Champion de natation à la vie brisée par la Seconde Guerre mondiale, Alfred Nakache (1915-1983) intégrera au mois de mai le Swimming Hall of Fame de Fort Lauderdale, aux Etats-Unis…
En engloutissant les JO de 1940 et 1944, au zénith de sa carrière, l’Histoire l’a sans doute privé de médaille olympique. Alfred Nakache (1915-1983) sera pourtant intronisé le week-end du 18-19 mai au Swimming Hall Of Fame de Fort Lauderdale, en Floride. Ce panthéon mondial de la natation s’apprête à accueillir le « nageur d’Auschwitz », rescapé des camps de la mort, dont sa femme Paule et leur petite Annie, deux ans, ne sont pas revenues.
Deuxième d’une fratrie juive de onze enfants, Alfred Nakache a vu le jour à Constantine, en Algérie. Il s’est éteint sur une plage des Pyrénées-Orientales, à Cerbère, des suites d’un malaise cardiaque survenu lors de son kilomètre de natation habituel. Entre ces deux bornes, près de 68 ans d’une vie exceptionnelle et tragique, dont la famille du nageur, sa nièce Yvette Benayoun-Nakache en tête, entretient le souvenir.
Un grand sportif rattrapé par l’Histoire
15 titres de champion de France, deux records du monde, trois d’Europe et neuf de France. Le puissant Alfred Nakache est un modèle de polyvalence : quatrième du relais 4×200 m nage libre aux Jeux olympiques de Berlin, en 1936, il participera douze ans plus tard, à Londres, au 200 m brasse papillon (deux disciplines alors jumelées) et… au tournoi de water-polo.
« Enfant, il n’aimait pourtant pas l’eau, assure Yvette Benayoun-Nakache, ancienne députée de la Haute-Garonne, de 1997 à 2002. C’est son père David qui un jour l’y a poussé. Il ne l’a plus quittée. » Parti de son Algérie natale en 1933, à 18 ans, Alfred rejoint Paris, son prestigieux lycée Janson-de-Sailly et le Racing Club de France. Il y devient professeur d’éducation physique, comme son épouse Paule.
Fin 1940, l’abrogation du décret Crémieux par le régime de Vichy le prive de sa nationalité française. Il fuit la capitale pour la zone libre.
#CeJourLa│Le 26 décembre 1943, Alfred Nakache, nageur olympique français, est transféré avec sa femme et sa fille à #Drancy. Ils sont déportés à #Auschwitz. Sa femme et sa fille sont gazées à leur arrivée. Lui seul survivra. Découvrez son histoire :https://t.co/XbofQlHSbE pic.twitter.com/1juCODTBTY
— YadVashemFr (@YadVashemFr) 26 décembre 2018
A Toulouse, Artem (son surnom) intègre les Dauphins du TOEC où il tissera des relations pour la vie, notamment avec son entraîneur Alban Minville et la famille du nageur Alex Jany. Le Constantinois se rapproche aussi des réseaux de résistance juifs, dont il entraîne les recrues, dans le gymnase qu’il gère avec sa femme. Dénoncée, la famille est arrêtée le 20 novembre 1943, déportée vers Drancy puis Auschwitz. A l’arrivée dans le camp d’extermination, Alfred y sera immédiatement séparé de Paule et d’Annie. Il ne les reverra plus.
L’horreur et la reconstruction
Avril 1945 : Alfred Nakache ne pèse plus qu’une quarantaine de kilos, la moitié de son poids normal, lorsqu’il est libéré de Buchenwald. Il avait rallié ce camp depuis Auschwitz au cours des marches de la mort organisées par les nazis devant la progression des Soviétiques. A son retour à Toulouse, il est recueilli par son frère Prosper, le père d’Yvette Benayoun-Nakache.
« Alfred se rendait à la gare Matabiau où arrivaient les convois des déportés, pour voir si sa femme et sa fille revenaient, raconte-t-elle. Jusqu’au jour où le responsable d’un convoi lui a tendu un billet, qui disait qu’elles avaient été gazées dès leur arrivée à Auschwitz. »
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— Swimbiz (@Swimbizitalia) 27 janvier 2019