L’histoire d’une ville fantôme décimée pendant la Shoah

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Dans un ouvrage magistral, Omer Bartov raconte le destin de la petite ville de Buczacz, dont la population juive fut exterminée pendant la guerre.

Professeur d’histoire européenne à l’université Brown, aux États-Unis, Omer Bartov multiplie depuis plusieurs décennies les travaux sur la Seconde Guerre mondiale. Son étude sur la Wehrmacht, publiée sous le titre L’Armée d’Hitler en 1999 chez Hachette, avait contribué à modifier le regard que l’on porte sur le rôle des conscrits et de l’encadrement militaire de l’armée régulière allemande dans la Shoah. Son nouvel ouvrage*, traduit en français, combinant histoire longue et description intime des victimes comme des bourreaux, renouvelle aujourd’hui la manière d’aborder l’un des épisodes les plus tragiques de l’histoire du XXe siècle. Il s’y penche en effet sur l’histoire d’une petite ville de Galicie (aujourd’hui en Ukraine) : une localité qui abrita pendant plus de quatre siècles plusieurs communautés, polonaise, ruthénienne et juive, avant de sombrer dans la violence génocidaire.

Le Point : Votre dernier livre se penche sur la destinée de la ville Buczacz d’où vient une partie de votre famille. Le point de départ de cet ouvrage remonte à une conversation que vous avez eue avec votre mère en 1995. Au moment de cet échange, elle avait 71 ans et vous 41. À vous lire, on sent que vous regrettez de ne pas avoir eu cette discussion plus tôt. Était-il si difficile de lui demander de vous raconter son enfance ?

Omer Bartov : Pas du tout. Ce n’était pas difficile. Il me suffisait d’allumer un enregistreur et de lui poser des questions. La raison pour laquelle je ne l’ai pas fait plus tôt tient davantage à mon éducation en Israël. En tant qu’enfant issu de la première génération de citoyens israéliens, nous n’étions pas censés nous intéresser à la diaspora, même si c’était le monde d’où venaient nos parents. Tout attachés que nous étions à construire une nation nouvelle, nous devions regarder le futur, et non le passé. Il fallait peut-être que quelques années passent pour que nous puissions le faire. J’ajouterai qu’interviewer ma mère sur son enfance fut d’autant moins difficile qu’elle avait quitté Buczacz en 1935 et n’avait donc pas vécu directement la Shoah. Ses souvenirs d’enfance étaient doux, même si tous les membres de sa famille qui sont restés sur place ont été assassinés par les Allemands et leurs collaborateurs.

Votre mère n’a pas été en mesure de retourner à Buczacz avant sa mort. Quand y êtes-vous allé vous-même ? Et combien de fois avez-vous fait ce voyage ?

Mon premier déplacement sur place remonte à mars 2003. J’y suis retourné depuis en 2006, 2007, 2008 et 2016.

Comment avez-vous été reçu sur place ? Avez-vous vécu la même expérience que Jonathan Safran Foer a décrite dans son roman Tout est illuminé (éditions de l’Olivier, 2003) ?

1 Comment

  1. Un livre important, si j’en crois l’auteur, c’est magnifique de voir le nombre de personne venant de cette région, qui ont marquer l’histoire des juifs dans son ensemble !

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