Nous avons aussi de quoi lire et nous allons acheter encore un tas de jeux de société. Evidemment, nous n’avons pas le droit de regarder par la fenêtre ou de sortir. Dans la journée, nous sommes constamment obligés de marcher sur la pointe des pieds et de parler tout bas parce qu’il ne faut pas qu’on nous entende de l’entrepôt. »

Pendant deux ans, l’adolescente va coucher sur le papier ses pensées et sentiments en racontant ce qu’elle ressent, jour après jour, à « Kitty », surnom qu’elle donne à son journal. Écrire est pour elle une activité essentielle pour lutter contre l’ennui. Elle invente quelques nouvelles et un roman.

Découverte et déportation des Frank

Le 4 août 1944, la famille Frank et ses compagnons de captivité reçoivent la pire des visites, celle de la Gestapo. L’une de leurs protectrices, Miep Gies, – reconnue plus tard JUSTE parmi les nations – parvient à sauver le journal intime de la petite Anne.

Après un bref passage à Auschwitz, Anne Frank et sa sœur Margot sont transférées au mois d’octobre au camp de Bergen-Belsen où elles meurent du typhus quelques semaines seulement avant la libération du camp.

Seul survivant de la famille Frank, Otto Frank fait publier en 1947 le journal de sa fille que lui a transmis Miep Gies. Trois ans plus tard, l’ouvrage est traduit en français et le monde entier va vite s’intéresser au destin tragique de la jeune Anne Frank.

Mais qui a vraiment dénoncé Anne Frank ?

Sept décennies plus tard, les Pays-Bas continuent de se poser la question. Plus d’une trentaine de personnes ont été suspectées d’avoir trahi la famille Frank et ses compagnons de clandestinité. Sur le banc des accusés se sont retrouvés des employés de l’entreprise du père, aux premières loges car travaillant sous la cachette des Frank. D’autres ont soupçonné Nelly Voskuijl, la sœur de Bep Voskuijl, protectrice de la famille Frank. Tous ont été relâchés faute de preuve.

L’affaire n’est pas encore classée et certains continuent de mener l’enquête. C’est le cas de l’ex-agent du FBI Vincent Pankoke qui, avec un groupe d’experts en criminologie, utilise les moyens les plus modernes (comme l’intelligence artificielle) pour percer le mystère de l’arrestation des Frank, ou encore de Gerard Kremer, fils d’un ancien résistant qui fut le voisin de la famille Frank. Dans son livre Le jardin arrière de l’Annexe, celui-ci affirme que c’est une femme juive du nom d’Ans van Dijk qui aurait collaboré avec les nazis et livré 145 personnes, dont la famille Frank.

Primo Levi, l’auteur de Et si c’est un homme, exprime bien le rôle que tient Anne Frank dans la perception que le monde a des victimes de la Shoah : « À elle seule, Anne Frank nous émeut plus que les nombreuses victimes qui ont souffert comme elle, mais dont l’image est restée dans l’ombre. »

Source geo