Avec 13 soldats tués, l’armée israélienne a subi ce week-end ses pires pertes depuis le début de la guerre à Gaza. Malgré cette triste litanie l’arrière tient bon : aucun mouvement de contestation contre la poursuite de la guerre contre le Hamas n’est apparu.
La bande de Gaza prend des allures de « bourbier ». Cette expression, d’un éditorial du quotidien israélien « Yediohot Aharonot », résume bien les difficultés rencontrées par l’armée israélienne pour casser, une fois pour toutes, l’appareil militaire du Hamas.
Pas moins de 13 soldats ont été tués en deux jours, portant à 140 le nombre de militaires tombés aux combats depuis le 7 octobre. Tsahal dispose pourtant d’une force de frappe aérienne et d’une artillerie hégémoniques.
Plus de 7.000 membres des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche armée du Hamas auraient été tués, selon les estimations des militaires israéliens. Le ministère de la Santé du Hamas, de son côté, estime à 20.000 le nombre de morts palestiniens, dont une majorité de civils. Malgré cette hécatombe, les islamistes, bien que sérieusement ébranlés, refusent de jeter l’éponge et continuent de se battre.
L’arrière résiste
Malgré cette triste litanie l’arrière tient bon, du moins pour le moment. Seuls 2.000 soldats réservistes sur plus de 360.000 appelés sous les drapeaux n’ont pas répondu présents à l’appel. Le traumatisme provoqué par les quelque 1.200 morts tués par le Hamas dans le sud d’Israël et le sort des 130 otages encore détenus par les islamistes dans la bande de Gaza expliquent cette détermination et ce désir d’en découdre.
« Ils ont appris à reconnaître nos points faibles »
Mais sur le terrain, les militaires ont affaire à une partie sans doute plus rude qu’ils ne le pensaient. « Après plus de deux mois de combats terrestres, les terroristes ne hissent toujours pas le drapeau blanc, ils ont appris à connaître nos points faibles et savoir où nous frapper », reconnaît le commentateur militaire de la radio de l’armée.
Le champ de bataille est concentré dans des espaces étriqués, des ruelles étroites où le moindre recoin peut dissimuler un engin piégé actionné à distance. De tout petits groupes de combattants peuvent surgir par surprise d’un des milliers de tunnels construits par le Hamas et tirer une roquette antichar avant de replonger sous terre, sans compter toutes les maisons susceptibles de cacher des snipers à la recherche d’une cible.
Des « tirs amis » responsables de décès
« Plus les opérations des soldats se prolongent plus s’instaure une routine dangereuse. En nous observant, le Hamas peut nous repérer et nous tendre des embuscades sur les routes que nous empruntons fréquemment, parfois dans des véhicules non protégés, alors que nous avons la fausse impression que, vu le nombre de militaires déployés, le secteur est sécurisé », explique Zeev, un trentenaire, informaticien de profession et réserviste en poste dans le nord de la bande de Gaza lors d’une de ses rares permissions.
La tension permanente des troupes, le sentiment d’être à la merci d’un piège tendu au bout de la rue sèment la confusion et poussent parfois à avoir la gâchette facile sans tenir compte des règles d’engagement. Deux quotidiens ont clairement laissé entendre dimanche que plusieurs de 13 morts du week-end auraient été tués par des « tirs amis ».
Au début du mois, le porte-parole de l’armée avait déjà fait état de 20 soldats abattus par erreur lors d’opérations menées par leurs camarades. Une autre bavure a provoqué une onde de choc le 15 décembre, lorsque trois otages, qui avaient réussi à s’enfuir ont été tués par des soldats alors qu’ils agitaient un drapeau blanc et se trouvaient en sous-vêtement pour prouver qu’ils n’étaient pas de kamikazes porteurs de bombe.
Malgré tout, aucun mouvement de contestation contre la poursuite de la guerre à Gaza contre le Hamas n’est apparu, bien que l’état-major et le gouvernement aient prévenu que les combats risquaient de se poursuivre pendant des semaines voire de mois.
Pascal Brunel