Procès du 13 novembre : Abdeslam, un nazi comme un autre

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L’attitude de Salah Abdeslam au début du procès des attentats du 13 Novembre oscille entre vociférations, victimisation et froide affirmation qu’il est un robot tueur sans affects, un guerrier lobotomisé de l’État islamique.

Je ne suis pas, en tant qu’historien des idées politiques, un défenseur de l’assimilation de l’islamisme au nazisme, qui me paraît manquer sa cible parce qu’elle gomme le fait majeur que l’islamisme est une dérive de l’islam, alors que le nazisme n’était pas une perversion du christianisme. Mais là, pour le coup, l’attitude du principal accusé, comme d’ailleurs d’autres islamistes radicaux dans d’autres prétoires, m’a rappelé celle des accusés nazis du procès de Nuremberg. Pourquoi ? Parce qu’il ne cherche pas à convaincre qu’il est innocent : il assume, revendique, veut faire sentir à la salle, aux victimes et à nous tous qu’il nous hait.

Jusqu’au pied de la potence, Julius Streicher éructait son antisémitisme. Quand on a projeté un film sur les camps d’exter­mination nazis aux accusés de Nuremberg, aucun n’a prétendu qu’il s’agissait d’un montage. Un seul des condamnés a exprimé des remords, quand les autres considéraient les atroci­tés comme des dommages collatéraux d’une nécessaire régénération totale d’un monde à liquider.

Il n’existe aucun dialogue possible avec ce type d’accusé

Abdeslam pense finalement comme Göring, qui, sommé par le tribunal de dire s’il plaidait coupable ou non coupable, répondit : « Im Sinne der Anklage, nicht schuldig » (« Au sens de l’accusation, non coupable »), formule que reprirent nombre de ses coïnculpés. En répondant à l’interrogatoire d’identité par la profession de foi de l’islam et en ajoutant « j’ai délaissé toute profession pour devenir un combattant de l’État islamique », Abdeslam indique, comme le numéro deux du Reich, qu’il ne vit pas sur la même planète que nous, qui rendons la justice au nom du peuple français. Il n’existe aucun dialogue possible avec ce type d’accusé, ne reste que la froide constatation que nous sommes ses ennemis à mort. Il l’assume quand, tout à notre vision humaniste, nous espérons encore qu’il ait un mot de compassion ou de regret, ce qui prouve que nous n’avons toujours pas compris la nature de son idéologie.

Si, comme les nazis, Abdeslam ne conçoit comme issue à son combat que la destruction totale de notre civilisation, son mutisme, sur le fond, contraste avec l’attitude des épurés de 1945 dont la ligne de défense consistait à dire « nous sommes aussi français que nos accusateurs, aussi patriotes, nous avons juste défendu le pays de deux côtés opposés ». Il ne cherche pas réellement non plus à nous convertir à sa cause, comme le firent nombre de terroristes des mouvements de libération du tiers-monde ou de telle ou telle obédience marxiste, dont la stratégie consistait à susciter l’empathie de l’opinion, à tenter de justifier la violence par l’oppression, à se réclamer de la « justice » et du « droit ». Abdeslam, lui, ne fait pas de déclaration théorique ou théologique. C’est un nihiliste. Normal : l’islam radical est une négation du réel et de la vie.

Jean-Yves Camus

Source charliehebdo