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L’immense chanteuse britannique, morte ce jeudi 30 janvier à 78 ans, entrée au top 10 à 17 ans, a su revenir à plusieurs reprises sur le devant de la scène.
Marianne Faithfull, qui est morte jeudi à l’âge de 78 ans, avait eu deux voix, et les deux ont profondément influencé sa génération. La première, suave et caressante, est celle de As Tears Go By, celle de l’égérie du Swinging London des années 60, des Rolling Stones, de toutes les ados enfermées dans leurs chambres pleurant toutes les larmes de leurs corps. Cette voix l’a catapultée dans le Top 10 britannique, d’où rien ni personne n’a réussi à la déloger dans une époque pourtant remplie d’idoles concurrentes, avec trois tubes différents rien qu’en 1965. C’est avec cette voix-là aussi qu’elle a inspiré à Mick Jagger et Keith Richards les paroles de Wild Horses puis celles de l’hymne You Can’t Always Get What You Want. Excusez du peu. «Oui, ils ont utilisé mes paroles et m’ont spoliée, mais c’était pour la bonne cause», expliquera-t-elle plus tard.
Et puis il y a la seconde voix, le souffle rauque de Sister Morphine en 1979, un des come-back les plus inattendus de l’histoire du rock, avec ses ventes stratosphériques, sa nomination aux grammys et un procès contre les Rolling Stones pour faire reconnaître qu’elle en était vraiment la co-autrice. Il y a des limites à la spoliation, même chez les égéries. Les événements qui avaient brisé sa première voix s’y laissaient facilement deviner – la perte de la garde de son enfant, la séparation avec Mick Jagger, les attaques perverses des tabloïds, l’addiction à l’héroïne, la ruine, puis la période SDF dans les rues de Soho où des gens qui ne la reconnaissaient pas lui balançaient une pièce, ou lui offraient une tasse de thé. L’histoire de Marianne Faithfull est donc celle d’une rédemption, et ses apparitions – dernièrement à Paris où elle avait élu domicile et où elle a écrit, la nuit de l’attentat contre le Bataclan, la chanson hommage They Come At Night – étaient un rappel que même après avoir touché le fond, certains êtres peuvent rebondir. Swinging, à la vie à la mort.