Hausse des actes antisémites en France : les juifs de Corse inquiets

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Les actes antisémites ont bondi en France de 74% l’an dernier, et ça continue en 2019. En Corse, la petite communauté israélite -entre 300 et 400 personnes- s’inquiète, mais déclare ne pas ressentir d’hostilité sur l’île.
Derrière le Vieux port de Bastia, quatre membres de la communauté israélite bastiaise nous ont reçus dans une toute petite synagogue. L’un d’eux, Jean-Marc Mimouni, s’inquiète avant tout pour ses proches sur le continent : « Concernant ma fille qui vit à Paris, elle prend le RER, souvent je lui dis ton chai (c’est un signe distinctif qui veut dire la vie), tu ne le mets pas aux yeux de tout le monde dans le métro. Les actes antisémites se sont multipliés. On approche à un paroxysme quand j’ai vu les images à la télé d’Alain Finkielkraut se faire insulter avec cette haine, j’ai eu peur. J’ai pensé à mes enfants, à ma famille, à mes amis. J’ai la chance de vivre en Corse, la Corse nous protège ».
Confirmation du Président de la petite communauté israélite bastiaise, Gérard Lévy, pour qui le conflit israélo-palestinien n’est pas, pour l’heure, importé ici.


« Nous avons d’excellentes relations avec les marocains et à aucun moment il y a eu une menace, un acte, une réflexion désagréable à l’encontre des juifs de Corse, explique-t-il. Ceci étant, peut-être que parmi eux il y a des personnes anti-israéliennes, anti-juifs mais vis-à-vis de la communauté il ne se passe et il ne s’est absolument rien passé. » Mais en France les actes antisémites se multiplient.

L’antisionisme sanctionné ?

D’abord réticent, le Président Emmanuel Macron a affirmé lors du traditionnel dîner du CRIF mercredi 20 février, que l’antisionisme serait possiblement condamnable, s’il s’agit de contester l’existence même d’Israël. Le philosophe Alain Finkielkraut n’a pas entendu l’insulte « sale juif » lorsqu’il s’est fait insulter mais « sale sioniste de merde ».

« Pour moi l’antisémitisme traditionnel, culturel, je dirais, s’est amoindri au profit d’un antisémitisme antisioniste, explique Henri Lévy, membre de la Communauté israélite bastiaise. Puisqu’il est bien ciblé, on reproche aux juifs d’être pro-israéliens ou inconditionnels d’Israël, ce qui n’est pas toujours le cas. » 
« Antisionisme= antisémitisme, estime quant à lui Jean-Marc Mimouni. Aujourd’hui, on ne peut pas dire « sale juif », puisque c’est punissable. On peut dire « sale sioniste », ce n’est pas encore punissable.

Pour la première fois, Lucie Simeoni, la mère du président de l’exécutif Gilles Simeoni s’exprime sur ces questions, fille d’un père catholique mais elle-même juive avec des racines en Alsace et en Pologne, elle a l’impression que les années 1930 reviennent.

« Ma mère et ma grand-mère avaient l’étoile sur elles donc nous nous sommes cachées pendant toute la guerre, raconte-t-elle. J’étais bébé, ce sont des choses qu’on n’oublie pas quand même. Moi je suis effondrée, désemparée, mais surtout très triste de voir que cette bête immonde de racisme qu’on a cru tuée, renaît. C’est consternant. »

Elle parle aussi d’Edmond Simeoni, le mari qu’elle vient de perdre : « C’était un homme extrêmement ouvert vous le savez, lorsque nous allions en Angleterre dans ma famille il mettait la kippa. Il aimait les autres avant tout, quels qu’ils soient. » Une ouverture aux autres que tout le monde ne partage pas, si on en juge par la recrudescence des actes antisémites en France.