Depuis des décennies, des diplomates tentent de promouvoir une solution permettant aux Israéliens et aux Palestiniens de vivre ensemble dans deux États distincts et souverains. Cet hiver, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a réitéré son opposition à la création d’un État palestinien souverain, à rebours de la demande récurrente du président américain, Joe Biden. Mais mercredi, l’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé leur décision coordonnée de reconnaître l’État de Palestine dans l’espoir d’entraîner d’autres pays à faire de même.
D’où vient l’idée ?
Le concept est né dans les années 1930, soutenu par les Juifs venus s’installer en Palestine, alors sous mandat britannique. C’est sur cette base qu’est élaboré le plan de partage de la Palestine, dessiné dans la résolution 181 de l’ONU, aboutissant à la proclamation de l’État d’Israël en 1948.
Rejeté par les Palestiniens et les pays arabes, ce plan de partage et cette création de l’État d’Israël sont les déclencheurs de la guerre israélo-arabe de 1948-1949. Israël en sort renforcé avec un territoire accru et l’État palestinien disparaît avant même d’avoir existé.
En 1964, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) est fondée avec pour objectif de libérer la totalité de la Palestine. La guerre israélo-arabe de 1967 permet à Israël de prendre le contrôle des Territoires palestiniens de Cisjordanie, notamment Jérusalem-Est, et de Gaza. Selon la loi internationale, ils demeurent occupés jusqu’à ce jour, et toutes les colonies sont illégales.
Après la guerre de 1967, la colonisation sous différentes formes, légales ou illégales selon le droit israélien, s’est poursuivie, avec l’appui plus ou moins marqué des gouvernements successifs.
L’espoir d’Oslo
Des espoirs de paix surgissent en 1993 lorsque le chef de l’OLP, Yasser Arafat, serre la main du Premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, le 13 septembre 1993 à la Maison Blanche, devant le président américain, Bill Clinton.
Les accords d’Oslo qu’ils entérinent proposent un degré limité d’autonomie palestinienne, avec pour but final la cohabitation pacifique des deux peuples dans des contours à définir. Les radicaux des deux camps sont furieux. En 1995, un extrémiste juif assassine Rabin, ouvrant la voie à des décennies de violence.
Des pourparlers en 2013 remettent le projet sur la table. « Politiquement, il n’y a eu aucun effort pour le rendre réalisable depuis », estime Xavier Guignard, du groupe de réflexion parisien Noria Research.
Qu’en pensent les dirigeants ?
L’Autorité palestinienne, qui siège actuellement en Cisjordanie occupée, soutient la solution à deux États. Le président Mahmoud Abbas a réclamé une conférence internationale en septembre, décrivant « la dernière opportunité pour sauver la solution à deux États ».
À Gaza, le mouvement islamiste palestinien Hamas, qui a remporté les législatives de 2006 puis pris le pouvoir en 2007, a accepté pour la première fois en 2017 le principe d’un État palestinien sur la Cisjordanie et Gaza. Mais son but ultime reste la « libération » de tout le territoire de la Palestine de 1948, soit l’ensemble du territoire israélien actuel. Benjamin Netanyahu est, lui, totalement opposé à deux États depuis le début de sa carrière politique.
Quid des opinions publiques ?
Selon des sondages récents, la solution à deux États a lourdement perdu en popularité. Une étude de l’institut Pew Research, menée avant la guerre actuelle, montre que les juifs israéliens qui soutenaient le projet étaient passés de 46% en 2013 à 32% en 2023.
Un sondage de l’institut Gallup, lui aussi avant le début du conflit, a fait état d’une baisse des partisans de la solution à deux États à Gaza et en Cisjordanie de 59% en 2012 à 24% l’an passé. Certains Palestiniens ont évoqué la solution d’un seul État avec des droits égaux pour tous, mais l’écho reste faible.
Quel rôle pour la diplomatie ?
Des responsables américains et européens, les Nations unies et même la Chine, ont récemment remis le projet sur la table. Le refus d’une solution à deux États, « ainsi que le déni du droit à un État pour le peuple palestinien, sont inacceptables », a estimé samedi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.
Joe Biden a pour sa part fait état de « plusieurs types de solutions à deux États », afin d’ouvrir le spectre des possibles. Quant au chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, il a déclaré que, « ce que nous voulons, (c’)est bâtir une solution à deux États », afin de créer les conditions d’une paix durable dans la région.
La guerre actuelle pèse-t-elle ?
L’attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël a entraîné la mort de plus de 1.170 personnes, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes. En représailles, Israël a juré d' »anéantir » le mouvement islamiste. Selon le ministère de la Santé du Hamas, plus de 35.600 personnes ont été tuées dans les opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza. La solution à deux États semble demeurer un mantra pour la communauté internationale et une fiction pour Palestiniens et Israéliens.
La Palestine arabe c’est au mieux la Jordanie