Eden Golan, la représentante d’Israël à l’Eurovision, arrivée à la cinquième place malgré une campagne d’une extrême hostilité envers son pays a dédié ce très beau lot de consolation aux 123 otages détenus par le Hamas dans la bande de Gaza.
«C’est un rêve, je vis cette cinquième place comme une victoire, j’ai représenté mon pays et le public européen s’est retrouvé avec nous», a lancé très émue Eden Golan à l’annonce des résultats. Elle a pourtant dû affronter une longue série d’avanies, ainsi qu’une campagne d’hostilité virant parfois à la haine de la part de milliers de manifestants pro palestiniens déferlant dans les rues de la ville suédoise de Malmö, présentée par les médias israéliens comme un «bastion d’islamistes». Des huées ont ponctué ses séances de répétition ainsi que la demi-finale. Les organisateurs l’ont contrainte de modifier le titre originel de sa chanson «pluie d’automne», jugée trop politique, car faisant allusion aux massacres commis le 7 octobre par des commandos du Hamas dans le sud d’Israël, en «Hurricane» censé être plus neutre. Les menaces d’agressions, voire d’attentats contre les membres de la délégation israélienne ont atteint un tel niveau que Ronen Bar, le chef du Shin Beth, le service israélien chargé de la lutte anti-terroriste, est venu en personne vérifier les mesures de sécurité drastiques mises en place. Par précaution, la délégation israélienne a dû rester calfeutrée dans son hôtel dont l’emplacement avait été gardé secret.
«Mais l’essentiel était que tout Israël s’est retrouvé en Eden», s’est félicité Yoav Tzafir, le metteur en scène de la chanteuse. Benyamin Netanyahou, le premier ministre a fait l’éloge de la résilience dont a fait preuve cette chanteuse de 20 ans «qui a su faire face à une vague horrible d’antisémitisme». Israel Katz, le chef de la diplomatie sur la même ligne a affirmé que la «chanteuse nous a montré le chemin à suivre». La plupart des médias l’ont également présentée comme une héroïne alors que des dizaines d’Israéliens s’apprêtaient à lui faire la fête à son arrivée à l’aéroport Ben Gourion près de Tel Aviv.
Commémorations de la journée du souvenir
Les résultats des votes ont également été interprétés politiquement. Eden Golan est arrivée deuxième auprès du public appelé à se prononcer et même première dans 15 des 38 pays participants. En revanche, elle a dû se contenter de la 12e place auprès des membres du jury. «Les gens ont voté pour la vérité», a-t-elle affirmé. Pour Yoav Tzafir, le jury était composé d’une «élite» représentant pour certains des pays hostiles à Israël, ce qui n’a pas été le cas des simples spectateurs qui auraient jugé avant tout la chanson elle-même et non pas la chanteuse comme une porte-parole de son pays. «En temps normal nous aurions pu remporter la première place», a estimé Yoav Tzafir et d’ajouter: «ce n’est pas facile de découvrir l’image d’Israël auprès de l’Europe officielle» à propos des protestations en tout genre qui ont ponctué tout le séjour de la délégation israélienne.
Hasard du calendrier: Eden Golan est rentrée en Israël quelques heures avant les commémorations de la journée du souvenir des soldats et des civils tués lors de combats ou d’attentats. À 20 heures le pays va se figer pendant une minute au son lugubre des sirènes. Cette année ces cérémonies ont pris une tournure beaucoup plus émouvante avec la poursuite de la guerre dans la bande de Gaza, dont personne ne voit pour le moment la fin évoquée à demi-mot dans la chanson d’Eden Golan. Depuis le 7 octobre, quelque 1538 civils, y compris des femmes et des enfants ainsi que des soldats, ont été tués. Mais, comme l’a souligné la radio de l’armée, son apparition dans un pays traumatisé «nous a permis malgré tout de vivre un moment de normalité dans une situation qui n’a malheureusement rien de normale».