L’écrivain a reconnu être l’auteur de dessins antisémites parus lorsqu’il avait 21 ans. Paul-Eric Blanrue, ex-frontiste proche du négationniste Robert Faurisson, affirme l’avoir fréquenté jusqu’en 2013. Retour très complet sur ses fréquentations.
Un antisémitisme juvénile, un péché de jeunesse. C’est ainsi que Yann Moix qualifie ses errements négationnistes et antisémites, révélés par L’Express en pleine promotion de son nouveau roman, Orléans (Grasset). Des caricatures commises à l’âge de 21 ans, illustrant des pamphlets antisémites. « J’assume. J’endosse tout. Ce que j’ai fait à l’époque avec trois ou quatre cons, on était des types complètement paumés. J’écrivais, je dessinais, je produisais de la merde. Ces textes et ces dessins sont antisémites, mais je ne suis pas antisémite », a-t-il déclaré, mercredi 28 août, au quotidien Libération. Une jeunesse qui le hantait ; il savait qu’elle pouvait resurgir.
Il y a quatre ans, contacté par Le Monde dans le cadre d’un portrait consacré à Yann Moix, Alexandre Moix avait refusé de parler de son frère, et s’était contenté de répondre : « Je pense que quelqu’un comme Marc-Edouard Nabe, qui l’a très bien connu, pourrait vous donner le “Rosebud” de Yann Moix. » Marc-Edouard Nabe, sulfureux écrivain-essayiste à succès des années 1980 et 1990, auteur pamphlétaire d’Au régal des vermines (Barrault, 1985), se définit comme « un combattant contre Israël ». Aujourd’hui, Nabe suit l’affaire de loin, depuis ses vacances en Grèce, mais tient à préciser : « Dans mon livre Les Porcs [auto-édition, 2017], j’ai été le premier à dénoncer l’ambivalence de Moix et l’existence de cette BD antisémite dont L’Express a publié des extraits. Son frère, Alexandre, m’en avait parlé. »
« Lettres d’admiration »
Dans Les Porcs, un chapitre entier est consacré au sujet : « D’après son frère toujours, Yann était depuis son adolescence obsédé par les camps de concentration, le nazisme, la dictature, les juifs. (…) Il a longtemps fait le rapport entre les sévices que son père opérait sur lui et ceux des nazis sur les juifs dans les camps. Pas mieux pour exorciser tout ça que de jouer au mini-néonazi ! »
C’est en 1997 que Nabe, alors au faîte de sa notoriété, rencontre Moix : « Moix a commencé par m’envoyer des lettres d’admiration et de fascination, raconte Nabe. Jusqu’à me comparer à Claude François, son autre idole. Il a toujours été un opportuniste, comme me l’a dit Thierry Ardisson, son futur employeur. Moix a consolidé tout ce qu’il pouvait comme réseau afin que les journalistes littéraires le protègent en cas de coup dur. On va maintenant voir ce qu’ils vont tous faire. Moix veut se dégager de son passé soi-disant sulfureux. Quand il fréquentait certaines personnes… »
Comme Paul-Eric Blanrue, par exemple, que Nabe lui présente en 2001. Blanrue, 52 ans, est un ancien professeur d’histoire, un essayiste controversé et un membre du Front national dans les années 1980. En 2007, Yann Moix préface un de ses ouvrages : Le Monde contre soi : Anthologie des propos contre les juifs, le judaïsme et le sionisme. Le livre réédité – mais amputé de la préface de Moix – et vendu sur le site d’Alain Soral, essayiste d’extrême droite condamné en avril pour négationnisme, sera interdit après décision de justice puis de nouveau autorisé.
En 2011, Blanrue, autoproclamé militant radical de la liberté d’expression, réalise un entretien filmé d’une heure trente avec Robert Faurisson, qui, jusqu’à sa mort, en 2018, s’obstinera à nier l’existence des chambres à gaz. Blanrue a soutenu Faurisson lors de son procès en 2009 en compagnie de Dieudonné, polémiste condamné à plusieurs reprises pour antisémitisme.
« Folie complotiste »
Il y a quatre ans, dans « M Le magazine du Monde », Yann Moix assurait : « Avec Blanrue, on avait deux sujets de conversation, Guitry et les filles. On ne parlait jamais politique. C’est un type très drôle. Petit à petit, je l’ai vu s’enfoncer dans la folie complotiste. La proximité de Blanrue et de Faurisson m’était totalement inconnue. Totalement. C’est impensable. L’antisémitisme est aux antipodes de mon être. Je suis très proche d’Israël. Je ne m’en suis jamais caché. » Le 7 octobre 2011, à 16 h 22, pourtant, dans un mail adressé à Blanrue, Moix écrit : « On parlera de ton documentaire, qui est vraiment très bon. »
Blanrue assure aujourd’hui : « Evidemment, Yann était au courant que j’étais proche de Faurisson. Il était aussi au courant du film. C’est même lui qui en a trouvé le titre, Un homme. » Blanrue poursuit : « Il voulait aussi qu’on fasse un livre ensemble pour accompagner la sortie du film. Il voulait que j’y joue le rôle de Faurisson, dans le style de Jonathan Littell. Il a cherché un éditeur, il devait en parler à Philippe Sollers et il s’est dégonflé. Mais soyons clairs : avec moi, il n’a jamais été antisémite. On n’a jamais parlé des camps de la mort. Pas un mot sur le révisionnisme. En revanche, il connaissait très bien le sujet. Il était fasciné par le fait que je voie Faurisson. Il était fasciné quand j’y allais, quand j’étais avec lui et quand j’en revenais. Il fallait que je lui raconte. »
En 2010, une pétition contre la loi Gayssot – réprimant les actes racistes, antisémites ou xénophobes –, qualifiée à l’époque par Le Monde de « bottin mondain négationniste », circule. La signature de Moix s’était retrouvée au côté de celle de Faurisson. A l’époque, l’écrivain se défend : « On m’a promis un Robert (Badinter) mais, hélas, j’ai découvert un tout autre Robert, in fine, sur la liste : Faurisson ! », écrit-il sur son blog. La rupture avec Blanrue date selon Moix de cette époque. « C’est totalement faux, contredit Blanrue. On s’est brouillé un temps, on s’est un peu moins côtoyé après la pétition, mais on se voit encore jusqu’en mai 2013. J’ai des centaines de mails et de SMS qui en attestent. Il m’abreuve de vidéos quand il passe du temps en Corée du Sud. La dernière fois, on s’est vus au Royal Pereire [un restaurant parisien]. Il avait une sale tête, pas rasé, marqué. Je sentais qu’il y avait un truc qui n’allait pas. Son roman, Naissance [2013], à la rédaction duquel j’avais assisté, étape par étape, j’en ai même écrit cinquante pages, allait sortir. Il m’annonce qu’il allait avoir le Renaudot. “Pour ça, je suis prêt à tout, absolument tout”, a-t-il ajouté. Et notamment à tourner le dos à son passé. Je n’ai plus jamais eu de nouvelles. »
Depuis le début de la polémique, ses proches ne se sont pas exprimés. Son ami, le philosophe Bernard-Henri Lévy, que Moix qualifiait, à 21 ans, de « philosopheux coprophage et sodomite sioniste au nez long, dont le crâne n’a pas été rasé par les amis d’Adolf, etc. », n’a pas souhaité faire de commentaire : « J’y consacrerai mon prochain “Bloc-notes” dans Le Point. » Mercredi 28 août, Grasset, la maison d’édition de Yann Moix, nous a indiqué que l’écrivain ne souhaitait pas répondre au Monde.
Le plus choquant dans cette lamentable histoire, c’est de voir ce personnage se coiffer d’une kippa, au cours de « on n’est pas couché », il y a quelque temps.
Une erreur de jeunesse, à vingt ans ?
Mais, combien de jeunes juifs victimes de « USHOAHAYA » (c’est son aboMINABLE calembour) auraient été heureux de commettre des erreurs de jeunesse et d’atteindre leur vingtième année ?
Un ami comme lui, je le souhaite à mon pire ennemi, comme disait GROUCHO MARX.
La bonne conduite ne serait-elle pas d’oublier jusqu’à son nom et son « oeuvre » , par crainte de participer à cette ignominie.