Transmettre un message d’espoir au travers de la musique, telle est la mission du contrebassiste israélien. Entouré de jeunes musiciens qui l’inspirent, Avishai Cohen jouera plusieurs dates parisiennes attendues par le monde du jazz.
Jamais aussi bon qu’en trio, Avishai Cohen présente à l’Olympia, puis au Duc des Lombards, son excellent nouvel album, Brightlight, avec la batteuse Roni Kaspi et le pianiste Guy Moskovich. Installé dans un village proche de Jérusalem, la guerre à sa porte, le contrebassiste israélien évoque sa contribution d’artiste dans un tel contexte.
Après avoir expérimenté divers genres musicaux et formules, vous êtes revenu à la tradition du trio jazz, qui a marqué les débuts de votre carrière. Pour quelle raison ?
Je n’ai jamais vraiment arrêté le trio, qui reste le moteur principal de tous mes projets. Dans un trio figurent tous les éléments nécessaires à ma musique. Je n’ai besoin de rien de plus. Je peux jouer et chanter ; c’est une formule souple et véloce, avec un gros son en même temps.
Votre trio actuel est marqué par la présence de la sensationnelle batteuse Roni Kaspi, 24 ans. Comment l’avez-vous découverte ?
Via Instagram. Elle reprenait un de mes morceaux, une improvisation que j’avais moi-même publiée sur le réseau. Je me suis donc intéressé à son travail, puis je lui ai proposé que l’on se rencontre et que l’on joue ensemble. Vous connaissez la suite ! Elle est unique et particulièrement douée pour son âge.
Votre pianiste, Guy Moskovich, a 28 ans. Pourquoi vous entourez-vous souvent de jeunes musiciens ?
Les jeunes musiciens, du moins ceux qui se dévouent précocement à leur art, m’inspirent et m’apprennent beaucoup. Ils sont ouverts d’esprit et nous pouvons grandir ensemble. Un ami m’a présenté Guy. Nous avons joué une fois ensemble et, quand j’ai eu besoin d’un nouveau pianiste, je l’ai appelé. Il est très instruit et maîtrise aussi bien le jazz que le classique. C’est important, parce que les compositeurs et les pianistes classiques m’ont toujours inspiré. C’est d’ailleurs Guy qui a suggéré que nous interprétions Liebesträum no 3, de Liszt, sur l’album.
Vous reprenez aussi « Summertime », de Gershwin, dans une version chantée et particulièrement enjouée. Qu’aviez-vous en tête quand vous l’avez enregistrée ?
Rien ! Quand je compose ou quand j’arrange, je n’ai rien en tête. C’est la condition pour que je puisse créer. Cette version de Summertime date de quelques années. Je me suis amusé avec le groove, je me suis mis à chanter, puis je l’ai interprétée quelquefois en concert avant de l’enregistrer. J’aime le contraste entre ma version et les paroles originales.
Vous dites que la musique doit raconter des histoires. Que raconte votre composition « Courage », qui ouvre l’album ? On imagine que le titre est important.
Les titres ne sont pas aussi importants que ce que les gens croient. J’en trouve parce que c’est une obligation et parce que j’aime que certains puissent intriguer le public. Mais je pourrais tout aussi bien m’en passer et numéroter chaque morceau. S’agissant de cette composition, je m’en suis servi l’année dernière pour mettre en musique un texte de Leonard Cohen, I Pray for Courage. Courage est le titre de sa version instrumentale.
Mais le titre n’est pas anodin. Prenons un autre exemple, « Hope »…
Quand j’écoute cette musique, elle me donne de l’espoir (hope, en anglais), un mot important pour bien des raisons. Nous en avons grand besoin.
Courage, espoir… Vous n’aimez pas beaucoup parler du contexte en Israël, mais quel impact a-t-il sur votre travail ?
Bien sûr, les titres y font référence. Cette année a été douloureuse. Je fais ce que je peux pour m’élever, au moyen de la musique ou au travers de ces titres, et pour diffuser de la lumière et de l’espoir. Être positif, c’est une chose que j’apprends et qui est indispensable actuellement.
J’aimerais avoir de ses nouvelles et je prie pour qu’il revienne. Sa famille m’a sollicité après son enlèvement et cette expérience a changé ma vie. J’éprouvais le besoin de contribuer, d’une manière ou d’une autre. Cette journée et cette année ont été tellement dévastatrices… Mais je ne crois pas avoir quelque chose de particulier à dire sur le sujet. Mes souhaits sont toujours les mêmes : la paix, l’amour entre les gens et les pays. J’essaie de transmettre cela au travers de ma musique et de l’énergie qu’elle procure. C’est le mieux que je puisse faire.
Comment continue-t-on d’être musicien quand on habite aujourd’hui près de Jérusalem ?
La vie n’est pas faite que de beauté et de douceur. J’ai appris à être musicien et compositeur dans tous les contextes. Certains sont plus difficiles que d’autres. Mais, tant qu’il y a de la vie, je continue de créer.
Vous avez joué dans un festival de jazz à Moscou en juin dernier. Que faisiez-vous là-bas ?
C’était un super concert.
Mais encore ?
…
Les 17 et 18 déc., 19h30 et 22h. Duc des Lombards, 42, rue des Lombards, 1er. 01 42 33 22 88. 113-120 €.
Par Eric Delhaye