L’Assemblée nationale décide de faciliter la restitution des œuvres spoliées par les nazis

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Déjà voté au Sénat, le texte a été approuvé à l’unanimité par les députés pour que les ayants droit récupèrent, selon les mots de la ministre de la Culture, «un fragment d’histoire familiale».

Un texte pour faciliter la restitution des biens et d’œuvres d’art spoliés aux Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale a été approuvé d’un vote unanime à l’Assemblée Nationale ce jeudi 29 juin. Le Sénat avait déjà voté le texte à l’unanimité le 23 mai dernier.

«Rien ne saurait réparer la tragédie de la Shoah. Mais nous pouvons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que ces biens culturels puissent être rendus», et que les ayants droit récupèrent «un fragment d’histoire familiale», a défendu la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak. «Nous savons aussi que l’État français, celui qui gouvernait depuis Vichy, tout à sa volonté de collaborer (…) mais aussi de sa propre initiative, a procédé à l’aryanisation de milliers» de biens, a poursuivi la ministre.

Cent mille œuvres

Le texte du gouvernement fixe un cadre pour faire sortir des musées les œuvres qui ont été spoliées entre le 30 janvier 1933 (accession au pouvoir de Hitler) et le 8 mai 1945 (Libération), et les rendre sans avoir à recourir à des lois spécifiques. L’Assemblée l’a adopté à l’unanimité des 77 votants, même si plusieurs élus ont déploré le manque de moyens alloués aux services chargés des restitutions.

Cent mille œuvres auraient été saisies en France durant la Seconde Guerre mondiale selon le ministère. Quelque 60.000 biens retrouvés en Allemagne à la Libération ont été renvoyés en France. 45.000 ont été rapidement restitués, et environ 2200 œuvres ont été confiées aux musées nationaux, dites «œuvres MNR». Le reste a été vendu par l’administration des Domaines au début des années 1950, et nombre d’œuvres sont retournées sur le marché.

«Illégale et illégitime»

Or, contrairement aux œuvres d’art «MNR», l’État ne peut lancer la restitution d’œuvres entrées dans les collections publiques qu’en faisant adopter des lois, pour déroger au principe d’inaliénabilité des collections. Le texte propose d’entériner une dérogation à ce principe. L’État devra toutefois consulter une commission spéciale. Les ayants droit pourront passer un accord à l’amiable sur d’autres modalités de réparation que la restitution.

Les débats, plutôt consensuels, se sont brièvement tendus lorsque le groupe RN a proposé de préciser que l’autorité du régime de Vichy était «illégale et illégitime», des élus de gauche et de la majorité l’accusant de vouloir minimiser le rôle de l’État français. Deux autres textes sont sur le métier. Le Sénat a adopté en première lecture mi-juin une proposition de loi sur la restitution de «restes humains», telles les têtes maories rendues en 2010 à la Nouvelle-Zélande. Et Emmanuel Macron a promis un texte sur la restitution de biens culturels africains.