« Le Point » publie un document qui montre comment le collège du Fort à Sucy-en-Brie a intégré la gestion du ramadan dans le quotidien de l’établissement.
Dans un formulaire adressé aux parents d’élèves, l’administration du collège public du Fort à Sucy-en-Brie, dépendant de l’Académie de Créteil, demandait aux familles dont les enfants font le ramadan de se manifester pour bénéficier sur la facture de cantine d’une « remise exceptionnelle au titre de la pratique d’un jeûne cultuel ». Contactée par nos soins pour évoquer ce sujet, l’administration du collège n’a pas répondu.
Nous avons en revanche soumis ce document à Fathia Boudjahalat* qui a vivement réagi. Enseignante dans un collège de Toulouse, la jeune femme, infatigable défenseuse de la laïcité et des valeurs républicaines, s’insurge contre de telles initiatives. « La religion prend le pas sur la réussite scolaire. Rendez-vous compte ! Il est même écrit sur ce document J’ai noté que cette remise ne sera pas appliquée si un ou plusieurs repas sont quand même pris au collège durant cette période. C’est une façon pour l’établissement d’encourager la pratique religieuse. » Pour l’enseignante, cette incitation est pire que tout, car elle ne laisse même pas la possibilité aux enfants qui seraient fatigués de faire une entorse. « Le message est clair : si tu lâches et que tu manges une fois, l’accord ne marche plus. »
L’enseignante confrontée quotidiennement aux problèmes de communautarisation défend l’idée que c’est à l’école de faire rempart en proposant aux enfants un modèle républicain grâce auquel ils pourraient se construire et consolider leur propre identité.
« On parle de simple adaptation et de côté pratique. Ce faisant, on crée et on accentue le phénomène auquel on prétend s’adapter, insiste Fathia Boudjahalat. Cette administration va au-delà de ce que demandent la loi et la règle budgétaires. Je note par ailleurs que ce sont les parents qui, encore, décident. » Pour elle, cette forme d’obséquiosité pénaliserait l’émancipation, le bien-être et l’insertion des enfants. « Dans les quartiers, la pression communautaire pousse les jeunes à se conformer aux règles religieuses pour être bien vus. Aujourd’hui, il n’y a plus que l’école pour dire : Tu peux être et choisir de vivre autrement si tu le veux. Mais ce genre de courrier sape les chances des élèves qui voudraient suivre une autre voie. » Une bienveillance qui enfermerait toujours un peu plus les enfants dans leur ghetto, et nous ferait un peu plus reculer la République. « C’est absolument révoltant et c’est justement pour cela qu’il faut continuer le combat », commente Fathia Boudjahalat.
Par Nadjet Cherigui