Ces rescapés de la Shoah qui témoignent toujours

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Samuel Pintel devant une classe lors de l’un de ses témoignages à la Maison d’Izieu, en janvier 2017
Je voudrais vous présenter deux rescapés de la Shoah qui témoignent devant tous les publics, et en particulier devant des enfants et des ados, pour que la mémoire les guide.

Meyzieu : Lili Leignel, déportée à Ravensbrück à l’âge de 11 ans

L’Espace Jean-Poperen accueille, ces lundi et mardi, trois conférences de Lili Leignel, rescapée des camps de concentration nazis, pour délivrer son témoignage et un message de tolérance et de paix à près de 2 400 scolaires. Lili Leignel, née Rosenberg, aura 87 ans cette année. Elle en avait 11 lorsqu’elle fut déportée dans le camp de concentration de Ravensbrück, car d’origine Juive.

Après être restée cachée pendant trois ans, avec ses deux frères (Robert, 9 ans, et André, 3 ans et demi), dans la famille de l’Abbé Flipo, ses parents, pensant le danger écarté, reprirent les trois enfants avec eux, dans leur maison de Roubaix. C’est là, dans la nuit du 27 octobre 1943, à 3 h du matin, que les Allemands sont venus les arrêter. Peut-être sur dénonciation…

Paniqués, les enfants et leurs parents sont conduits en prison, sans même leur laisser le temps de faire une valise, puis emmenés dans le camp de Malines en Belgique. La mère et les trois enfants seront déportés au camp de Ravensbrück. Puis ils ont été transférés dans le camp de concentration nazi de Bergen-Belsen.

Le 15 avril 1945, le camp de Bergen-Belsen est libéré par les Alliés : Lili et ses deux frères repartent seuls en France car leur mère est atteinte du typhus. Quand les enfants retrouvent leur maman, elle ne pèse plus que 27 kg. Ils apprennent en même temps le décès de leur père, abattu par les SS à Buchenwald, juste avant la libération du camp.

Cette tragédie, Lili Leignel l’a longtemps gardée enfouie en elle, jusqu’à ce qu’apparurent les premières thèses négationnistes sur l’holocauste. Depuis, elle n’a eu de cesse de délivrer son témoignage, auprès d’une multitude de jeunes de toutes les régions de France, afin de les sensibiliser à la tolérance et au respect des différences entre les êtres humains, seul rempart contre l’abomination. Et surtout faire que de telles tragédies ne se reproduisent plus jamais !

Après deux conférences ce lundi organisée par l’ANACR de Décines-Meyzieu (Association Nationale des Anciens Combattants et Amis de la Résistance), une dernière se tiendra le mardi 9 avril de 9 à 11 heures à l’Espace Jean-Poperen, 135 rue de la République à Meyzieu. Courriel : anacr-decines-meyzieu@hotmail.fr

Samuel Pintel, l’enfant juif survivant passeur de mémoire attendu à Achères

Samuel Pintel, 82 ans, viendra à la rencontre de collégiens d’Achères (Yvelines) mardi 9 avril pour témoigner sur son histoire d’enfant juif qui a survécu à la persécution nazie. C’est un témoignage qui ne laissera pas les collégiens d’Achères indifférents. Samuel Pintel, 82 ans, viendra à la rencontre de quarante-cinq élèves de 3e du collège Camille-du-Gast, mardi 9 avril pour raconter son histoire d’enfant juif survivant du péril nazi.


Une histoire qu’il a pu reconstituer à grand renfort de recherches dans les archives de l’Union générale des Israélites de France (Ugif) quarante ans après les faits. Une histoire de chance, aussi, qui l’a préservé à plusieurs reprises.

ils de parents polonais émigrés en France dans les années 30, Samuel Pintel naît à Paris le 12 février 1937 à Paris. Lorsque la France entre en guerre contre l’Allemagne nazie en septembre 1939, son père Jacob, qui exerce comme tailleur dans son petit logement parisien, s’engage au sein du 22e régiment de marche des volontaires étrangers.

Il reçoit une instruction au camp de Barcarès et participe aux campagnes d’Alsace, des Ardennes et de la Somme. Il est fait prisonnier le 6 juin 1940 et sera détenu au Stalag VIIB près de Memmingen en Allemagne durant toute la période de la guerre. »

Pendant ce temps, son épouse Tauba et le petit Samuel subissent les persécutions du régime de Vichy. En 1943, elle confie son fils, alors âgé de 6 ans, au centre de l’Union générale des Israélites de France, rue Lamarck, à Paris puis elle tente de franchir la ligne de démarcation pour rejoindre son oncle réfugié dans l’Indre. En vain.

Tauba est interpellée par la gendarmerie française et est dirigée vers le camp de Douadic (36) où elle est assignée à résidence forcée. « Elle se sent en relative sécurité et me fait venir auprès d’elle en mai 1943. »

En juillet, Tauba et Samuel sont envoyés à Annecy (74), dans un centre d’assignation à résidence. « C’était en zone d’occupation italienne et les Italiens ne persécutaient pas les juifs. » En septembre, les troupes italiennes cèdent la place aux Allemands et, le 16 novembre, le centre d’Annecy fait l’objet d’une rafle.

« Les Allemands avaient obtenu la liste des juifs assignés à résidence par la préfecture… ». Les personnes arrêtées sont, pour la plupart, déportées à Auschwitz. Du fait de sa condition de femme de prisonnier de guerre, Tauba est épargnée et internée au camp annexe parisien Lévitan. Samuel, lui, est sauvé par une jeune femme dont il ne connaît toujours pas le nom, malgré toutes ses tentatives de la retrouver pendant toutes ces années.

« Cette femme était la seule personne à ne pas être juive. Son nom ne figurait pas dans la liste. Ma mère m’a regardé et m’a fait comprendre que je devais lâcher sa main et prendre celle de la dame. Je me souviens très bien de son regard. Ma mère m’avait déjà dit que si un jour on devait être séparé, je devais faire ce qu’elle dirait et surtout ne pas pleurer. Alors j’ai obéi, sans offrir de résistance ni pleurnicher. Cette personne a pris un gros risque car si j’avais été démasqué, elle et moi, nous aurions été mis dans le camion avec les autres. »

La femme le conduit au bureau de l’Ugif de Chambéry où le petit Samuel est pris en charge par Miron et Sabine Zlatin qui dirigent la Maison d’enfants d’Izieu. Il y reste deux mois. « J’avais un camarade de classe qui était assis à côté de moi, Isidore Kargeman. Il était plus âgé, il devait avoir 10 ou 11 ans. Il avait réalisé un dessin du professeur Nimbus avec un compliment pour l’anniversaire de la directrice le 8 janvier 1944. J’ai retrouvé ce dessin dans les archives de Mme Zlatin. »

À la fin de janvier 1944, Samuel quitte la Maison d’Izieu et retourne à Chambéry où il est récupéré par Jeanne et Alexis Bosselut, un couple non juif qui était voisin de palier de la famille Pintel à Paris. « Depuis le camp de Drancy, ma mère m’avait fait rechercher et fait prévenir Jeanne et Alexis Bosselut. » Samuel restera chez eux jusqu’en mai 1945. Le couple a obtenu la médaille des Justes parmi les Nations à titre posthume.

Samuel a eu la chance de retrouver sa mère et son père, tous deux libérés par les alliés en avril et mai 1945. « Pendant quarante ans, il ne s’est rien passé. Ma mère est décédée en 1951. Mon père avait eu très peu d’information sur ce qui était arrivé à ma mère durant la guerre. »

Samuel a réussi à reconstituer le fil de l’histoire grâce aux archives de l’Ugif puis aux archives départementales. En 1987 se déroule procès de Klaus Barbie. À cette occasion, Samuel réalise qu’il avait séjourné à la Maison d’Izieu et apprend que la directrice de l’époque, Mme Zlatin, était toujours en vie (contrairement à son époux déporté). « Je lui ai rendu visite et avec d’autres, nous l’avons accompagnée dans son projet de création d’un mémorial. » Le mémorial de la Maison d’Izieu a été inauguré en 1994.

Sources leprogres et actu