Notre chroniqueur passe en revue les candidats investis par le nouveau Front populaire, de Philippe Poutou à Aly Diouara en passant par Raphaël Arnault, militant antifasciste fiché S. Il dénonce le silence des «grandes consciences de gauche» face à la radicalisation de leur camp.
Ceux qui me lisent savent bien que c’est le combat de ma vie. Et bien avant que j’écrive mon Manuel de résistance au fascisme d’extrême gauche (Nouvelles éditions de Passy, 2021). Nous y sommes, et dans son fascisme et dans ma résistance.
Quand j’avais écrit le mot «fascisme», et ainsi que je l’avais expliqué à l’époque au Figaro , il y avait une dimension de provocation. Et j’utilisais ce terme dans son acception contemporaine galvaudée, loin de la rigueur terminologique historique.
Mais jamais, autant qu’aujourd’hui, l’acception vulgarisée n’avait acquis autant de cruelle réalité. Dans cette réalité la plus crue de son antisémitisme et du racisme antioccidental ou antifrançais, d’abord. Je n’avais pas attendu le 7 octobre et mon Journal de guerre. C’est l’Occident qu’on assassine (Fayard, 2024) pour documenter leur caractère décomplexé. L’alliance de la haine islamiste des Juifs et des Chrétiens, et de la haine gauchiste ou woke des blancs, est mise en partition par David Guiraud, Thomas Portes ou Aymeric Caron, à l’Assemblée comme dans la rue.
Passons à présent à la «Résistance» ou plutôt à son absence. Les partis de gauche et d’extrême gauche ont donc signé l’accord «infâme», pour reprendre l’épithète d’un Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), trop tardivement conscient de la dangerosité létale de l’antisémitisme des insoumis.
Tous ont signé. Acceptant de mêler leur encre peu sympathique à celle d’un parti pratiquant l’antisémitisme par intérêt comme par conviction. Arrêtons-nous un instant sur le parti Place publique, car c’est ici qu’habite notre consternation indignée par une indigne compromission non seulement politique, mais individuelle. Raphaël Glucksmann avait mené une campagne électorale européenne, sinon courageuse, au moins honorable.
Ses résultats le furent tout autant. Ils l’eurent été encore davantage s’il avait affronté frontalement le parti d’extrême gauche dominant. Mais la signature de son parti au bas du parchemin contractuel est consternante.
Plus grave encore, les déclarations de son principal responsable, vendredi matin sur France Inter, sont sidérantes, littéralement. Au micro de la radio de service public, et pour défendre le nouveau Front Populaire, le leader de Place publique n’a pas hésité à dire (repris par un tweet officiel de la station) : «Vous m’avez demandé, en tant que Juif de gauche, comment on fait pour se sentir représenté. Je suis là pour vous représenter».
L’auteur de cette chronique a depuis toujours observé un principe constant : ne jamais faire référence à l’origine de ses contradicteurs pour en tirer argument. Sauf lorsqu’ils s’en réclament expressément.
C’est ce qu’a cru devoir faire Raphaël Glucksmann pour justifier son paraphe à côté de celui de Jean-Luc Mélenchon. Alors que quelques jours auparavant, il s’était plaint d’avoir été insulté, toujours ès qualités de Juif, par des sympathisants de ce parti aujourd’hui partenaire. Je préfère ne pas avoir à qualifier ici l’immoralité de se porter garant, à titre communautaire, d’un contrat immoral. Immoral jusqu’au choix des candidats de ce que j’ai nommé par dérision «Front Patibulaire». Jusqu’à présent, l’idéologie médiatique encore un peu dominante est demeurée taisante. Rencontrons donc à sa place certaines personnalités adoubées par le parti de la France insoumise.
Il y a d’abord Philippe Poutou, principal responsable du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA). La simple présence dans l’aréopage de la gauche d’un parti aussi extrémiste aurait dû faire froncer quelques sourcils. Mais non, la question ne sera pas posée par la gauche très morale, mais peu sourcilleuse. Le fait que certains membres de ce parti soient poursuivis pour avoir fait l’apologie d’un certain pogrom, pas davantage.
Il y a aussi Aly Diouara, investi par LFI à la place de Raquel Garrido. Il appartient à la mairie de Drancy. Son compte X a été visité par le Figaro ce dimanche : cet admirateur de l’imam antisémite Iquioussen, expulsé récemment pour l’ensemble de son œuvre, est obsédé tant par les Juifs que par les blancs, ce qui, on le lui concédera, n’est pas contradictoire. Il tient évidemment Glucksmann pour «sioniste». Mais, je l’ai dit, ce dernier n’est guère rancunier.
J’ai gardé, dans cette trop courte excursion qui aurait pu durer bien plus longtemps, le pire pour la fin. Je veux parler de Raphaël Arnault, militant antifa violent, porte-parole du mouvement d’extrême gauche La Jeune Garde et fiché S ! Le Figaro lui a aussi consacré un article ce dimanche. Bien entendu, lui aussi, a chanté les louanges du Hamas le jour béni par lui où le mouvement terroriste a massacré femmes et enfants.
Voilà les personnes choisies par le Front populaire pour éradiquer la peste brune. Pour l’instant, sans résistance aucune ou presque des «grandes consciences de gauche». Pour un Manuel Valls, un Bernard Cazeneuve, un Julien Dray, combien de silencieux ? Sans parler d’un François Hollande qui ne résiste pas à se venger de son successeur quitte à vendre son âme et ce qui lui reste de réputation pour une députation.l
Lors de la manifestation ce samedi contre l’extrême droite, de nombreux islamo-gauchistes ont crié leur haine. La représentante du Parti des Indigènes a prononcé une harangue enflammée en soutien au Hamas. Pendant ce temps, le monde artistique, généreux, tempétueux, sentencieux, ombrageux et courageux, préfère faire relâche.
La lutte contre le racisme et l’antisémitisme ne fait plus recette au guichet. J’ignore ce qui sortira des urnes. Je suis incapable de quantifier le nombre de dupes apeurées par le danger de «l’extrême droite».
J’avoue moi aussi être effrayé par le vrai danger qui peut venir, et non celui, fantasmatique, que l’on voudrait nous faire acheter. La violence des brutes et l’intolérance des méchants et des ignorants. Le sort des Français, à commencer par celui des plus exposés, qu’il est inutile de nommer. Ils sont trop peu pour compter.
Jean-Luc Mélenchon est toujours le même, mais a seulement changé de continent. Il est fasciné par les masses, la rue, la foule et le nombre. C’est une grande chose que le nombre. Il habite la France mais reconnaît détester résider là où vivent trop de blancs.
Ce dimanche, son cœur était en Amérique du Sud, tout à côté de Chavez et de Fidel. Du Che dont le beau visage christique ornait le mur des chambrettes des étudiants gauchisants. L’idéologie cachottière ne leur avait pas dit que le gentil geôlier Guevara exécutait sans pitié ses opposants de sa main (Dix faces cachées du communisme de François Kersaudy, Perrin, 2023).
Aujourd’hui, le cœur de Mélenchon est à Gaza. Mais c’est toujours les mêmes mensonges éhontés. Blum, réveille-toi, ils sont devenus fous.
Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox. Il a récemment publié Journal de guerre. C’est l’Occident qu’on assassine (Fayard).