Mort de Françoise Rudetzki, porte-parole des victimes du terrorisme

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© Crédit photo : DAVID Thierry / SUD OUEST
D’Emmanuel Macron aux associations de victimes des attentats du 13 novembre 2015, les hommages se sont multipliés pour l’initiatrice du fonds de garantie des victimes du terrorisme.

“Femme d’exception” ayant mis sa vie au service des victimes du terrorisme après avoir été elle-même grièvement blessée lors d’un attentat en 1983, Françoise Rudetzki est décédée dans la nuit du mardi 17 au mercredi 18 mai à Paris, à 73 ans, a-t-on appris ce mercredi auprès de sa famille. “Jusqu’au bout, elle aura milité pour la reconnaissance et la prise en charge des victimes d’attentats”, a déclaré sa fille Deborah Rudetzki, contactée par l’AFP.


Et rapidement, les hommages se sont multipliés pour celle qui aura notamment initié la création du fonds de garantie des victimes du terrorisme. Le président de la République Emmanuel Macron a notamment salué “une figure tutélaire pour toutes les victimes d’attentats”, rappelant que François Rudetzki aura vécu “une vie de douleurs, de combats et de victoires”.

“Sa voix ne s’éteindra pas”, a quant à lui réagi le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, exprimant sa “tristesse” face à la disparition d’une femme qui “a fait de ses blessures son plus grand combat en consacrant sa vie aux victimes du terrorisme”.

Une figure majeure et protectrice pour toutes les victimes

Des victimes qui ont elles aussi honoré la mémoire de la septuagénanire. L’association Life for Paris, qui rassemble de nombreuses victimes des attentats du 13-Novembre, a notamment salué dans un communiqué la “grandeur d’âme unique” de cette “femme d’exception”, qui “a permis de faire de la France un exemple de la prise en charge des victimes” et apporté une “aide fondamentale” à l’association à ses débuts.


Une autre association liée aux attentats survenus à Paris et Saint-Denis en 2015, 13Onze15 a également réagi, par le biais d’un communiqué de son président. Elle évoque notamment “une interlocutrice privilégiée des pouvoirs publics et de tous les acteurs de ‘l’environnement’ des victimes, en France comme à l’étranger, celles attentats, mais aussi des accidents collectifs et de toutes les catastrophes”.


“Son ambition doit être notre héritage et notre boussole”, a aussi réagi dans un communiqué Frédérique Calendra, déléguée interministérielle à l’aide aux victimes, saluant la “pugnacité” et l’“enthousiasme” de Françoise Rudetzki dans son combat.


“Françoise Rudetzki a toujours voulu se battre pour la dignité, pour la reconnaissance des droits” des victimes et “elle ne lâche jamais prise”, avait déclaré le président François Hollande en lui rendant hommage en 2016 à l’Élysée, avant de la décorer de l’Ordre national du mérite.

Activiste inlassable aux nombreuses victoires

Juriste, Françoise Rudetzki avait créé SOS Attentats, première association de défense des victimes d’actes de terrorisme, en décembre 1985, une date qui marquait le début d’une vague d’attentats meurtriers liés au conflit du Proche-Orient à Paris.


Et dès 1986, elle avait obtenu la création du Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme, financé par un petit prélèvement sur chaque contrat d’assurance de biens, une garantie étendue en 1990 à l’ensemble des victimes d’infractions pénales (viols, agressions, braquages).

“Jusqu’à son décès”, elle est restée “membre du conseil d’administration” du Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions (FGTI), ont indiqué dans leur communiqué les familles Rudetzki et Dab.


Elle avait aussi réussi à faire reconnaître aux victimes du terrorisme le statut de victimes civiles de guerre et la possibilité pour les associations de se porter partie civile lors des procès. En 2018, elle avait également défendu la création d’un Centre national de ressources et de résilience (CN2R), destiné à améliorer la prise en charge des victimes d’évènements traumatiques.

“À cette époque, on ne parlait jamais des victimes”

Le 23 décembre 1983, Françoise Rudetzki avait été victime d’un attentat à la bombe au restaurant le Grand Véfour, sous les arcades du Palais-Royal, à Paris, où elle fêtait ses dix ans de mariage avec son mari. L’explosion avait projeté une porte métallique qui avait écrasé les jambes de la jeune femme d’affaires. Opérée à des dizaines de reprises pour soigner ses blessures, elle avait contracté le VIH et le virus de l’hépatite C lors d’une transfusion.


“À cette époque, on ne parlait jamais des victimes”, avait plus tard confié à l’AFP Françoise Rudetzki. “Le mot ‘victime’ était un peu comme un mot qu’il ne fallait pas prononcer et seuls les médecins s’occupaient des victimes”.

Par la suite, les chroniqueurs judiciaires l’auront croisée d’innombrables fois aux audiences et dans les couloirs du palais de justice de Paris, où elle se déplaçait à l’aide de béquilles.

“Nous mesurons la perte que cela va représenter pour les victimes”, a souligné l’avocat Frédéric Bibal en annonçant son décès à la reprise d’audience au procès des attentats du 13 novembre 2015, qui se déroule en ce moment à Paris. Françoise Rudetzki avait “accompagné de nombreuses victimes au cours de procès d’attentats terroristes”, a rappelé maître Bibal, qui représente plusieurs dizaines de parties civiles au procès du 13-Novembre.

Ses obsèques auront lieu dans la plus stricte intimité familiale, ont indiqué ses proches.

Source huffingtonpost