En Israël, le 7-Octobre comme phénomène d’édition

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Dans certaines librairies israéliennes, il y a désormais un rayon « 7-Octobre » : entre premier anniversaire des massacres du Hamas et rentrée littéraire, les témoignages de l’horreur se multiplient et de nombreux livres sont encore attendus.

Il fallait, explique à l’AFP le dessinateur et auteur de bande dessinée israélo-belge Michel Kichka, membre du réseau mondial Cartooning for Peace, apporter « une pierre à l’édifice qui racontera cette journée pour l’Histoire ».

Cette journée, c’est le premier samedi d’octobre 2023, quand, en pleine fête juive de Simchat Torah (« Joie de la Torah »), les commandos du Hamas ont fait exploser la barrière de séparation enserrant Gaza et sont entrés en Israël.

Leur attaque a entraîné la mort de 1.205 personnes côté israélien et s’est soldée par l’enlèvement de 251 autres sur des bases militaires, dans des kibboutz ou encore à Nova, un festival de musique électro.

M. Kichka a participé à la bande dessinée en français « Au cœur du 7 octobre » avec 11 auteurs israéliens à l’initiative d’Uri Fink, auteur en 2008 de « Israël-Palestine entre guerre et paix ». En racontant des actes héroïques de civils, ce livre veut « parler de la solidarité de la société civile israélienne », dit M. Kichka, déjà auteur d’un album sur la Shoah, « Deuxième génération », et qui espère voir le nouvel ouvrage bientôt adapté en hébreu pour le public israélien.

« Sublimer les émotions »

Parmi la cinquantaine de livres en hébreu sur le 7-Octobre recensés par l’AFP, plusieurs s’attardent sur ces civils « solidaires » alors que les forces israéliennes tardaient à intervenir.

Pour le libraire Shabtaï Cordova, lui-même auteur mais qui se dit incapable d’écrire sur le 7-Octobre, ce sont ces témoignages qui se vendent le mieux. « Ils font sentir aux lecteurs qu’ils font partie de cette histoire », dit-il à l’AFP. « C’est la part culturelle de la guerre, le besoin de changer la réalité par le pouvoir des mots face à la barbarie ».

Ecrire, abonde la sociologue franco-israélienne Eva Illouz, « permet de clarifier la réalité et de sublimer des émotions difficiles à porter ». Dans « Le 8 octobre : généalogie intellectuelle d’une haine vertueuse », elle raconte notamment sa « colère » contre la gauche qui, à l’étranger, n’a pas, dit-elle, soutenu Israël.

« Testimonies without Boundaries » (« Témoignages sans frontières », non traduit en français), d’Alon Penzel, ancien porte-parole au ministère de la Défense, renferme derrière sa couverture choc –un ours en peluche couvert de sang– des récits crus de secouristes, médecins et témoins.

L’ancien chef du parti de gauche Meretz et journaliste Nitzan Horowitz écrit avec son confrère français Hervé Deguine « Les assiégés ». Paru simultanément en hébreu et en français, le livre retrace, minute par minute, la journée d’un groupe de 27 jeunes au festival de musique Nova.

Parmi eux, 16 sont tués et quatre emmenés captifs à Gaza, dont Hersh Goldberg-Polin, Israélo-américain dont la dépouille, récupérée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, a été inhumée le 2 septembre à Jérusalem. Selon l’armée, lui et cinq autres otages ont été assassinés par leurs geôliers fin août dans un tunnel.

Chaïm Peri, lui aussi, a été enlevé. Il est mort en captivité à Gaza mais il prévoyait pour ses 80 ans d’éditer un livre de poésie adressé à sa petite-fille, et dans lequel il l’emmène voir la Lune. Sa famille attendait son retour pour le publier. « Yarena » est finalement disponible depuis que l’armée a rendu public son décès, il y a deux mois.

Récits personnels

Le photojournaliste Ziv Koren publie dans « 7 octobre » des centaines de clichés pris dans des kibboutz, à Nova, dans les hôpitaux et d’autres dans la bande de Gaza avec des soldats israéliens.

La campagne militaire israélienne de représailles à l’attaque du Hamas a fait plus de 41.000 morts dans le petit territoire palestinien, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza. Un aspect de la guerre absent des récits sur le 7 octobre en Israël.

Le livre le plus vendu sur le sujet, selon M. Cordova, est « Un jour en octobre », qui compile 40 monologues de témoins de cette journée tragique.

Mais on trouve aussi en rayons un livre pour enfants, un roman de politique-fiction, un recueil de poésies, le témoignage d’un soldat qui a servi dans Gaza, des essais mais essentiellement des récits de survivants, témoins des massacres dans les kibboutz et à Nova.

D’autres Israéliens, journalistes où rescapés, ont publié en français et en anglais, notamment les deux journalistes du quotidien de gauche Haaretz, Lee Yaron et Amir Tibon, qui publient en français (traduit de l’anglais) « 7 octobre » et « Les portes de Gaza » – où le second raconte comment sa femme et ses deux filles ont survécu à l’assaut du Hamas sur le kibboutz Nahal Oz.

Source lorientlejour