Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, des dizaines de requêtes ont été portées pour demander l’autorisation de la conservation du sperme des victimes israéliennes, militaires comme civiles. Un cas de figure qui pose un dilemme moral lorsque le défunt n’a pas donné explicitement son accord, relève “Ha’Aretz”.
Dès le soir du samedi 7 octobre, date de l’attaque sanglante du Hamas dans le sud d’Israël, les familles de trois jeunes civils assassinés près du kibboutz Reim se sont présentées à l’hôpital universitaire Kaplan de Rehovot, une ville située à 15 kilomètres au sud de Tel-Aviv. “Ces familles, explique Ha’Aretz, ont demandé à l’hôpital de procéder à l’extraction de spermatozoïdes et de les congeler en vue d’une éventuelle utilisation future”.
Les responsables du CHU Kaplan ont alors expliqué qu’une telle procédure devait d’abord être validée par une décision d’un tribunal de la famille, une juridiction dépendant de la justice de proximité. “À peine deux heures plus tard, l’autorisation était accordée et l’unité de fécondation in vitro du CHU Kaplan procédait au prélèvement de spermatozoïdes, vingt heures après le décès des trois jeunes Israéliens.” Face aux circonstances exceptionnelles, les ministères de la Justice et de la Santé avaient ordonné aux tribunaux de la famille de lever temporairement l’obligation d’une décision judiciaire.
Depuis la tuerie perpétrée par le Hamas et les représailles de l’armée israélienne sur la bande de Gaza, les demandes de conservation de spermatozoïdes concernent désormais, et surtout, les soldats de Tsahal – acronyme de l’armée israélienne – tombés au combat. “Ces demandes sont en train d’augmenter et devraient se multiplier davantage dans les semaines, voire les mois à venir qui verront de plus en plus de soldats mourir dans la bande de Gaza”, estime le quotidien de Tel-Aviv.
Un “poids psychologique pour l’enfant”
Un état de fait qui suscite nombre de questionnements éthiques. Depuis deux décennies, la Cour suprême affiche une ligne extrêmement prudente, basée entre autres sur un fondement essentiel : “le respect de la volonté du défunt” qui doit refléter “son autonomie individuelle et son libre arbitre quant au destin de son propre corps”. Pour la Cour suprême, la volonté d’une veuve de donner naissance à un autre enfant – ou celle d’une famille de voir naître des petits-enfants – ne peut être satisfaite sans l’accord préalable du père.
Ha’Aretz conclut en citant Yuval Or, directeur de l’unité de fécondation in vitro du CHU Kaplan : “Ces centaines de familles endeuillées prendront-elles la mesure du terrible poids psychologique qu’elles risquent d’imposer à des enfants à qui l’on dira : ‘Tu es né d’un père qui était déjà mort’ ?”