Après avoir cocréé trois restaurants levantins à Paris, l’Israélien vient d’inaugurer son épicerie traiteur, Shosh. Avec l’ambition de faire découvrir la cuisine généreuse et sans chichis de son aïeule.
« Ouvrir une épicerie traiteur, c’était mon rêve depuis longtemps, pour proposer une cuisine familiale dans de grandes marmites, comme le faisait ma grand-mère. J’ai grandi à Tel-Aviv, né d’une mère irakienne et d’un père austro-germano-russe qui se sont rencontrés en Ukraine. A l’instar de nombreux Israéliens, j’ai poussé entre des cultures très différentes : une culture juive ashkénaze issue de Russie et d’Allemagne, et une culture irakienne mixte et riche.
Comme mes parents travaillaient beaucoup, mon frère, ma sœur et moi passions la majorité de nos journées et soirées chez nos grands-parents irakiens, qui vivaient à deux pas de chez nous, avec la porte toujours ouverte. Ma grand-mère ne travaillait pas et passait son temps à cuisiner. Il y avait toujours de grandes marmites en train de mijoter sur le feu, des plats délicieux et différents tous les jours, en quantité considérable. C’était sans chichis, on s’attablait comme ça, il y avait une simplicité et une générosité spontanée devenues rares aujourd’hui.
Adolescent, j’ai commencé à travailler dans la restauration, durant trois ans, avant de faire mon service militaire, à 18 ans. Même pendant que j’étais à l’armée, ma grand-mère maternelle m’envoyait à manger. J’ai ensuite vécu quelque temps aux Etats-Unis, ses plats me manquaient, et, quand je suis rentré en Israël, je n’avais qu’une idée en tête : ouvrir un restaurant pour ma grand-mère. J’imaginais un lieu très simple, où elle arriverait le matin pour préparer ses marmites, où les gens s’installeraient au fil de la journée, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien. J’avais envie de partager sa cuisine avec les amis, avec tout le monde, je voyais ça comme un cadeau, un hommage à ma grand-mère. Mais mon grand-père n’a pas voulu. Il refusait que sa femme travaille… Il voulait bien financer le projet, mais sans ma grand-mère dedans, ce qui pour moi n’avait aucun sens.
Sur cette déception, je suis parti en France. J’avais 24 ans, je ne parlais pas un mot de français, je n’avais pas un rond et pas de papiers. Mais j’avais la conviction que ma vie serait ici, à Paris. J’ai pris un petit appartement en colocation avec quelqu’un qui est devenu un ami et m’a beaucoup aidé. J’ai trouvé un job comme cuisinier privé pour une famille, pendant six ans. C’était dur, mais cela m’a forgé et m’a fait comprendre que je n’étais pas un vrai cuisinier. Ma passion, c’est surtout recevoir.
J’ai travaillé un peu dans la mode et dans l’art, puis, en 2016, j’ai rencontré l’équipe d’Assaf Granit, un chef célèbre à Jérusalem, qui montait Balagan, sa première adresse à Paris. C’est là que tout a commencé. Aujourd’hui, nous sommes associés et je m’occupe de tout ce qui n’est pas la cuisine dans nos restos : salle, déco, ambiance, service, développement, business… Avec Shosh, j’ai réalisé mon rêve, celui d’offrir aux gens le goût des généreux plats de ma grand-mère – comme la mjadra, un riz aux lentilles traditionnel qu’elle préparait très souvent, toujours avec amour. »
La mjadra : la recette de Tomer Lanzman
Ce riz aux lentilles et aux épices a le goût des généreux plats de la grand-mère du restaurateur israélien. Il se déguste seul ou accompagné d’une sauce yaourt au zaatar.
Pour 6 personnes
3 gros oignons,
2 c. à s. de farine,
200 ml d’huile de tournesol, 250 g de lentilles vertes, 250 g de riz basmati,
6 c. à s. d’huile d’olive,
1 c. à c. de graines de cumin, 1 c. à c. de graines de coriandre,
1 c. à c. de cumin en poudre, 1 c. à c. de cannelle,
½ c. à c. de curcuma,
Sel, poivre.
La préparation
Eplucher les oignons et les émincer finement. Dans un saladier, les remuer avec la farine et une pincée de sel. Dans une sauteuse, faire chauffer l’huile de tournesol et y faire frire les oignons jusqu’à ce qu’ils soient croustillants et dorés. Les sortir à l’aide d’une écumoire et égoutter sur du papier absorbant. Saler.
Verser les lentilles dans une casserole ou un faitout, recouvrir d’un grand volume d’eau, faire cuire 8 à 10 minutes (les lentilles doivent rester croquantes). Egoutter et réserver.
Sécher et faire chauffer le faitout. Faire griller les graines de cumin et de coriandre 1 minute, puis ajouter le riz, l’huile d’olive, les épices en poudre, saler et poivrer. Bien remuer pour enrober le riz, ajouter les lentilles, recouvrir de 350 ml d’eau et laisser mijoter à feu doux et à couvert pendant 15 minutes. Retirer du feu et laisser reposer encore 10-15 minutes.
Mélanger la moitié des oignons frits dans le riz, servir dans les assiettes, garnir du reste d’oignons frits et éventuellement d’un peu de persil frais ciselé. Déguster seul ou avec une sauce yaourt au zaatar.