Arnaud Mimran, figure de l’arnaque au carbone, est soupçonné d’avoir joué un rôle dans la mort de son ex-beau-père, l’entrepreneur Claude Dray, et de son ancien associé, l’affairiste Samy Souied.
Il devait sortir de prison prochainement. Il n’en sera rien. Après quatre jours de garde à vue à la brigade criminelle, Arnaud Mimran, 49 ans, figure de la gigantesque escroquerie à la taxe carbone, pour laquelle il avait été condamné en 2016 à huit ans de prison, a été mis en examen, jeudi 15 avril, dans deux dossiers d’assassinats suivis par la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS). Des faits sur lesquels il a déjà été interrogé à plusieurs reprises et pour lesquels il a toujours contesté une quelconque implication.
Le premier dossier concerne le meurtre, un soir de septembre 2010, de son principal associé dans la fraude sur le marché du carbone, Samy Souied, tué par balles par deux hommes qui ont surgi à scooter devant le palais des Congrès, à Paris. M. Souied était venu d’Israël pour régler un différend financier qu’il avait alors avec Arnaud Mimran et qui se chiffrait en millions. Si plusieurs éléments permettaient de s’interroger sur l’emploi du temps de M. Mimran la journée précédant les faits, ainsi que sur la réalité de certaines de ses déclarations aux policiers, l’enquête était, jusqu’ici, restée sans suspect. Il est aujourd’hui formellement mis en cause pour meurtre en bande organisée.
L’entourage de Samy Souied était allé jusqu’à mener ses propres investigations auprès de ceux qui auraient pu avoir un intérêt à le tuer et avait passé Arnaud Mimran au détecteur de mensonges en Israël, mais en vain. Les policiers de la brigade criminelle se demandent, en outre, si Arnaud Mimran n’a pas désigné M. Souied aux tueurs en lui tendant une bague en forme de tête de mort.
Gisant dans sa chambre
Arnaud Mimran a été par ailleurs mis en examen, jeudi 15 avril, pour l’assassinat de son ex-beau-père, l’homme d’affaires Claude Dray, alors âgé de 76 ans, découvert le 25 octobre 2011 au matin dans la chambre de sa villa de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) – un hôtel particulier de 1 000 mètres carrés s’étendant sur cinq étages –, gisant sur le ventre, le corps transpercé de trois balles de calibre 7,65.
Longtemps, cette enquête était, elle aussi, restée un mystère. Aucune effraction n’avait été relevée par la brigade criminelle lors de ses constatations. De nombreuses pistes avaient été envisagées, sans pour autant aboutir, tant les affaires et la fortune de cette figure respectée de la communauté juive locale étaient grandes. Initialement ouverte au tribunal de Nanterre, où quatre juges d’instruction se sont succédé, l’affaire a finalement été transmise à la juridiction interrégionale spécialisée de Paris en mars.
Arnaud Mimran avait été entendu une première fois en 2011, quelques jours après l’assassinat de son ex-beau-père, assurant qu’il n’avait « rien à voir avec cette histoire ». Il n’avait toutefois pas nié que les relations qu’il entretenait avec lui s’étaient dégradées depuis près de deux ans après qu’il s’est séparé définitivement d’Anna, la fille de Claude Dray. Il avait à nouveau été auditionné en avril 2015, cette fois dans le cadre d’une garde à vue, pendant laquelle il avait notamment été interrogé sur la perte de son téléphone le soir des faits, sans toutefois que les juges d’alors retiennent aucune charge contre lui.
Prêt d’une grosse somme d’argent
Entendue, elle aussi, par les enquêteurs à l’époque, Simone Dray, l’épouse de Claude Dray, avait raconté que son mari s’était ouvert auprès d’elle des problèmes qu’il avait avec deux de ses gendres, dont Arnaud Mimran, à qui il avait prêté une grosse somme d’argent que celui-ci tardait à rembourser. Elle avait expliqué aussi que son mari ne voyait pas d’un bon œil le fait qu’Arnaud Mimran fréquente Samy Souied.
Plusieurs des filles de Claude Dray avaient abondé en ce sens, précisant qu’il faisait partie de ceux qui avaient le code d’entrée de l’hôtel particulier et, pour l’une d’entre elles, que son père en était même venu aux mains après qu’Anna Dray avait dit à son père qu’Arnaud la battait. Un homme proche de l’entrepreneur avait raconté, pour sa part, que celui-ci avait commencé à constituer un dossier sur les affaires de son gendre et qu’il avait même transmis au service national des douanes judiciaires un mémorandum dans lequel il évoquait les opérations financières suspectes d’Arnaud Mimran.
Sans que l’on connaisse, à ce stade, les nouveaux éléments dont disposent les magistrats contre lui dans ces deux dossiers, il fait aujourd’hui figure de principal mis en cause dans deux dossiers criminels. Devant les enquêteurs, Arnaud Mimran n’a pas souhaité répondre aux questions, arguant qu’il avait déjà été interrogé sur ces affaires. La garde à vue d’un de ses proches, l’ancien boxeur Farid Khider, était toujours en cours vendredi 16 avril au matin. Mimran doit, par ailleurs, comparaître le 8 juin avec lui aux côtés de quatre autres personnes devant la cour d’assises de Paris, où il doit être jugé pour l’enlèvement et la séquestration, en 2015, d’un homme d’affaires suisse qu’il est soupçonné d’avoir voulu extorquer. Contacté, l’avocat d’Arnaud Mimran, Jean-Marc Fedida, n’a pas souhaité faire de commentaires.