Assemblée nationale : une proposition de loi pour envoyer en prison racistes et antisémites

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Le texte porté par les députés Renaissance Mathieu Lefèvre et Caroline Yadan permettra d’appliquer plus efficacement les peines d’emprisonnement à l’encontre des auteurs de propos racistes, antisémites ou discriminatoires via un mandat d’arrêt.

Malgré ses multiples condamnations pour antisémitisme, Alain Soral n’a jamais passé le moindre jour en prison. Tout comme Dieudonné, ou encore le gourou nazi du web Boris Le Lay, réfugié au Japon. Un état de fait qui pourrait changer à la faveur d’une proposition de loi portée par les députés Renaissance Mathieu Lefèvre et Caroline Yadan. Le texte est pensé pour combler un «vide juridique», explique le député de la 5e circonscription du Val-de-Marne, contacté par Libé. «Concrètement, détaille leur exposé des motifs, l’enjeu de cette proposition de loi est de pouvoir sanctionner les idéologues qui sévissent sur les réseaux sociaux ou sur Internet, ces multirécidivistes qui sont rarement présents à leurs audiences et vivent à l’étranger pour échapper à leurs condamnations.»

Combler un vide juridique

Reprenant l’exemple d’Alain Soral, Mathieu Lefèvre insiste sur la nécessité de permettre aux juges de faire appliquer les condamnations prononcées. Ainsi, en 2019, l’essayiste d’extrême droite avait été reconnu coupable de contestation de crime contre l’humanité et avait écopé d’une peine d’un an d’emprisonnement. Or, ce délit, comme l’apologie de crimes de guerre et l’injure publique à caractère discriminatoire notamment, relève du droit de la presse. Il est exclu du périmètre de la loi régissant l’émission des mandats d’arrêt, qui ne peuvent être délivrés que pour des délits de droit commun ou d’ordre militaire ayant abouti à une peine d’au moins une année d’emprisonnement. Dans le cas Soral, bien qu’un mandat d’arrêt ait été émis par la justice, le parquet a dû faire appel de celui-ci, dépourvu de fondement juridique. Permettant à Soral de fuir en Suisse, d’où il continue à sévir.

Le changement proposé par les députés Lefèvre et Yadan traduit une promesse d’Elisabeth Borne. «Nous permettrons l’émission de mandats d’arrêt contre les personnes qui dévoient la liberté d’expression à des fins racistes ou antisémites», annonçait la Première ministre en janvier, lors de la présentation de son plan de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations«Certains se croient des martyrs ou des héros. Ce sont en réalité des délinquants. Et comme tous les délinquants, ils doivent purger leur peine. Il n’y aura pas d’impunité pour la haine», martelait Borne.

Un texte attendu depuis des années

Mathieu Lefèvre assure que le texte qu’il porte avec sa collègue de la majorité sera «déposé dans les jours qui viennent» et sera examiné en bureau politique «d’ici la fin du mois». Ce texte «consensuel» et «réclamé depuis des années par les associations» de lutte contre la haine et les discriminations a, selon lui, toutes les chances d’être voté. Triste coïncidence, lundi 11 septembre au matin, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, déjà destinataire de nombreux messages à caractère antisémite, a publié la photo d’un courrier lui étant destiné, dont l’enveloppe s’orne d’une large étoile jaune.

par Maxime Macé et Pierre Plottu