Sous la pression d’une commission du Sénat américain, la banque suisse a réintégré Neil Barofsky en tant que médiateur pour superviser l’enquête interne sur d’anciens comptes bancaires suspectés d’avoir appartenu à des nazis. Le Sénat américain soupçonne l’établissement d’avoir laissé des angles morts dans son enquête interne à ce sujet.
Soupçonné de dissimuler les faits, Credit Suisse va de nouveau se pencher sur son soutien passé aux nazis. Après l’avoir congédié fin 2022, la banque a réintégré Neil Barofsky en tant que médiateur indépendant chargé d’enquêter sur les comptes bancaires suspectés d’avoir appartenu à des nazis.
L’annonce a été faite lundi par les sénateurs américains Chuck Grassley et Sheldon Whitehouse, qui reprochent à la banque d’avoir mis fin à ce mandat « de manière inexpliquée », laissant ainsi d’importantes zones d’ombre dans son enquête interne à ce sujet.
« Sur notre insistance, le Credit Suisse a accepté d’approfondir sa propre histoire, et Neil Barofsky supervisera à nouveau cet examen », ont déclaré lundi soir les élus américains dans un communiqué. Une décision qui intervient quelques mois après le rachat de la deuxième banque helvétique par sa rivale UBS.
« Allégations non étayées »
Au terme de son enquête interne, en avril, la banque suisse avait infirmé les principales affirmations formulées par le Centre Simon Wiesenthal en 2020. Cette organisation consacrée à la lutte contre l’antisémitisme avait dressé une liste de 12.000 nazis installés en Argentine, et soupçonnait un certain nombre d’entre eux d’avoir eu des comptes à la Schweizerische Kreditanstalt, l’ancien nom de Credit Suisse. L’organisation affirmait par ailleurs que certains comptes étaient restés ouverts jusqu’à récemment.
La banque avait accepté, à la demande du centre, de se pencher sur la question en engageant le cabinet Alix Partners pour analyser ses archives. Une équipe de 50 personnes avait été mobilisée pour passer en revue quelque 480.000 documents.
Neil Barofsky avait été initialement chargé de rendre un rapport public sur ses conclusions, un document que la commission sénatoriale du budget n’avait réussi à obtenir qu’après une citation à comparaître. La commission accuse la banque d’avoir refusé de creuser certaines pistes soulevées en cours d’enquête.
Credit Suisse avait quant à lui reproché au médiateur indépendant « de nombreuses erreurs factuelles » et des « allégations non étayées », reposant sur une « compréhension incomplète des faits ».
La banque helvétique rétropédale donc en acceptant de le laisser procéder à un nouveau contrôle, afin de faire toute la lumière sur ce passé trouble. Cette affaire s’inscrit dans la longue liste de litiges dans lesquels Credit Suisse s’est retrouvé empêtré ces dernières années, et qu’UBS doit désormais gérer.
Selon le Sénat américain, les dernières conclusions de l’enquête réexaminées par Neil Barofsky devraient être publiées « dans les mois à venir »
Par Rachel Cotte