Yaakov Amidror : « Les leaders du Hamas seront éliminés à Gaza et ailleurs dans le monde »

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Pour Yaakov Amidror, l’ex-conseiller à la sécurité nationale de Benyamin Netanyahou, l’organisation palestinienne ne doit plus avoir la capacité de lancer une attaque sur Israël.

Près d’un mois s’est écoulé depuis les massacres terroristes perpétrés par les combattants du Hamas après une attaque surprise d’Israël, le 7 octobre. En excluant tout cessez-le-feu, l’armée israélienne mène une opération de grande ampleur, au sol, contre le groupe islamiste, tandis que le nombre de victimes civiles de cette nouvelle guerre s’envole.

Jusqu’où ira Israël, malgré la présence de plus de 200 otages entre les mains du Hamas dans la bande de Gaza ? « Les combats seront difficiles », reconnaît l’ancien général Yaakov Amidror, qui fut le conseiller à la sécurité nationale de Benyamin Netanyahou de 2011 à 2013. Mais « nous n’hésiterons pas à faire le nécessaire, quelles qu’en soient les pertes », explique ce chercheur associé à l’Institut pour la sécurité et la stratégie de Jérusalem, un think-tank conservateur.

L’Express : En quoi une intervention de l’armée israélienne à Gaza était inévitable ?

Yaakov Amidror : Après l’attaque barbare du Hamas le 7 octobre, une telle organisation ne doit plus exister de l’autre côté de la frontière israélienne. Les Américains et les Français combattent les terroristes islamistes dans le monde entier, de l’Afrique à la Syrie et à l’Irak. Nous avons l’équivalent d’Al-Qaeda et Daech à dix kilomètres, voire moins, des endroits où ils ont massacré des familles, des personnes âgées, des bébés, violé des femmes, coupé la tête d’enfants. Nous devons répondre de la même façon que le monde a répondu à Al-Qaeda et Daech, les tuer tous et éliminer cette organisation. Ils ne doivent plus avoir la capacité de lancer une attaque sur Israël. Les leaders de cette organisation seront éliminés à Gaza ou ailleurs dans le monde. Ce sera la fin de l’histoire du Hamas.

Quelle approche a pris l’armée israélienne pour son opération à Gaza, une invasion massive ou des attaques plus ciblées ?

Les deux. Nous pénétrons dans Gaza avec des forces massives. Ce sera une opération avec une avancée lente, en usant de notre puissance de feu supérieure, pour atteindre, à la fin, les bases, les centres de commandements et les tunnels du Hamas, les détruire et tuer tous les combattants du Hamas. Il y a un brouillard important sur les opérations menées et j’espère qu’il va continuer, car moins l’ennemi en sait, mieux c’est pour nos forces. C’est la règle n°1 de la guerre.

Pensez-vous que l’armée israélienne est bien préparée à ces combats urbains, réputés les plus difficiles ?

J’espère que oui, mais nous ne le saurons vraiment qu’à la fin de la guerre. Les commandants sur le terrain savent que ce sont des combats difficiles. Ils se sont préparés pendant trois semaines. Je pense que l’armée israélienne a tiré les leçons des opérations dans Gaza de 2014, comme elle a aussi appris de l’expérience des Américains en Irak.

Cette opération aura un coût pour les forces israéliennes. Quel sera-t-il, selon vous ?

Je ne sais pas. Mais après l’attaque barbare du Hamas, nous n’hésiterons pas à faire le nécessaire, quelles qu’en soient les pertes.

Il y a des tensions entre les services de sécurité et le gouvernement concernant la crise actuelle…

Il est évident qu’il y a eu des erreurs [qui ont conduit au 7 octobre], mais elles feront l’objet des enquêtes nécessaires après la guerre. Pour l’instant, personne n’a tous les détails et il faut se méfier des fake news qui sont publiées en faveur ou en défaveur du gouvernement.

De quelle manière la question des otages rentre-t-elle en ligne de compte dans l’opération militaire menée dans Gaza ?

C’est un énorme challenge et les forces armées israéliennes devront faire tous les efforts possibles pour sauver les otages. Mais nous n’arrêterons pas l’opération parce que le Hamas joue avec les otages. Pour autant, si les commandants disposent d’éléments d’informations sur les otages, ceux-ci seront la priorité n°1 pour eux. Tous les Israéliens espèrent que les otages seront en sécurité, mais ils savent que ce ne sera pas facile.

Des colons israéliens s’en sont pris à des Palestiniens en Cisjordanie ces derniers jours. Cela ne risque-t-il pas de provoquer un embrasement et l’ouverture de nouveaux fronts qui compliqueraient la tâche de l’armée israélienne ?

On exagère grandement ce que les colons font, mais en même temps, je pense qu’il faut que cette minorité, à peine quelques personnes, cesse immédiatement. Face au risque d’un front multiple, Israël a rappelé plusieurs centaines de milliers de réservistes. Le nord du pays est quadrillé de forces pour prévenir toute attaque du Hezbollah libanais.

En quoi Israël se trouve à un tournant historique dans son approche de la question palestinienne ?

Elle est déterminée à détruire une organisation terroriste qui ne devrait plus exister. Il n’est pas encore question de la relation entre Israéliens et Palestiniens. Il est question d’une guerre qui ne doit plus permettre à des groupes comme Al-Qaeda, Daech, le Hamas et autres d’exister. La plupart des politiciens israéliens s’accordent sur cette nécessité de détruire le Hamas.

Selon les médias américains, Washington trouverait que les autorités israéliennes ne prépareraient pas assez la séquence politique qui doit suivre les opérations militaires…

C’est une question que nous devrons affronter, mais aujourd’hui, nous ne pouvons pas en discuter, car nous sommes focalisés sur la guerre. Ce n’est qu’après la guerre que nous aurons une bonne compréhension de la situation pour décider ce qui doit et ce qui peut être fait. Que nous serons ouverts à la discussion. S’il y a de la pression de la part des Américains pour plus d’aide humanitaire à Gaza, nous y répondons pour apporter plus d’eau et de nourriture. Mais Israël est libre d’agir militairement.

Propos recueillis par Clément Daniez