Le collectif féministe de lutte contre l’antisémitisme Nous vivrons a pu manifester sans heurts, samedi 23 novembre, à Paris, protégé par un dispositif de sécurité.
Les féministes juives et alliées du collectif Nous vivrons gardent un souvenir amer des précédentes manifestations féministes parisiennes auxquelles elles ont pu participer. Heurts, provocations, intimidations, insultes, menaces, les militantes qui luttent contre l’antisémitisme redoutaient de revivre ces moments lors de la manifestation du 23 novembre à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Ils étaient d’ailleurs plus de 400 collectifs, associations et personnalités qui ont appelé à manifester ce jour dans toute la France afin de réclamer « un véritable sursaut » féministe, notamment dans le cadre du procès des viols de Mazan.
Samedi 23 novembre, les membres du collectif Nous vivrons ont été protégées par les forces de l’ordre durant toute la manifestation. Le Point a interviewé la présidente du collectif, Sarah Aizenman, qui a coorganisé la tenue du cortège féministe de lutte contre l’antisémitisme.
Le Point : Comment s’est déroulée la manifestation, samedi ?
Sarah Aizenman : Nous avions la chance d’être extrêmement protégées par les forces de l’ordre. La préfecture nous a contactées cette semaine en nous informant que des messages circulant sur des boucles Telegram militantes appelaient à nous violenter. Nous avons retrouvé les forces de l’ordre à dix minutes à pied du reste du cortège que l’on a fini par rejoindre. Mais nous étions toujours environ à 150 mètres en permanence de la manifestation, même si nous avons insisté pour que les juifs et leurs alliés ne défilent pas en marge. On est très reconnaissants face à ce dispositif de sécurité, mais cela pose une vraie question sur les dangers que nous risquons à manifester.
Aviez-vous annoncé votre venue publiquement et auprès des collectifs ?
Bien sûr ! Nous nous étions annoncées auprès du collectif Nous toutes afin de leur proposer de nous organiser sur la logistique. Elles nous ont répondu qu’elles ne souhaitaient pas nous avoir à leurs côtés puisqu’elles se reconnaissent comme antiracistes et décoloniales. Est-ce que cela voudrait dire que nous sommes racistes alors que nous sommes issues de mouvements antiracistes universalistes ? Elles nous ont aussi dit avoir été victimes de cyberharcèlement par notre faute, ce que nous réfutons totalement. Nous vivrons condamne toute forme de harcèlement. Nous répondons d’un féminisme universaliste, avec une convergence dans la lutte contre l’antisémitisme.
Pourquoi avoir tenu à manifester, malgré les incidents lors des précédentes manifestations ?
Nous venions dénoncer aujourd’hui l’usage des violences sexistes et sexuelles comme arme contre les femmes juives. Les violences sexuelles qui ont été perpétrées lors du Festival Nova le 7 octobre 2023, à Gaza sur les femmes otages jusqu’à Courbevoie sur une enfant de 12 ans ont visé des femmes en raison de leur judéité. Nous étions là pour dénoncer l’invisibilisation et la silenciation des femmes juives en France et à travers le monde.
Avez-vous été intimidées lors de la manifestation ?
Nous avons été filmées tout le long… Il y avait un mur de gens en keffieh qui essayaient de nous provoquer tout en chantant leur fameux slogan « sionistes fascistes, c’est vous les terroristes » mais les forces de l’ordre les ont éloignés à chaque fois. La bonne nouvelle, c’est que nous étions 500, l’un des plus gros cortèges de la manif ! C’est positif et nous ne devons rien lâcher, nos militantes y croient, elles se battent pour la République et contre l’antisémitisme. La mauvaise nouvelle est que les agitateurs étaient là, à manifester devant les politiques… Nous avons d’ailleurs reçu des visites de deux d’entre elles : Lamia El Aaraje [première secrétaire du Parti socialiste, NDLR] qui est venue nous soutenir publiquement et Raphaëlle Rémy-Leleu [conseillère de Paris et membre des Écologistes, NDLR] qui est elle aussi venue nous voir.
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