Le réseau social X s’est-il rendu complice de cyberharcèlement ? L’agente de stars de téléréalité Magali Berdah reproche à l’entreprise américaine son inaction face aux messages haineux qu’elle a reçus. Une enquête a été ouverte.
Vivre des réseaux sociaux n’empêche pas de les attaquer. La «reine de l’influence» controversée, Magali Berdah, a ainsi déposé plainte contre la plateforme X (ex-Twitter) pour «complicité de harcèlement moral aggravé». Et un juge d’instruction enquête sur le dossier depuis le mois de juillet, a confirmé le parquet de Paris à Capital ce mercredi 4 décembre. La célèbre agente de stars de téléréalité s’était retournée contre l’entreprise américaine en novembre 2023, en marge de sa bataille judiciaire contre le rappeur Booba, lui-même mis en examen pour harcèlement moral aggravé à l’encontre de la fondatrice de Shauna Events.
Avec cette plainte, les avocats de Magali Berdah espèrent «rétablir l’état de droit au far west numérique en contraignant les plateformes à enfin modérer les contenus illicites qui leur sont signalés». «C’est, à notre connaissance, la première fois que la plateforme X est mise en cause de la sorte dans le monde», indiquent les défenseurs de la femme d’affaires. En mars 2024, Magali Berdah avait déjà obtenu un jugement d’une ampleur inédite, avec la condamnation de 28 personnes pour cyberharcèlement.
Que risque le réseau social X face à la plainte de Magali Berdah ?
Depuis son rachat par Elon Muska en 2022, le réseau social est régulièrement interpellé pour ses manquements en matière de modération. Cette nouvelle procédure va-t-elle aboutir ? En octobre 2023, une première plainte de Magali Berdah contre le réseau social avait été classée sans suite «au motif qu’aucune infraction n’était suffisamment caractérisée», retrace le Parquet de Paris. Quant à l’information judiciaire ouverte depuis juillet 2024, c’est la suite logique de la deuxième plainte déposée par l’entrepreneuse. «Les refus d’informer sont très rares. Dans 99% des cas, il y a l’ouverture d’une instruction. C’est le traitement normal d’une plainte», explique à Capital une source judiciaire.
Le harcèlement moral aggravé peut être puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende dans certaines circonstances. Une somme qui peut paraître faible quand on la compare aux revenus de X : selon l’agence Bloomberg, le réseau social pourrait générer 2,9 milliards de dollars de recettes en 2024. Mais pour Magali Berdah, la procédure pourrait tout de même «changer la donne en responsabilisant enfin les plateformes face aux comportements gravissimes sur les réseaux».
Magali Berdah prend régulièrement la parole sur la modération des réseaux sociaux. En 2022, Booba avait déclenché un débat houleux sur les pratiques des influenceurs en portant plainte contre Shauna Events pour «pratiques commerciales trompeuses» (classée sans suite). Visée par les attaques du rappeur, Magali Berdah avait subi une violente campagne de cyberharcèlement, qui a aggravé les difficultés financières de son agence. Menaces de mort, insultes antisémites, tentatives de chantage, adresse personnelle dévoilée… Victime d’un déferlement de haine sur les réseaux sociaux, la femme d’affaires reproche désormais à Twitter son «inaction».
Selon une source proche du dossier, les avocats de la femme d’affaires ont multiplié les courriers pour demander, en vain, la suspension du compte de Booba qui fédère 6,4 millions d’abonnés sur le réseau social X. Sur Instagram, son compte est lui toujours suspendu. «Je ne suis responsable d’aucun message antisémite ou autre forme de haine», avait rétorqué le rappeur. Et tant que l’artiste n’a pas été condamné pour harcèlement, «une condamnation de Twitter (pour complicité de harcèlement moral aggravé, ndlr) me paraît très compliquée», analyse notre source judiciaire.
Par Simon Chodorge