Histoire. Pendant des siècles, nul empire n’a menacé la Ville sainte mais, dès l’entrée des troupes britanniques en 1917 victorieuses de l’armée turque ottomane, elle redevient un lieu à conquérir.
Du côté arabe, on utilise tour à tour la diplomatie et la violence ; le Haut Comité arabe de Palestine, bientôt dirigé par le grand mufti de Jérusalem/Al-Quds (La Sainte) Hadj Amine el Husseini, tente d’entraîner les Etats arabes autonomes ou indépendants à faire pression sur Londres pour qu’il entrave le développement juif. Par ailleurs, dès 1921, des émeutes éclatent contre des Juifs de la ville et, en 1936, le mufti lancera dans tout l’espace mandataire la grande révolte arabe. Quant au Royaume-Uni, il essaie d’imposer dès 1937 un partage de la Palestine (plan Peel) maintenant Jérusalem dans le giron britannique.
Batailles épiques
Le 29 novembre 1947, l’ONU adopte son plan de partage – accepté par l’Organisation sioniste, rejetée (puis militairement combattue) par le Haut Comité arabe et les Etats de la Ligue arabe – en deux Etats juif et arabe. Jérusalem et Bethléem constituent un Corpus separatum sous supervision internationale. Tout au long de 1948, l’accès à la ville depuis la bande côtière (cœur du Yishouv puis d’Israël) est le théâtre de batailles épiques mais aussi de massacres, et, après le blocus jordanien de la partie orientale (dont la Vieille Ville), le jeune Etat d’Israël doit se contenter de la partie occidentale. Il annexe celle-ci en la proclamant capitale, tandis que la Jordanie annexe la partie orientale (ainsi que toute la Cisjordanie) en en chassant les habitants du quartier juif. Entre les deux parties s’érigera un mur.
Tout change avec la guerre des Six Jours de juin 1967 : Israël conquiert la partie jordanienne de Jérusalem, « réunifie » la cité, et construit assez vite plusieurs quartiers d’habitation au nord et au sud de la Vieille Ville, sur des collines dominant d’environ 100 mètres le centre-ville, puis, dans les années 1970-1980, une ceinture d’implantations plus éloignées, mais situées aussi sur des hauteurs. Le camp national palestinien, pour sa part, sans instrument de pouvoir sur le terrain, tente de faire condamner Israël pour sa politique de « judaïsation ». En 2020, Israël remporte une victoire en terrain diplomatique hostile, puisque les Etats-Unis reconnaissent sa souveraineté sur Jérusalem. La lutte se poursuivra et, au fond, seuls les Britanniques ont abandonné l’idée de posséder la Ville sainte !
Frédéric Encel, chroniqueur à L’Express, auteur d’une thèse de doctorat sur Jérusalem, publiée sous le titre Géopolitique de Jérusalem (Flammarion, 2009).