Le champion mondial de la vaccination s’apprête à délivrer des « badges verts » qui ouvriront aux vaccinés les portes de nombreux lieux publics. Beaucoup jugent la démarche discriminante. Et très politique…
Bientôt le bout du troisième confinement… Le gouvernement israélien s’apprête à lâcher du lest. Mais en deux temps. Dès dimanche, tous ceux qui auront reçu leur deuxième injection de vaccin depuis au moins une semaine se verront délivrer un certificat numérique de vaccination. Surnommé « badge vert », ce sésame les autorisera à retourner dans les salles de sport, au théâtre, au stade, à l’hôtel et à la piscine. À partir du 7 mars, cafés et restaurants leur seront ouverts. Ils pourront aussi voyager librement vers la Grèce et Chypre. Pour les autres, les restrictions resteront en vigueur.
45 % de la population déjà piquée
Israël avance plus vite que le reste du monde. Près de 45 % de la population (quatre millions de personnes) a reçu au moins une dose du vaccin Pfizer-BioNTech, dont les dernières études démontrent une efficacité à 94 %. Et un Israélien sur trois a déjà eu de sa deuxième dose.
Le gouvernement s’inquiète pourtant d’un ralentissement de la campagne. Beaucoup, notamment parmi les jeunes, rechignent encore à se faire vacciner. Le « badge vert » fait donc partie d’un panier de mesures censées convaincre les plus réticents. Tout est bon pour cela : une boisson gratuite contre un vaccin à Tel-Aviv ; une pizza à Bnei Brak, dont la communauté ultra-orthodoxe est très anti-vaccins… Ou, plus inquiétant, le libre accès des municipalités aux fichiers médicaux, pour faire pression sur les non vaccinés. Des arguments qui sont loin de faire l’unanimité.
Des dérives redoutées
Beaucoup dénoncent un système discriminant et qui n’augure rien de bon pour les libertés individuelles. Des associations de professeurs, de policiers et d’artistes craignent aussi un chantage aux emplois. L’urgence Covid nous pousse à accepter l’ouverture du dossier médical à l’État, ce qu’il recherche depuis longtemps »,
pointent Aviv Segel, professeur de psychiatrie à l’université de Tel-Aviv et Asa Shafer, un philosophe influent, dans une tribune au journal Globes. Qu’est-ce qui suivra ? Un certificat pour être psychologiquement apte à être parent ?
Un grand nombre de commerçants expriment aussi de la frustration. Ils se plaignent de l’absence d’un protocole d’accueil précis et d’une trop grosse responsabilité. « On me demande de jouer au policier » déplore Yaron Sela, président de l’association des professionnels du fitness, un secteur très durement touché par la crise. « Moi, je sais dire si tu dois faire plus de squats, pas si tu as vraiment été vacciné. » D’autant plus problématique que le certificat de vaccination serait assez facile à falsifier, selon une étude de la société de cybersécurité Check Point. On peut même déjà acheter un faux pour moins de 200 € sur Telegram…
« Ça fait un an qu’on est fermé, que vont changer une ou deux semaines de plus? » ,dit Sela. Tout ça pour que Benyamin Netanyahou puisse dire qu’il a rouvert l’économie !
Pour lui, comme pour une grande partie des Israéliens, le vrai but de ces mesures est politique. Les élections législatives sont dans un mois, et le Premier ministre sortant mise beaucoup sur le succès de cette bataille contre le Covid.