Zubin Mehta, le temps des adieux…

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Pour son ultime tournée européenne à la tête du Philharmonique d’Israël,  fait escale à la Philharmonie de Paris, le temps d’un concert mémorable, riche d’humanité et d’émotion.

La collaboration entre le maestro, né à Bombay en 1936, et l’ remonte à 1961. Près de soixante années d’un compagnonnage lui ayant permis d’aborder tous les répertoires, Wagner à Vienne, Verdi à Milan, la musique française à Paris, sans oublier les compositeurs américains à New-York, ou encore Strauss et Mahler, partout de par le monde. Un parcours exceptionnel jalonné de moments forts comme le Requiem de Verdi très œcuménique à Bethléem en 1968, le premier concert de l’OPI à la Philharmonie de Berlin en 1971, la Symphonie « Résurrection » de Mahler donnée à proximité du camp de Buchenwald en 1999. Aujourd’hui âgé de 83 ans, directeur musical de l’OPI depuis 1977 et nommé « à vie », Zubin Mehta a décidé élégamment de tirer sa révérence et de transmettre le flambeau au très prometteur  qui prendra officiellement sa suite en 2020-2021 à la direction de l’orchestre.


Pour l’heure, c’est encore au pupitre de direction que se rend le maestro, en progressant à petits pas comptés vers l’estrade d’où il dirige, assis et sans partition, ce concert au programme éclectique convoquant Pártos, Haydn et Berlioz.

Le Concertino pour cordes d’Ödön Pártos ouvre le concert comme un hommage rendu à ce compositeur, altiste et violoniste, d’origine hongroise qui émigra en Israël en 1938 face à la menace hitlérienne. Violon solo de l’Orchestre de Palestine et de l’OPI entre 1938 et 1956, il fut directeur du Conservatoire et de l’Académie de musique Rubin Israël de Tel-Aviv entre 1951 et 1977 et lauréat du premier Prix Israël en 1954. Son Concertino pour cordes composé en 1932 et révisé en 1939 figure parmi ses œuvres les plus connues, seul vestige de sa carrière européenne. Si l’on peut y reconnaître une certaine influence bartokienne, cette courte pièce fournit surtout aux cordes de l’OPI l’occasion de faire montre de leur virtuosité et de leur impressionnante réactivité.

La démonstration orchestrale se poursuit ensuite avec la Symphonie concertante de , composée à Londres en 1792 à la faveur d’une joute musicale avec , dont les quatre solistes (David Radzynski au violon, Emanuele Silvestri au violoncelle, Christopher Bouwman au hautbois et Daniel Mazaki au basson) donnent une superbe interprétation, complice et parfaitement en place, soulignant le cantabile et la galanterie du premier mouvement, la volubilité des solistes dans le second, et l’engagement orchestral dans le troisième et dernier mouvement.

Après la pause, toute la seconde partie est dévolue à la Symphonie fantastique d’, pièce fétiche du maestro, dont il donne une lecture, certes moins originale que celle donnée en octobre 2018 dans cette même salle par Sir John Eliot Gardiner, mais toute aussi convaincante par le relief et la théâtralité de son phrasé. Rêveries et Passions séduit d’emblée par ses contrastes marqués et par le soin apporté eaux détails de l’orchestration sans que jamais ne se perde le fil d’une narration chargée de poésie et de tension. Un Bal envoûte par l’allant des cordes, bien encadrées par des harpes scintillantes et des contrebasses vrombissantes. Scène aux champs, menée de façon très narrative, charme et inquiète tout à la fois par son caractère bucolique (dialogue du cor anglais et du hautbois) brutalement interrompu par l’orage où se distingue une petite harmonie superlative (flûte et clarinette). Marche au supplice nous conduit aux enfers au rythme d’une marche inexorable et saisissante, scandée par les timbales, cuivres et bassons avant que Songe d’une nuit de sabbat ne conclût cette symphonie célébrissime sur une débauche sonore et un inquiétant Dies irae.

En bis, une polka de  « Unter Donner und Blitz » et une standing ovation bien méritée parachèvent joyeusement des adieux chargés d’émotion et de respect.


Source resmusica