De nouveau menacé de mort, Hassen Chalghoumi a écrit au chef de l’État. Riposte Le religieux, cible de l’État islamique depuis 2015, a également déposé plusieurs plaintes à Paris.
Hassen Chalghoumi appelle Emmanuel Macron à l’aide. L’imam de Drancy (Seine-Saint-Denis) vient d’adresser une lettre au président de la République pour l’alerter sur les menaces de mort dont il est la cible. Depuis l’assassinat par un terroriste islamiste du professeur Samuel Paty, le 16 octobre, elles se « sont largement accentuées, entraînant même une véritable fatwa à son encontre », souligne-t‑il dans ce courrier, avant de demander un renforcement de sa « protection républicaine ». Par le biais de son avocat David-Olivier Kaminski, il a aussi déposé plusieurs plaintes à Paris. Le religieux, partisan d’un islam modéré, vit sous protection policière constante depuis 2015 et la fatwa lancée contre lui par le groupe État islamique (EI).
Un message en anglais a été repéré le 24 octobre sur la messagerie cryptée Telegram par une organisation spécialisée dans la surveillance du cyberdjihad. Avant d’être supprimé, il a été largement diffusé par des sympathisants de l’EI. Sa conclusion : « Votre nouvelle cible est ce vieil homme. Exécutez-le! Parce qu’il est encore plus crasseux que ces mécréants de Français. » « Cette fatwa intervient dans le cadre de ma prise de position concernant la mort de M. Paty Samuel », indique Hassen Chalghoumi dans sa plainte du 26 octobre que le JDD, comme Le Parisien, a pu consulter.
« Je vous précise qu’il s’agit de ma quatrième plainte en une semaine », ajoute-t‑il. Deux jours plus tôt, il signalait une autre menace rédigée en arabe sur Twitter. Encore un appel au meurtre : « Nous demandons aux vrais musulmans en France de permettre à Chalghoumi de rejoindre le professeur d’histoire et de devenir aussi un martyr de la nation. »
Sa sécurité avait été renforcée au début du procès « Charlie »
Père de cinq enfants, Hassen Chalghoumi, né en Tunisie en 1972, a suivi une formation religieuse en Syrie et au Pakistan avant de s’installer en France. Avec l’appui du député et maire centriste de Drancy Jean-Christophe Lagarde, il devient en 2008 l’imam de la mosquée Al‑Nour. Ses prises de position contre le voile intégral et ses bonnes relations avec la communauté juive en font un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics et des médias mais lui valent en retour l’hostilité d’une partie de la communauté musulmane. En 2010, le collectif Cheikh Yassine s’était opposé à lui de manière virulente. Le leader de ce groupe, Abdelhakim Sefrioui, vient d’être mis en examen et écroué pour son rôle dans l’engrenage qui a conduit à la décapitation de Samuel Paty.
Sur les réseaux sociaux, l’imam est encensé pour son engagement en faveur d’un islam ancré dans la République, mais son nom est aussi stigmatisé par des milliers d’internautes qui ne voient en lui qu’un « faux imam », un « clown », un « sioniste », voire un « islamophobe ».
« Je crains pour ma vie », a insisté Hassen Chalghoumi auprès des policiers lors de ses plaintes. « Avec le recteur de la mosquée de Paris et les ‘Charlie’, il fait partie des personnalités dont la sécurité a été renforcée au début du procès de l’attentat de Charlie Hebdo » en septembre, précise un policier spécialisé. Depuis la décapitation de Samuel Paty, les procédures pour apologie du terrorisme, menaces de mort, injures ou provocations à la haine se multiplient à travers le pays. À Paris, au moins 70 enquêtes ont déjà été ouvertes.