Le New York Times accusé de faire la promotion d’un auteur antisémite

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Le prestigieux New York Times, aux États-Unis, essuie un feu nourri de critiques depuis la parution d’un entretien avec Alice Walker, l’auteure de La Couleur pourpre, dans lequel elle révèle lire en ce moment And the Truth Shall Set You Free de David Icke. Problème : cet auteur britannique est un complotiste patenté, fervent défenseur d’une théorie selon laquelle des reptiles gouvernent secrètement le monde… Il fait aussi partie des plus virulents négationnistes.

Le New York Times a publié les préférences de lecture d’Alice Walker, et on reproche à la rédaction de ne pas avoir signalé les théories et positions assez particulières adoptées par David Icke. « En permettant à Walker de le recommander aux lecteurs, vous leur avez fourni une tribune littéraire pour distiller la haine », se plaint un lecteur, choqué, au New York Times.

« Dans ce livre d’Icke, il y a toute l’existence, à la fois sur cette planète et sur plusieurs autres, et cela donne à réfléchir. Le rêve d’une drôle de personne devient réalité », expliquait Alice Walker en réponse à la question portant sur ses lectures du moment. Aucune précision ne vient évoquer les thèses de David Icke.

And the Truth Shall Set You Free, paru pour la première fois en 1996, porte sur l’histoire du XXe siècle et, surtout, sur la manière dont Icke l’interprète. Sociétés secrètes, complots mondiaux, manipulation des masses à travers les médicaments et les médias, tout y passe. Présenté comme un « chercheur », Icke y dénonce la toute-puissance financière, notamment incarnée par les groupes Rothschild et Rockfeller. C’est aussi dans ce livre qu’Icke remet en cause certains aspects de l’Holocauste.

« Le public mérite de savoir »

Pamela Paul, rédactrice en chef du supplément livre du Times, et ainsi responsable de l’entretien mené avec Alice Walker, a précisé que les questions avaient été envoyées par mail et les réponses publiées dans leur intégralité. « Les réponses des gens reflètent leurs opinions, leurs goûts et leur jugement. Comme dans toute interview, leurs mots nous disent quelque chose à leur sujet », explique-t-elle en assurant que les lecteurs des interrogés les regardent.

Paul précise également qu’aucun jugement n’est jamais porté sur les livres cités dans ce type d’entretiens et que la mention du livre d’Icke par Alice Walker est importante : « Si les gens adhèrent à des croyances ou théories que des personnes du Times jugent dangereuses ou immorales, il est important que les lecteurs soient informés de ces mêmes théories. Le public mérite de savoir. Cela constitue une information. »

David Icke a balayé les accusations d’antisémitisme à son encontre, face au scandale. Sur son site personnel, Alice Walker a aussi, de son côté, démenti les accusations d’antisémitisme portées à l’encontre de David Icke : « Je ne crois pas qu’il soit antisémite ou anti-Juif. Je pense qu’il est assez courageux pour poser les questions que d’autres craignent de poser, et pour exposer sa conception de la vérité, peu importe où cela le mène. À de nombreuses reprises, on a tenté de le censurer et de le faire taire. En tant que femme, en tant que Noire, en tant qu’auteure qui a souvent été critiquée et censurée, je défends son droit d’exprimer son opinion. »

Walker explique par ailleurs, dans le même texte, qu’elle soutient les opérations de boycott menées à l’encontre d’Israël, pour alerter sur le sort des Palestiniens. Il y a quelques années, elle avait ainsi banni l’idée d’une édition de La Couleur pourpre en hébreu. Puis, en 2013, elle avait fait une première mention d’un livre de David Icke, Human Race Get Off Your Knees, qui explique comment une race de lézards extra-terrestres contrôle l’humanité… 
Antoine Oury