Il a fait la gloire du groupe disco américain, mais a suscité également polémiques et procès… Avant d’être récupéré par Donald Trump et ses partisans.
Voir Donald Trump se dandiner sur YMCA ne manque pas de sel : à chaque meeting, le tube des Village People a retenti dans les salles et on l’entendra également lors des cérémonies pour l’investiture du président milliardaire. Une consécration inattendue – ou une humiliation aux yeux de certains – pour ce tube considéré comme l’hymne de la fierté gay, bien loin des militants conservateurs, souvent anti-LGBT +, qui soutiennent le candidat républicain…
Mais qu’importe : le tube fait bouger les salles, rappelle le début des années 1980, l’Amérique du disco insouciante et libérale, une bande-son nostalgique qui parle aux électeurs trumpistes…
À la fin des Seventies, les Village People enchaînent tube sur tube avec leur look sorti tout droit du carnaval : les musiciens sont déguisés en policier, indien, cow-boy, ouvrier du bâtiment… « L’idée était de créer un groupe avec tous les stéréotypes du mâle américain », a raconté le français Henri Belolo, qui a lancé cette joyeuse bande avec son associé Jacques Morali. À l’époque, la vague disco emporte tout, les deux Français cherchent une idée neuve et forte, pourquoi pas aller sur le terrain de la minorité gay, très active à l’époque mais sous-représentée dans le showbiz…
Les deux hommes se promènent un jour dans le quartier branché new-yorkais de Greenwich Village et tombent sur un Indien qui jouait sur des cloches dans la rue. « Intrigués, on l’a suivi dans un bar où il était serveur, a raconté Belolo, et il faisait un numéro de disco toutes les vingt minutes. Parmi les clients, était attablé un type avec un chapeau de cow-boy. Ce fut le déclic… »
« YMCA », le tube de l’ère disco
Les producteurs s’associent avec le chanteur Victor Willis et cherchent rapidement des choristes pour former un groupe atypique, qui joue sur les clichés masculins. Le premier album sort dès 1977 et fait mouche avec des hits comme « San Francisco (You’ve Got Me) ». Mais c’est un an plus tard avec « Macho Man » et surtout « YMCA » que le groupe imprime son style et remporte un énorme succès sur les ondes et à la télé : il est numéro un dans 16 pays et devient rapidement le tube phare et festif de l’ère disco, dépassant largement le cadre des minorités gays.
Le chanteur Victor Willis (le motard policier) s’est d’ailleurs toujours défendu d’avoir interprété un hymne ouvertement homo, même si ses producteurs étaient gays, ainsi que certains membres du groupe. Le titre fait référence à la Young Men’s Christian Association (YMCA), un mouvement de jeunesse protestant, exclusivement masculin, qui permettait aux jeunes d’avoir un toit et de se retrouver. Les producteurs vont détourner l’acronyme et ajouter des paroles à double sens : « C’est sympa de rester au YMCA/Ils ont tout pour que les jeunes hommes s’amusent/Tu peux habiter avec tous les garçons… »
« Il a souvent été dit que « YMCA » serait un hymne gay, mais c’est une fausse supposition », a soutenu encore récemment Victor Willis, coauteur de la chanson. « De fait, j’ai écrit « YMCA » au sujet de ce que je savais de ceux qui étaient localisés à San Francisco : des lieux pour nager, jouer au basket-ball, faire du sport, trouver de la nourriture et des chambres pas cher », ajoutant que l’idée d’un double sens était « totalement fausse ». Et même de menacer de poursuites tous ceux qui écriront l’inverse…
Les ventes de Village People relancées avec la campagne de Donald Trump
Après « YMCA », le groupe connaît encore deux gros succès avec « In the Navy » et « Go West », mais la mode disco commence à décliner, certains membres entament une carrière solo et un dernier album sort dans l’indifférence en 1985. Victor Willis va même jusqu’à faire un procès à ses producteurs pour récupérer ses droits d’auteur, estimant qu’il avait signé les contrats sans vraiment les lire… En 2015, après quatre ans de procédure, il obtient 50 % des droits sur plusieurs tubes, dont le fameux « YMCA », une vraie manne sachant que les chansons tournent toujours en boucle – Village People a écoulé 80 millions de disques au total.
Le groupe n’a jamais dételé : les shows ont continué, d’autres musiciens sont arrivés dans la formation, des membres sont partis ou sont morts, mais Victor Willis, 73 ans, est toujours bien là, il veille au grain et compte ses royalties. Il faut dire que la campagne électorale de Trump a relancé les ventes du fameux « YMCA », et même si le groupe était plutôt favorable à Kamala Harris, l’odeur des dollars a tout emporté…
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