Yochananan Danino suit l’exemple de l’ex-premier ministre Ehud Barak qui préside une firme spécialisée dans le cannabis médical, un secteur en plein développement dans le pays.
En Israël, un ex-chef de la police nationale, un ancien premier ministre et un ex-ministre de la Justice sont les nouveaux barons de la drogue légale. Yochananan Danino, 17e patron de la police israélienne de 2011 à 2015, a été nommé président du conseil d’administration de la société Together spécialisée dans le cannabis médical, un secteur considéré comme une nouvelle terre promise dans le pays. Il suit la voie tracée par Ehud Barak, ex-patron de Tsahal et chef du gouvernement israélien de 1999 à 2001 au début du deuxième Intifada, recruté en septembre par la firme InterCure et par Haim Ramon, tour à tour ministre de l’Intérieur et de la Justice.
Cette ruée de dirigeants vers l’«or vert» intervient alors qu’Israël a autorisé le 27 janvier l’exportation de cannabis à des fins thérapeutiques. La marijuana pousse discrètement sous serre dans des fermes placées sous le contrôle des autorités après enquête. Huit firmes se sont lancées dans la culture et une soixantaine de start-up gravitent autour de la commercialisation du produit. Selon des estimations du Parlement, le business pourrait rapporter 234 millions de taxes par an à l’État israélien. «Notre savoir-faire et notre expertise nous permettent de fournir des produits de haute qualité» explique-t-on au ministère de la Santé. En parallèle, la consommation à usage récréatif a été en partie dépénalisée en 2017 avec la mise en place d’un système d’amendes. Et il est fréquent de sentir des effluves de chanvre sur les terrasses des cafés de Tel Aviv, mais aussi parfois de Jérusalem.
Un marché mondial qui connaît une croissance de 30% par an
Yochananan Danino, qui œuvrait auparavant dans les assurances, va toucher un salaire de 10 000 dollars par mois et obtenir un portefeuille d’actions d’une valeur d’un million de dollars. Selon Cannabis magazine, Together a commencé à planter des graines en Ouganda et a passé des accords de distribution au Canada et en Allemagne. Lorsqu’il dirigeait la police israélienne, Yochananan Danino avait estimé que le temps était venu de revoir l’approche traditionnelle de la marijuana. Il avait commandé un audit sur la consommation à des fins médicales et récréatives.
Ehud Barak qui s’est laissé pousser une barbe fournie est, pour sa part, en charge du développement à l’international de l’entreprise biomédicale InterCure. Il était présent le mois dernier au forum de Davos où il a chanté les louanges du commerce du cannabis thérapeutique. L’anti douleur allégerait les souffrances des cancéreux, des épileptiques, aiderait les autistes et soignerait notamment les troubles du sommeil. En plus de son salaire de 10 000 dollars pour 40 heures de travail par mois, l’ancien membre des forces spéciales, qui avait libéré en 1972 les passagers d’un avion détourné par un commando palestinien de «Septembre noir», a empoché 5% des actions de la firme. Ses stock-options lui ont déjà rapporté – sur le papier – en cinq mois, environ un million de dollars de plus-value.
Les firmes israéliennes entendent partir à la conquête d’un marché mondial qui connaît une croissance de 30% par an et compte exporter un milliard de marchandises d’ici quelques années. À ce jour, une quarantaine de pays ont légalisé le cannabis médical. Les médecins israéliens estiment que son usage dans le traitement des douleurs est moins nocif que les médicaments à base d’opium massivement utilisés.