Jusqu’ici, Xavier Niel, Matthieu Pigasse et Moez-Alexandre Zouari n’avaient fait qu’évoquer leur volonté de lancer un projet pour redresser Casino. Les choses se concrétisent désormais, avec une offre de montée au capital à hauteur d’un milliard d’euros qui a été déposée auprès de la direction du groupe qui va en informer le conseil d’administration.
Ils avaient annoncé vouloir redresser le groupe Casino jeudi dernier, mais jusqu’ici, rien de palpable. Les choses sérieuses commencent désormais, ce mardi 13 juin. Xavier Niel, Matthieu Pigasse et Moez-Alexandre Zouari ont fait une offre écrite pour proposer de monter au capital du groupe Casino, dans le but de redresser le distributeur stéphanois surendetté. L’information a été confirmée par une source proche de Casino.
L’entreprise de Jean-Charles Naouri, en pleine procédure de négociation avec ses créanciers, a accusé réception, et va désormais en informer son Conseil d’administration. Le montant exact de l’offre du trio est d’1 milliard d’euros – dont 300 millions d’euros directement de la poche des fondateurs via un véhicule d’investissement nommé 3F. Le reste est de l’argent levé, probablement auprès d’autres investisseurs, actionnaires et créanciers de Casino. Le trio va ainsi jouer des coudes avec son rival: Daniel Kretinsky.
Pas de conditions suspensives
L’homme d’affaires tchèque, associé à Marc Ladreit de Lacharrière (Fimalac), autre actionnaire de Casino, s’était en effet positionné fin avril pour une montée au capital de Casino de 1,1 milliard d’euros (dont 750 millions de sa poche). C’est 100 millions de plus certes, mais – contrairement à Niel, Zouari et Pigasse – Kretinsky a des conditions suspensives, et pas des moindres, notamment la réduction très substantielle de la dette brute non-sécurisée du groupe par voie de rachat en numéraire et de conversion en capital. L’offre du trio français, elle, n’a pas ces conditions.
Kretinsky avait dans un premier temps fait face à Teract, un véhicule unissant Niel, Pigasse et Zouari avec la coopérative agricole InVivo, alors actionnaire majoritaire. Mais – contrainte dans ses investissements – la coopérative a préféré se retirer jeudi 8 juin. Ce mardi, trois des actionnaires de Teract entrent donc officiellement en tractation avec Casino.
Concentration verticale
Chaque camp a ses arguments. Les offres de Kretinsky et du trio Niel-Pigasse-Zouari ont en fait une différence d’approche majeure. Le milliardaire tchèque insiste sur l’urgence de désendettement, tandis que ses rivaux insistent sur l’urgence de la relance commerciale. Dès lors, les trois investisseurs acceptent de dévoiler leur plan industriel, là où Kretinsky reste officiellement muet. La proposition des trois investisseurs repose sur l’idée d’une concentration verticale du secteur, avec un approvisionnement probablement en collaboration avec InVivo, même si – depuis le retrait de Teract – les contours de cette collaboration restent très flous.
Les mandataires de la procédure de conciliation seraient pourtant sensibles à l’argument de la relance industrielle, indispensable à Casino. Le trio mené par Xavier Niel veut aussi interpeller Bercy, en soulignant vouloir préserver le groupe sous contrôle français, éviter la casse sociale et le démantèlement du groupe. Les créanciers du groupe stéphanois seraient en revanche sensibles aux possibilités de désendettement qu’offre le milliardaire tchèque. Une chose est sûre: la bataille est lancée entre le trio d’investisseurs et Kretinsky.
Par Guillaume Echelard