Gérard Araud nous parle de sa vie en Israël, de sa découverte du judaïsme et de son lien avec le pays, sa culture et ses paysages. Déçu par le tournant vers l’extrême droite et l’hégémonie de Netanyahou, Gérard Araud se montre cependant confiant dans la possibilité d’un changement.
Dans quelles conditions avez-vous découvert Israël ?
Gérard Araud – Je suis arrivé en Israël en 1982 pour mon premier poste diplomatique, un peu par hasard. Marseillais d’origine, seule Tel Aviv, ville méditerranéenne, me semblait attirante parmi les destinations que me proposait la direction du personnel du Quai d’Orsay.
En juillet 1982, avec mes lourdes valises, j’atterris donc dans le vieil aéroport Ben Gourion, où grouille une marée humaine de chaos, une sorte de pandémonium méditerranéen dans lequel tout le monde crie. La chaleur était écrasante.
Le pays que vous découvrez alors est-il conforme à l’image que vous vous en faisiez ?
Rétrospectivement, je dirais qu’avant d’y vivre, ni Israël ni le judaïsme n’occupaient une place significative dans mon imaginaire. J’avais fait mes études au sein de l’école républicaine où, alors, les revendications identitaires n’existaient pas. Au lycée, il y avait évidemment des Juifs dans ma classe — qui plus est à Marseille après l’indépendance algérienne — mais personne ne parlait de religion.
Aujourd’hui, cela peut sembler incroyable mais ce n’est qu’une fois en Israël, en repensant aux noms de certains de mes anciens camarades de classe, que je me suis dit qu’un tel ou un tel devait être juif. Dans ma famille catholique, je n’avais jamais entendu de préjugé ni favorable ni défavorable à l’encontre des Juifs. Pour moi, en caricaturant à peine, les Juifs étaient semblables aux chrétiens, mais ils avaient raté le Messie, comme on rate un train. Soyons francs, je suis allé en Israël pour la plage et le soleil, avant que le pays ne me rattrape.
Quels sont les points communs entre la Méditerranée française de votre enfance marseillaise et la Méditerranée israélienne que vous découvrez alors ?
La plage, le soleil et la chaleur humaine sont présents de part et d’autre. Parmi mes nombreuses plaisanteries d’ambassadeur, je dis qu’il y a trois Europes : l’Europe de la tomate, l’Europe de la pomme de terre et l’Europe du chou. Je suis issu de la première, je peux vivre dans la seconde mais je refuse la troisième ! Je me sens profondément méditerranéen par amour des paysages, de la lumière et d‘une certaine manière de vivre.
Pourtant, en 1982, Israël est gouverné par des Polonais installés au bord de la Méditerranée. Tous les Premiers ministres israéliens, jusqu’à Menahem Begin1, sont nés dans l’Empire russe. Israël était encore très ashkénaze et la nourriture n’avait rien de méditerranéen. D’ailleurs la ville de Tel Aviv, était à l’époque construite dos à la mer — le centre-ville et toute la ville étaient orientés vers l’intérieur des terres. Lorsqu’on regarde les photos de l’évolution de la ville depuis sa fondation en 1908, on voit que ce n’était pas à l’origine une ville méditerranéenne — même si évidemment, elle l’est devenue peu à peu.
Par l’omniprésence de l’architecture Bauhaus, dont témoigne d’ailleurs la résidence de l’Ambassadeur de France en Israël où vous résiderez plus tard, Tel Aviv présente en effet des accents plus mitteleuropéens que méditerranéens.
La résidence de l’Ambassadeur de France, à Jaffa, est une maison Bauhaus construite pour un grand marchand arabe par un architecte juif. Il s’agit d’un édifice luxueux avec des bois précieux, des rampes de fer forgé et des pièces grandioses. C’est un très beau bâtiment dominant la mer. Mais la plupart de ce que l’on considère aujourd’hui comme des merveilles du Bauhaus à Tel Aviv étaient dans les années 1980 de petits appartements miteux, mal entretenus et, cerise sur le gâteau, plus chauffés car, depuis 1973, avec l’augmentation du prix du pétrole, les Israéliens n’avaient pas les moyens de faire fonctionner les chaudières. La découverte de leur patrimoine Bauhaus par les Israéliens a été tardive et ce quartier que j’ai connu pauvre dans les années 1980 est devenu dans les années 2000 le quartier chic, jeune et à la mode. Ces petits immeubles où tout était parfait du point de vue des proportions et où aucun espace n’était perdu ont été parfaitement rénovés. Mais de nouveau, on retombe, je dirais, dans l’Israël ashkénaze. C’est l’Israël qui a été construit dans les années 1920 et 1930.
Quel était l’état d’esprit des Israéliens en ce début des années 1980 ?
Quand j’arrive en Israël en 1982, les Israéliens payaient 200 % de droits de douane sur les voitures. Les alcools étaient littéralement hors de prix. L’hiver était plutôt rude avec des appartements non chauffés et la ville offrait peu de distractions. Mais la richesse humaine y était incroyable J’étais invité dans ces appartements dans lesquels, jusqu’à 2h du matin, on refaisait le monde tout en buvant un mauvais café au lait et des biscuits secs. J’en ressortais en me disant parfois que j’aurais bien aimé passer des soirées plus amusantes mais j’acceptais les invitations avec joie. Je me souviens avoir demandé à un ami où se trouvaient ses grands-parents, et lui de me répondre qu’ils avaient disparu à tout jamais en Ukraine en 1942. Je me souviens d’un serveur qui, en posant mon plat sur ma table, révèle le matricule tatoué sur son poignet et me tombe dans les bras en disant que ce sont les Français qui l’ont libéré de son camp.
On ne peut pas comprendre Israël sans connaître l’histoire du peuple juif sur laquelle pèsent des siècles de persécutions dont la Shoah est l’atroce aboutissement. Prendre conscience qu’au centre de l’Europe, dans le pays le plus développé, le plus cultivé, à la pointe de tous les progrès, on a décidé de tuer industriellement 5 millions d’êtres humains, prendre conscience de ce mystère insondable ne peut vous laisser intact — à moins d’être idiot. Cette prise de conscience m’a permis de mieux comprendre Israël, mais aussi la condition humaine. J’en suis sorti changé à jamais, lavé de tout optimisme et convaincu que le Mal est en l’Homme. La Shoah par son caractère radical, irrationnel et inexplicable revêt donc pour moi une signification métaphysique. Non seulement, elle nous impose des devoirs à l’égard du peuple juif mais elle nous alerte sur ce qui est en nous et peut à tout moment s’exprimer, le Mal.
Compte-tenu de cette histoire singulière, diriez-vous que, par rapport à d’autres pays où vous avez pu être en poste, Israël est celui où l’on se sent le plus étranger, malgré la familiarité des paysages méditerranéens ?
Je m’y sentais en effet étranger. J’avais reçu une éducation très catholique. J’ai donc découvert le judaïsme comme une autre approche de Dieu. Pour les chrétiens, il existe une opposition entre l’esprit et la lettre des textes sacrés, tandis que dans le judaïsme c’est l’esprit par la lettre. En tant que chrétien, les interdits et règles de vie me semblaient absurdes. Ne pas prendre l’ascenseur pendant le shabbat ou attacher de l’importance à l’origine de la viande que l’on mangeait, me paraissait quasiment primitif. Puis je me suis demandé pourquoi des personnes dont je connaissais et respectais l’intelligence s’y conformaient. Cette première interrogation déstabilise votre approche de la religion, que l’on soit croyant ou pas, et fait déjà de vous un étranger. Anecdotiquement, un 25 décembre, tandis que la ville vivait tout à fait normalement, j’ai fait part à un ami de mon étonnement, « depuis 2000 ans, les jours de fête, tout le monde autour de nous a toujours vécu normalement » m’a-t-il répondu.
On se sent étranger ensuite parce qu’on n’a pas été victime, évidemment, de cette tragédie qui pèse comme un nuage noir sur l’État d’Israël, sur les Israéliens et sur les Juifs du monde. Pourtant nous sommes obligés d’en assumer une part de responsabilité dans la mesure où la Shoah a été faite dans l’indifférence et souvent avec la complicité du reste de l’Europe occidentale. Nous avons assisté à l’une des pires tragédies de l’histoire sous nos yeux et nous n’avons rien fait. Ce sentiment très fort pesait sur mes épaules en Israël.
Enfin, Israël est un pays de passion qui vit toujours dans le sentiment que son existence est en jeu, un pays un peu paranoïaque. On vous demande de prendre parti en permanence. J’essayais toujours de manifester mon empathie, mais pas ma sympathie. Je me faisais bousculer de temps en temps par mes amis israéliens pour cela. Je me rappelle que ma mère, me rendant visite et recevant pour la première fois, une porte dans le visage avait dit « ils ne sont pas très bien élevés ». C’est vrai que les Israéliens sont parfois un peu rudes.
En Israël, on est aussi confronté à l’extrême hétérogénéité du judaïsme. Entre un quartier ultra-orthodoxe de Jérusalem et une plage d’Eilat, ce sont deux mondes totalement différents auxquels on est confronté ?
Israël est le pays des paradoxes. Il échappe parfois à notre logique. En réalité, je crois que c’est le pays le plus agnostique au monde. Quand j’organisais des dîners à la résidence, de temps en temps, je demandais : « qu’est-ce que les Juifs ? Est-ce que c’est un peuple ou est-ce que c’est une religion ? » Mes hôtes de droite hurlaient « une religion », ceux de gauche « un peuple ». Disons : un peuple défini par une religion. Je me rappelle qu’un de mes amis, qui adorait venir en France pour acheter de la charcuterie, me disait que si tous les Juifs avaient été comme lui au cours de l’histoire, il n’y aurait plus de Juifs ! Ainsi se noue le paradoxe structurel de l’identité juive. Les Juifs libéraux, les Israéliens libéraux ont une relation paradoxale avec les ultra-religieux qui sont médiévaux dans leur comportement, ne paient pas d’impôts et ne font pas leur service militaire. D’un certain point de vue, ils les détestent, les méprisent, mais de l’autre, ils se disent de temps à autre : « Mon arrière-grand-père était comme eux, mon grand-père était comme eux. Ils sont juifs et pourraient être persécutés pour cela ». Au-delà des tensions intenses et des engueulades permanentes, les habitants de ce pays sont unis par leur identité juive et par la crainte d’un monde antisémite.
Comment avez-vous vu évoluer Israël entre votre premier séjour, dans les années 1980, et votre retour dans les années 2000 ?
L’Israël du passé auquel se réfèrent beaucoup d’intellectuels français d’un certain âge — très largement ashkénaze et de gauche — n’est plus là. Dans les années 1980, près de 80 % de l’économie appartenait à l’Etat et aux syndicats — en tout cas trois banques sur quatre. Le pays était pauvre et tout le monde devait faire trois ans de service militaire et la guerre. Et il m’est arrivé, jeune diplomate, d’aller prendre un café chez un ministre qui avait simplement un trois pièces-cuisine. Les restaurants étaient rares et hors de prix.
Vingt ans plus tard, quand je suis revenu en Israël, le pays avait profondément changé. Politiquement d’abord. En 1977, la droite gagne les élections avec pour Premier ministre Menahem Begin — en tirant parti du choc de la guerre de 1973. La droite est ensuite restée au pouvoir de manière quasiment continue — avec quelques intermittences. L’économie a été privatisée, ce qui a entraîné à la fois un enrichissement du pays, mais également l’apparition des inégalités. Les ashkénazes ont perdu le pouvoir — d’un point de vue politique — au profit des séfarades venus du Maroc, de Tunisie ou d’Égypte après 1948 et 1956 — qu’ils avaient méprisés et très mal accueillis. Puis, sont arrivés les juifs d’URSS. Plus d’un million d’entre eux ont immigré en Israël à partir de la fin des années 1980 et surtout après 1990-1991. Or même s’ils sont ashkénazes, ce ne sont pas en majorité des libéraux progressistes. Ils sont venus en amenant avec eux tous leurs préjugés. Un journaliste du Haaretz me racontait un jour sa période de réserve militaire en Cisjordanie au côté d’un nouvel immigrant russe qui, voyant les Palestiniens lui dit : « qu’est-ce qu’ils viennent faire ici les Tchétchènes ? » Il a fallu à la fois le convaincre qu’ils étaient chez eux, que ce n’étaient pas des Tchétchènes et que surtout il ne fallait pas les traiter comme tels.
L’arrivée de ces populations a participé au retour de la religion sur le devant de la scène et d’un judaïsme israélien qui s’est défini par rapport au judaïsme diasporique — une liaison dangereuse entre la religion et la terre s’est constituée. La terre de la Bible est la Cisjordanie — pas les plages de Jaffa ou de Tel Aviv. Des jeunes colons français, que j’ai pu rencontrer en Cisjordanie, me disaient, en tapant du pied : ‘’Dieu nous a donné cette terre’’ — comme si l’Ancien Testament était un acte notarié signé entre Dieu, Abraham et ses enfants. Le sionisme laïque social-démocrate s’est étiolé, a perdu tout élan, s’est vidé de son sens et de son attraction, laissant la place à un nationalisme messianique qui considère qu’Israël est en marche vers la venue du Messie et qu’il faut tout faire pour l’accélérer, y compris, pour certains, en faisant sauter le dôme du rocher qui se trouve sur le site du Temple d’Hérode.
L’évolution a donc été paradoxale. D’un côté, le pays est devenu plus riche et confortable. La vie y est plus agréable que dans les années 1980. Tel Aviv est devenue une des capitales de la nuit avec ses restaurants, ses plages, ses bars et ses boîtes de nuit. Simultanément, Israël subit aussi un durcissement nationaliste et religieux réduisant l’espoir de trouver une solution au conflit avec les Palestiniens.
Vous nous avez surtout parlé de Tel Aviv. Fréquentiez-vous aussi Jérusalem ?
Jérusalem n’est qu’à soixante kilomètres de Tel Aviv. Avec l’autoroute, vous y êtes en moins d’une heure. Un certain nombre d’israéliens vivent d’ailleurs à Tel Aviv et travaillent à Jérusalem — rarement l’inverse. Pour ce qui me concerne, Jérusalem est le concentré de tout ce que je n’apprécie pas. La ville est faite d’une pierre à la couleur très intense et à la lumière dure. Aux portes du désert, elle a un climat torride la journée et glacial la nuit. La lumière y est éblouissante, dans tous les sens du terme.
Oui, la ville est magnifique et fascinante mais la raison profonde de mes réticences réside dans la tension religieuse qu’elle porte en elle : trois religions s’y détestent cordialement et y montrent le pire d’elles-mêmes. Les chrétiens se haïssent tout d’abord entre eux. Ils ne peuvent pas se côtoyer. lls se sont partagés le Saint-Sépulcre au centimètre près : les Orthodoxes ont la nef, les Catholiques une chapelle, les Arméniens une autre, les Coptes égyptiens également et les Coptes éthiopiens, n’étant pas acceptés, se sont installés sur le toit. Tous les rites sont accomplis sur la base de ce qu’on appelle le statu quo. À la minute et au centimètre près, chacun sait ce qu’il doit faire, et si quelqu’un dépasse son temps alloué de cinq minutes, on se bat à coup de crucifix. Il est difficile d’y retrouver le message du Christ. Il n’y a rien de moins évangélique que le Saint-Sépulcre.
Ensuite, vous avez les musulmans qui sont retranchés sur le dôme du rocher et l’esplanade des mosquées. Il faut se rendre compte de l’aporie dans laquelle nous sommes. L’esplanade des mosquées ou du Temple — il faut dire les deux — est l’endroit où a été construit le temple dit de Salomon puis le temple d’Hérode le Grand. Ce temple, détruit par Titus, est devenu un espace laissé à l’abandon. Il y a eu une église, puis les Musulmans, lorsqu’ils sont arrivés, y ont construit le Dôme du Rocher et la mosquée Al-Aqsa. Aucune fouille archéologique n’y a été faite. C’est tout à fait étonnant puisque sous le Dôme du Rocher et sous l’esplanade se trouvent les restes du Temple d’Hérode. Imaginez alors la tentation des Juifs messianiques qui sont convaincus que reconstruire le Temple fera revenir le Messie. Le mur des lamentations (Kotel) se trouve juste en contrebas de l’esplanade. Il est le seul reste visible du temps d’Hérode Le Grand. Les musulmans, se trouvant à quelques mètres au-dessus du mur, ont naturellement peur de voir les Juifs les chasser. Cela se traduit par des incidents permanents. Et les juifs religieux crachent sur les pèlerins chrétiens tandis que les colons tentent de chasser les familles palestiniennes les unes après les autres.
Cela étant, Jérusalem, ce sont aussi des rencontres formidables naturellement. L’école biblique de Jérusalem est un endroit étonnant avec des Dominicains fondamentalement nostalgiques de l’Empire ottoman qui leur permettait de voyager librement à travers la région, ce qui ne les rend pas pro-israéliens. Ils détiennent des centaines de photos datant d’avant 1914 où on les voit, avec leurs soutanes remontées, conduire des recherches archéologiques. Jérusalem, ce sont aussi des religieux, des prêtres, des intellectuels juifs et trois patriarcats, orthodoxe, catholique et arménien.
C’est également à proximité de Jérusalem que se trouve un lieu qui vous est cher : Abou Gosh.
Abou Gosh se situe à 15 km avant Jérusalem sur la route de Tel Aviv. C’est un village arabe dans l’État d’Israël, qui n’est pas un territoire occupé. Dans son Itinéraire de Paris à Jérusalem, Chateaubriand en parle comme d’une personne. C’est maintenant un village, avec une église croisée construite sur une source près de laquelle on a retrouvé des traces d’une légion romaine. Lorsqu’on a récemment nettoyé l’église, sous de la chaux, on a retrouvé des fresques croisées qui avaient été tamponnés par les musulmans. Cette église a été donnée en 1873 par le sultan à la République française, qui n’étant laïque que dans ses frontières continentales, l’a confiée aux bénédictins. En découle un endroit merveilleux occupé par des bénédictins, hommes et femmes, où flotte le drapeau tricolore. Aujourd’hui, c’est un lieu de rencontre pour les francophones, qu’ils soient croyants ou non. Les pères et les sœurs sont accueillants et lorsque vous êtes en poste dans ce pays toujours intense, il est agréable d’aller de temps en temps écouter les offices, qui sont magnifiques, puis d’aller déjeuner avec les pères qui vivent très loin de toute l’agitation.
Nous avons surtout parlé de villes. Quels sont les autres lieux israéliens qui vous ravissent ?
Israël est un tout petit pays : environ deux ou trois départements français. Donc vous pouvez le traverser très facilement. Au sud, il y a le désert du Negev avec des paysages magnifiques, pierreux, presque pétrifiés, des restes de volcans, notamment à Mitzpe Ramon, un immense cratère volcanique. Au nord, à l’ancienne frontière syrienne, vous avez le lac de Tibériade, surplombé par la colline où le Christ est supposé avoir dit les Béatitudes. La région est remplie de sites archéologiques romains, juifs et chrétiens. Vous y trouvez même des châteaux croisés, dont certains aux noms très français. La France a d’ailleurs lancé une coopération avec les Israéliens pour leur restauration. Ce sont des modèles d’architecture militaire, construits ex- nihilo pour être des forteresses imprenables. Et puis vous arrivez en faisant le tour à travers la Galilée à Saint-Jean-d’Acre, une ville médiévale entourée de fortifications. Dernière ville croisée à tomber, en 1291, elle est en mauvais état et est peuplée quasiment uniquement d’Arabes, alors que la ville moderne, Akko, est une ville juive. D’un côté on se dit qu’il faudrait évidemment la restaurer, mais je crains qu’elle ne devienne alors un piège à touristes sans grande âme.
Représentant de la République laïque, l’ambassadeur de France n’en a pas moins d’importantes prérogatives religieuses.
En tant que représentant de la République française, j’étais le protecteur des catholiques de Terre sainte en vertu des capitulations conclues par François 1er avec Soliman Le Magnifique en 1541 et qui ont été renouvelées par l’accord de Mytilène de 1901 et de Constantinople de 1913. La France n’a reconnu l’État d’Israël en 1949 que moyennant la reconnaissance de ces capitulations. Nous avons une liste d’institutions catholiques qui sont protégées par la République française et ne devraient donc pas payer d’impôts à l’État israélien. Inutile de vous dire que pour les Israéliens, tout cela n’a plus de sens. Je m’essayais de temps en temps à invoquer l’accord de Mytilène. Les frères des écoles chrétiennes de Jaffa m’ont ainsi demandé de les aider à échapper aux impôts municipaux trop lourds pour leurs moyens. Comme j’aime bien les causes perdues, j’ai pris ma canne et mon chapeau et je suis allé voir le maire de Tel Aviv. C’est un pilote de F-15 qui m’a dit : « mais de quoi tu t’occupes – puisqu’on tutoie en hébreu — , c’est chez moi, et tu n’es pas chez toi ». Je lui ai ensuite expliqué — en oubliant Mytilène et Constantinople — que les Frères, s’ils payaient l’impôt, devraient fermer, que c’était le quartier arabe, pauvre, etc. Et à la fin il m’a dit « allez d’accord, ils ne paieront pas d’impôts ».
Avez-vous assisté ou participé à des pèlerinages ?
Il y a naturellement des pèlerinages, mais l’essentiel des palerins sont soit des latino-américains, soit des africains. Se retrouver face à cinq ou six cents pèlerins nigérians quasiment en transe devant le Saint-Sépulcre, est une expérience surprenante pour quelqu’un comme moi qui suis le fruit de quelques siècles de gallicanisme, de rationalisme et de jansénisme. C’est une autre forme de christianisme. Et en plus, en ce qui concerne le christianisme africain, c’est un christianisme anti-musulman, donc pro-israélien.
Vous avez vécu en Israël durant des périodes de fortes tensions, avec notamment une importante menace terroriste. Comment vit-on au quotidien dans une telle atmosphère ?
D’abord, et c’est souvent incompris, Israël vit en guerre depuis sa fondation. Et par fondation, j’entends même durant sa gestation. Les Israéliens ont fait face à des troubles au sein du mandat britannique de Palestine depuis 1920, notamment le grand pogrom de 1929 à Hébron, où 60 juifs ont été massacrés. Avant même la Seconde Guerre mondiale, les sionistes avaient créé des milices pour pouvoir se défendre, voire même attaquer. Cette ambiance n’est donc pas nouvelle et relève presque du registre de l’habitude. Évidemment ; pour nous Français qui avons vécu 77 ans de paix, cela paraît étrange. Le service militaire signifie ainsi de vrais risques pour les conscrits.
Dans les années 1980, le pays entier était derrière son armée. Avec le temps et l’enrichissement, vous avez quand même maintenant des jeunes qui essayent d’y échapper ou de se faire pistonner. Quand j’allais visiter le ministère de la Défense, qui se trouve à Tel Aviv et pas à Jérusalem, il était évident qu’il y avait des dizaines de bidasses qui n’avaient pas grand-chose à y faire.
En ce qui concerne la campagne terroriste qui a commencé en 2001 et qui a duré 3-4 ans, j’en ai vécu la fin, et j’en étais assez inconscient. Il valait mieux que je le sois car la République française ne m’accordait aucune protection, j’étais le seul ambassadeur européen à ne pas avoir de voiture blindée, ni de garde. Je vivais donc normalement.
Lorsqu’il y avait un attentat, d’un seul coup, vous entendiez les sirènes des ambulances et toutes les lignes téléphoniques étaient saturées. Certes, il y a certains moments où on questionne ses habitudes, on se demande si on doit se rendre à tel ou tel endroit, on est obligés d’y penser. Cela vous simplifie les réservations dans les restaurants, qui étaient vides. Je donnais un déjeuner pour un journaliste du Haaretz et en un coup de téléphone, quelqu’un lui dit qu’il y avait un terroriste avec sa ceinture d’explosifs qui était dans le quartier de l’école de sa fille. Le malheureux essayant désespérément de joindre sa femme, pour qu’elle aille chercher la fille. Il y a eu environ 1200 victimes dont à peu près une soixantaine de français. Il me revenait d’aller présenter mes condoléances aux familles de victimes françaises. Ce n’était pas simple. On arrive avec son costume, sa cravate, son chauffeur. Et on ne sait trop quoi dire. J’ai dû le faire une bonne vingtaine de fois.
C’était donc une atmosphère très pesante, mais d’un autre côté, la vie continue. Vous savez, il y a une capacité de l’être humain de s’adapter, de s’habituer, qui est assez étonnante. Lorsqu’on dit que Paris faisait la fête entre 1914 et 1918, certains disent que c’était de l’inconscience du cynisme. Non, c’est l’être humain qui essaye de trouver des interstices pour continuer à vivre.
Quelle est votre relation à la littérature israélienne et quelle place celle-ci occupe-t-elle dans la vie du pays ?
Israël est un pays d’intellectuels. Les Juifs représentent 0,2 % de la population humaine, mais 28 % des prix Nobel de physique. Il y a donc une qualité intellectuelle unique, avec notamment l’Université de Jérusalem, l’Université de Tel Aviv, le Technion de Haïfa, l’Institut Weizmann de Rehovot, qui sont des institutions de niveau mondial. Vous avez des spécialistes d’à peu près tout, des intellectuels de très grande qualité, en relation avec les universités du monde entier. C’est un immense plaisir, il faut bien le dire. Cela permet de faire des rencontres passionnantes. L’avantage d’un ambassadeur, c’est qu’il peut rencontrer à peu près qui il veut et donc j’ai tenu à rencontrer les grands écrivains. Un écrivain qui m’a toujours profondément ému et que je continue de lire, c’est Aharon Appelfeld.
Ce qui est bouleversant, c’est d’abord son histoire : lui et sa famille étaient des Juifs de Bucovine, de bonne famille dont germanophones qui ont vécu « la marche de la mort » organisée par les Roumains. A 11 ans, ses parents le poussent en dehors de la colonne, il va vivre enfant sauvage en Ukraine de ses 11 à ses 15 ans. Il se retrouve en 1946 dans un camp de réfugiés et arrive en Palestine, et là il refuse d’abandonner l’allemand, parce que c’est la langue de ses parents. Il n’écrira quasiment que sur cette Bucovine, qu’il n’a connue que durant les dix premières années de sa vie. Au fond, c’est l’écrivain du deuil du Yiddishkeit. Dans une langue qui ne dit rien de trop, il décrit ainsi les vacances de ses parents au bord d’un fleuve, je ne sais pas si c’est le Dniestr ou le Prout, durant ces étés étouffants de l’Europe continentale. Il le fait de manière très simple, et c’est assez curieux, car on sent à le lire, que quelque chose de terrible va se produire.
Vous l’avez connu ?
Oui, quand je l’ai connu, c’était un vieux monsieur – il devait avoir 80 ans – d’une très grande modestie, qui portait toujours une casquette. Naturellement je l’ai fait Commandeur des arts et des lettres. Pour moi, cette écriture était, et reste encore aujourd’hui, marquante. Chaque fois que je découvre un petit livre d’Aharon Appelfeld, je le lis et retrouve cette blessure, la perte d’une civilisation détruite. On oublie souvent cela : la Shoah, ce sont cinq millions d’êtres humains assassinés mais aussi la destruction d’une culture, d’une littérature, d’une langue vivante et de centaines de synagogues en bois qui ont été systématiquement brûlées.
Et puis il y a bien sûr Amos Oz. J’ai découvert son livre Une histoire d’amour et de ténèbres un peu par hasard au moment de ma nomination en Israël. Sec et arrogant, il m’a reçu dans sa maison située à la lisière du Néguev, d’où l’on voyait le désert. Sa maison était très simple, typiquement israélienne, une sorte de cube. Ce livre explique en grande partie ce qu’était le premier Israël, celui que j’ai découvert en 1982. Un Israël où, dans le plus petit appartement, vous trouviez 2 000 livres en six langues, avec inévitablement, je ne sais pas pourquoi, les œuvres complètes de Hegel en écriture gothique. Amos Oz est un des enfants de ce premier Israël.
Et puis, vous avez des écrivains plus jeunes. Israël, à cause des guerres et de cette interrogation permanente sur le peuple juif, le judaïsme et la modernité, est un pays où l’on se pose des questions essentielles. C’est un pays où la littérature ne se limite pas aux intrigues de la petite bourgeoisie française – A qui couche avec B, puis part avec C. On ne parle pas d’autofiction ici. C’est une littérature qui examine le destin de l’Homme et le fait de manière convaincante. Pour moi, c’est l’une des grandes littératures contemporaines.
Après les nourritures spirituelles, revenons à des considérations plus matérielles. Que pouvez-vous nous dire de la cuisine israélienne ?
Mon premier cauchemar a été les multiples invitations reçues — puisque les Israéliens sont très chaleureux — pour le Séder de Pessa’h, la Pâques juive. Dans ce cadre, des plats sont servis pour représenter les différentes étapes de la libération du peuple juif d’Égypte. Cependant, lorsque j’ai été invité pour la première fois, c’était par des ashkénazes, et leur cuisine, notamment la carpe farcie, m’a semblé être une véritable catastrophe culinaire. La carpe, à l’origine un poisson modeste et fade, devient le réceptacle de tous les restes de la semaine, agrémenté au choix de sel ou de sucre — une pratique qui varie selon les traditions lituaniennes ou polonaises, ce qui rend l’ensemble assez épouvantable. Même de nombreux Israéliens partagent cet avis, tout en faisant exception pour le plat préparé par leur mère, qui, souvent, ne se révèle pas plus satisfaisant. Ensuite, il y a aussi la salade de foie, accompagnée de raifort, qui est une combinaison particulière…. Malgré tout, par respect pour mes engagements envers la République Française, j’ai participé à ce rituel chaque année, jusqu’à ce que je sois invité à un Séder séfarade et yéménite. Le Séder yéménite offrait une cuisine bien plus agréable, et depuis cette expérience, j’ai compris que je me sentais gastronomiquement séfarade, ce qui, après tout, n’était pas surprenant pour un marseillais.
Israël s’est tout de même imposé dans les années 2000 comme un pôle culinaire de premier plan.
Aujourd’hui, les restaurants israéliens sont de qualité, mais ils offrent une cuisine très internationale. Vous trouverez beaucoup d’établissements proposant une cuisine méditerranéenne chic, souvent dirigés par de jeunes chefs formés à Paris. En été, les terrasses sont particulièrement agréables. Tel Aviv est une ville assez exubérante, connue comme l’une des capitales de la vie nocturne, un peu à l’image de Barcelone. C’est une destination où les fêtards viennent souvent pour un long week-end festif, ce qui peut sembler surréaliste compte tenu des tensions régionales.
Aujourd’hui, Tel Aviv est une ville prospère. Israël a atteint un niveau de vie comparable à celui de l’Europe du Sud, dépassant même des pays comme la Grèce et se rapprochant de l’Italie et de l’Espagne. Cette réussite économique est l’une des caractéristiques du pays, souvent comparé à « un Singapour du Moyen-Orient », grâce à ses universités de qualité et à son statut de nation de start-ups. On parle même de la « Shalom Valley », situé au nord de Tel Aviv entre cette ville et Herzliya, comme d’une nouvelle Silicon Valley. Cette réussite économique place Israël quelque peu en marge du Moyen-Orient, une réalité amplifiée au XXIe siècle par l’ère d’Internet, qui transcende les frontières géographiques.
Iriez-vous jusqu’à dire qu’Israël est un pays occidental – voire européen ?
Bien que la Déclaration d’Indépendance ait explicitement promis l’égalité pour tous les citoyens israéliens, indépendamment de leur religion ou sexe, une loi adoptée en 2018-2019 a fait d’Israël l’État-nation du peuple juif, marquant un changement significatif qui semble écarter cette égalité énoncée.
Ce développement reflète une évolution perceptible dans la nature même d’Israël. Il est plausible de dire qu’il y a une décennie ou deux, Israël avait une orientation plus européenne et occidentale, contrastant avec la montée actuelle de l’influence religieuse. Dans ce contexte, étant donné ce qui se passe également en Europe, je pense qu’on peut décrire la réalité israélienne comme une réflexion de ce que vivent actuellement des pays tels que la Grande-Bretagne, l’Italie ou la Hongrie : une montée de l’illibéralisme au sein de sociétés fondamentalement occidentales dans leur logique institutionnelle.
On peut voir en Netanyahou une figure correspondant à Orbán, dont il est d’ailleurs proche, tout en tenant compte des spécificités du judaïsme et du conflit israélo-palestinien. C’est un véritable bouleversement, car Israël était considéré comme un exemple d’État de droit, en grande partie grâce au rôle crucial joué par la Cour suprême dans un pays dépourvu de constitution formelle. L’attaque de Netanyahou contre la Cour suprême reflète une remise en question de cet État de droit.
Quelle est votre relation à la langue hébreue ?
Israël est né en réaction à l’antisémitisme européen. Cette création est une réussite remarquable, transformant un territoire en un État prospère, riche et une démocratie libre. Israël a également réussi à revitaliser une langue, un exploit pratiquement unique à ma connaissance. Les Irlandais ont tenté avec le gaélique, mais sans succès, tandis que les Norvégiens ont tenté de moderniser le vieux norrois sans y parvenir.
À ses débuts, il y avait un débat pour adopter le yiddish, mais l’hébreu est devenu une langue vivante et littéraire. C’est une langue relativement facile à parler et d’ailleurs la diversité des immigrants permet les erreurs. En revanche, elle est difficile à lire en raison de l’absence de voyelles dans l’écriture sémitique, ce qui rend la compréhension difficile sans une bonne connaissance du vocabulaire. A la fin de mon séjour en Israël, je baragouinais encore. J’arrivais à lire un discours, mais on me vocalisait, comme on fait pour la Bible afin d’éviter des interprétations variées.
Ce serait difficile de conclure votre entretien sans vous demander de revenir de nouveau – après notre conversation il y a quelques mois – sur la guerre, la crise humanitaire et la destruction qui ont suivi le 7 octobre. Êtes-vous préoccupé par l’avenir d’Israël ? Comment envisagez-vous l’avenir de ce pays en proie à de fortes tensions intérieures et de puissantes contestations extérieures ? Êtes-vous inquiet quant à sa pérennité à long terme ?
Je ne suis pas préoccupé par la pérennité de ce pays. Israël est une puissance nucléaire et une superpuissance au Moyen-Orient. De plus, les pays arabes et du Golfe ont besoin d’Israël dans leur lutte contre l’Iran. Israël compte également des amis dans le monde entier. Je suis davantage préoccupé par l’évolution interne d’Israël. Nous sommes passés d’une période où Israël incarnait un idéal d’égalité et de fraternité, bien que parfois avec une brutalité certaine, à un pays de plus en plus dominé par un messianisme religieux qui exclut les autres.
Aujourd’hui, il n’y a pratiquement plus de représentants de gauche au Parlement, laissant place à un débat entre la droite, l’extrême droite et l’ultra-droite. Certains ministres adoptent des positions franchement fascistes. Ce qui se déroule en Cisjordanie est extrêmement préoccupant : avec le soutien de la police et de l’armée, des colons chassent impunément les Palestiniens. Israël semble devenir de plus en plus fort, peut-être trop fort, et risque d’annexer progressivement la Cisjordanie. Dans cette région, Israël fonctionne comme un État d’apartheid, avec deux populations dont les droits sont très inégaux, les uns dominant clairement les autres. Donc, je ne dirais pas que je suis inquiet, mais plutôt triste et déçu. Israël, comme je l’explique dans mon livre2, semble être tombé dans le piège de l’histoire, victime de l’hubris.
Vous citez dans votre livre Yosef Burg, un membre de longue date de la Knesset : « Entre une vie humaine et la terre, un juif ne peut pas hésiter ; c’est la vie humaine qui prime, penser le contraire serait une adoration païenne monstrueuse de la terre ». Au cours de cette discussion, vous avez décrit à la fois une religiosité intense et une forme de matérialisme que vous dénoncez.
Si Dieu, le Dieu d’Israël, n’a pas promis la vie éternelle ou le bonheur éternel à ses croyants, il leur a donné la terre d’Israël. Ainsi, la promesse du retour du Messie est liée au peuple d’Israël vivant selon la loi d’Israël sur la terre d’Israël. Cette réalité avait disparu durant la diaspora simplement parce qu’il n’y avait pas d’État juif. Ainsi, la relation avec la terre d’Israël est devenue une aspiration spirituelle. Les Juifs religieux étaient initialement opposés au sionisme car ils estimaient que seul Dieu pourrait permettre le retour du Messie et la création de l’État d’Israël. Pendant l’entre-deux-guerres, la grande majorité des juifs étaient non-sionistes, mais la Shoah a tout changé. Après la reconquête de Jérusalem en 1967, certains juifs religieux ont commencé à se demander si le sionisme qu’ils avaient précédemment condamné ne jouait pas un rôle essentiel pour préparer le retour du Messie. Ils ont été aussi enflammés par leur retour sur la terre de la Bible. À partir de là, les partis religieux ont progressivement détourné le sionisme à leur profit.
Cela étant, rien n’est joué. N’oublions pas les Israéliens qui manifestent par centaines de milliers pour la paix et l’Etat de droit. Après tout, il a fallu cinq élections en trois ans pour finalement donner la victoire à la droite et à l’extrême droite. L’Israël démocratique résiste.
Sources
Premier ministre d’Israël de 1977 à 1983.
Gérard Araud, Israël : Le piège de l’Histoire. Tallandier, 2024
Florian Louis, Pierre Ramond
Conclusion très décevante par rapport au reste de l’interview. La tirade sur l’illibéralisme est d’une grande platitude!