La ville du Puy-en-Velay, en Haute-Loire, se déchire autour du nom d’une petite rue pentue. L’opposition municipale, par la voix de l’un de ces membres, Jean-Williams Semeraro, demande de débaptiser la rue Maurice Barrès en raison de l’antisémitisme avéré de l’auteur des Déracinés. La polémique n’est pas que locale, et s’étend, à l’occasion du centenaire de la disparition de l’auteur.
C’est lors d’un conseil municipal qui s’est tenu en juillet que cette proposition a été avancée, en évoquant un « antisémite notoire, porteur d’une culture identitaire avec [Édouard] Drumont », nous apprend L’Éveil. Face à cette requête, le maire de la ville de quelque 18.000 habitants, Michel Chapuis, argue la difficulté technique d’une telle entreprise. Il convoque notamment les contraintes d’adressage, et invoque la nécessité « d’assumer son histoire ».
Cette rue du Puy-en-Velay n’est pas la seule à avoir pris le nom de cette figure de la littérature de la fin du XIXe-début XXe siècle, à l’instar d’un Anatole France. À Paris, il existe même la place Maurice Barrès dans le 1er arrondissement, baptisé en 1924, soit un an après la mort de l’écrivain.
Dans le sillage du Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF), l’ancien inspecteur d’académie Jean-Williams Semeraro a pensé substituer l’inactuel Barrès, par l’avocate et militante féministe Gisèle Halimi.
Un écrivain nationaliste
Le Vosgien né en 1862 ne fut pas seulement un auteur, mais un politicien engagé durant des décennies. Après s’être tenu derrière le général Boulanger lorsque ce dernier faillit atteindre le pouvoir en 1888, il devient député à Nancy en 1889 et 1893. Il est ensuite député de Paris pendant 17 ans, de 1906 à sa mort.
Le romancier, d’abord avant-gardiste dans ses jeunes années, bascule à la fin du XIXe siècle dans le nationalisme, avec sa grande idée de « la terre et les morts », un concept qu’il déploie dans sa trilogie du Roman de l’énergie nationale. La Première Guerre mondiale et ses lendemains le placeront comme un penseur influent du nationalisme français, notamment par sa position de Président de la Ligue des patriotes à partir de 1914. Sa vision est présumable par ce triptyque pétainiste : « Travail, famille, patrie. »
Devenu Académicien français à partir de 1906, Maurice Barrès tire une part de sa respectabilité de son art d’écrivain, salué par des figures aussi éloignées que le communiste Louis Aragon ou le royaliste Charles Maurras. Il est également avéré que Maurice Barrès fut un antidreyfusard antisémite, ce que révèlent bon nombre d’articles qu’il rédigea dans les années 1890-1900.
Néanmoins, il évoluera un peu sur cette question, notamment dans son texte Les diverses familles spirituelles de la France, parue en 1917, où il replace les Juifs français dans « le génie national », et rend hommage aux morts juifs de la Grande Guerre.
La polémique surgit, alors que 2023 verra la commémoration du centenaire de la disparition de l’écrivain, prévue dans le programme de l’année de France Mémoire, qui organise les célébrations nationales. Dans les colonnes de Libération, Yves Bruley, historien et directeur de France Mémoire, détaille les motivations de cette commémoration.
« Barrès était un homme très influent à son époque. Antisémite, xénophobe et nationaliste… Ces trois sujets existent encore aujourd’hui et pas seulement en France. Ce choix a donc une vraie résonance avec le présent. Il est important que l’opinion publique soit éclairée sur son influence avec des connaissances précises du contexte historique de l’époque, fiables et non politisées », explique-t-il.
Il rappelle par ailleurs que « commémorer n’est pas célébrer », une formule qui laisse toutefois des historiens et des historiennes dubitatifs, à l’instar de Marie Peltier, historienne belge : « Il n’y a pas besoin de commémorer pour faire connaître l’histoire. […] Il faut plus que jamais les analyser, connaître leur courant idéologique et leur formation historique, mais en les enseignant plus qu’en leur rendant hommage. »
ce Yves Bruley est avant tout un faux-jeton et qui ne fait que reprendre en toute hypocrisie le slogan « commémorer n’est pas célébrer » qui avait servi de feuille-de-vigne aux macroniens, avant qu’ils ne soient obligés de faire machine arrière à propos de la commémoration de… Maurras.
Qui plus est il ment-et-en-sachant-qu’il-ment là où il affirme : « il est important que l’opinion publique soit éclairée sur son influence avec des connaissances précises du contexte historique de l’époque, fiables et non politisées ». Laissons de côté ces… connaissances non-politisées (sic !), qui sont comme le cochon kasher -elles n’existent pas. Mais surtout il sait très bien qu’en matière de commémorations l’écrasante majorité des gens ne s’embarrasse pas de… connaissances et que la mémoire collective ne retient que l’hommage rendu -et qui constitue bien, le but recherché.
Ah oui pour sûr il a bien de la chance, l’intéressé, qu’un quotidien qui se dit de gauche lui ouvre ses colonnes…