Micky, son épouse, revient sur le parcours de cet artiste aux multiples talents, né à Israël et qui a vécu ses dernières années à Houlbec-Cocherel (Eure).
Graveur, peintre, sculpteur vitrailliste, lithographe, Nissan Engel est né à Haïfa en Israël en 1931, et a vécu les dernières années de sa vie à Houlbec-Cocherel (Eure).
« À 17 ans, Nissan a fait la guerre de 1948 pour l’indépendance d’Israël, confie son épouse Micky Engel. Il a été pilote à bord des B17, avions que les Anglais avaient laissés, bien que sa mère ne voulait pas qu’il soit pilote. Puis, il a étudié aux Beaux-Arts de Betzalel de Jérusalem. » Une fois diplômé, son père l’a dissuadé de vivre de sa peinture : « ce n’est pas un métier », disait-il.
Il commence à peindre à Paris
Comme il aimait énormément le théâtre, il a réalisé beaucoup de décors pour le théâtre de Jérusalem. En 1958, il décide de se rendre au Centre dramatique de l’Est, école très prestigieuse de Strasbourg, pour poursuivre son travail de décorateur de théâtre avec pour professeur Michel Saint-Denis fondateur de l’Old Vic, grand théâtre londonien. Il part à Paris pour continuer son métier dans tous les théâtres de la capitale.
C’est à ce moment que Nissan a commencé à peindre, il s’est installé à Paris dans une chambre de bonne tout en prenant un petit travail à l’ambassade d’Israël. « Il fallait bien remplir le frigo », sourit-elle. Une première exposition au Grand Palais lui a permis de vendre ses toiles et l’a encouragé à poursuivre dans cette voie.
En 1960, il expose à Paris chez André Weil et à son grand étonnement, les chauffeurs de taxi, stationnant à cet endroit, étaient fascinés par ses toiles exposées dans la vitrine. Fort de cette première expérience, Nissan décide de rester à Paris.
Un peintre globe-trotter
« Il exposait à l’hôtel Martinez, à Cannes lorsque nous nous sommes rencontrés, en août 1960. On s’est mariés six mois plus tard. Un marchand américain, résidant à l’hôtel, achète quelques tableaux et lui demande d’exposer dans sa galerie de New York. Avant d’accepter, nous passerons un an à Ibiza, Nissan peignait pendant que je continuais mes études. Il y avait beaucoup d’intellectuels et mon mari, passionné d’échecs, aimait jouer avec eux. On reconnaît cette période où on peut voir des échiquiers dans ses œuvres », confie Micky Engel.
« Ensuite, nous sommes partis à New York, en 1965, retrouver le marchand américain. Nous y resterons dix ans avant de rentrer à Paris. Nissan y louait un petit atelier jusqu’au jour où on a été obligés de le quitter. Nous sommes arrivés dans la région, une location à Autheuil-Authouillet mais là aussi, nous avons dû partir. En 2008, j’ai mis des petites annonces, dont une à la petite épicerie d’Houlbec-Cocherel, pour rechercher un atelier en location. Le grand rabbin, Josy Eisenberg, avait une grange qui pouvait faire office d’atelier. Lorsque nous avons découvert ce lieu, mon mari a tout de suite vu le potentiel de cet endroit. » raconte Micky. Pour un artiste, l’orientation nord est importante car la lumière ne change pas.
Il adorait peindre dans son atelier
Nissan adorait peindre dans son atelier, au début à l’étage, puis au rez-de-chaussée dès que la baie vitrée intégrale fut installée. Cette dernière donne sur le jardin au fond duquel trônait un pommier qu’il a peint à plusieurs reprises. Il n’y avait pas une seule journée sans que Nissan ne peigne pas même en plein hiver où la température de cet atelier était glaciale.
« Ma fille, Alexandra, a beaucoup travaillé avec son père. Ils ont exposé un peu partout dans le monde, au Japon, en Allemagne, en Amérique notamment. Quand mon mari est tombé malade, il a continué à peindre et à exposer jusqu’au bout. Il a présenté ses œuvres à Göteborg en Suède avec Alexandra en septembre 2016 », conclut Micky Engel.
Nissan Engel est décédé début novembre 2016. Incinéré à Évreux, ses cendres reposent au pied de son pommier qu’il aimait tant peindre.