C’était le moment le plus surréaliste que j’ai jamais vu lors d’un concert. Nous étions là, des dizaines de milliers de fans d’Aviv Geffen au Park Hayarkon, la plus grande salle de concert d’Israël, chantant et dansant comme si c’était n’importe quel autre soir.
Mais, bien sûr, ce n’était pas n’importe quelle autre soir : c’était la guerre. Alors que l’icône du rock des années 90 atteignait la fin de sa chanson « Hamichtav » (La Lettre), deux points jaunes sont apparus dans le ciel. Ils se sont déplacés en diagonale vers le haut et ont disparu derrière des nuages avant de réapparaître et d’exploser. C’était le Dôme de Fer, protégeant Tel-Aviv des missiles lancés par le Jihad Islamique Palestinien.
Le public a applaudi, et n’en déplaise à Geffen, qui faisait un super show, ce n’était pas pour lui. Geffen a terminé la chanson, le « spectacle doit continuer » après tout, avant d’aborder le spectacle encore plus impressionnant qui s’était passé dans le ciel. « Je pense qu’il va me falloir des mois pour digérer ce qui s’est passé », a déclaré Geffen.
La rock star a remercié le Home Front Command de lui avoir permis de se produire comme prévu. « Je leur ai dit que mon public était toujours anxieux et pensait à la mort à la fin de la journée, alors quelle différence cela fait-il si cela nous arrive à la maison ou au Park Hayarkon », a-t-il plaisanté. « Si un missile arrive, je chanterai ‘Sof Haolam’ (La fin du monde). »
Geffen a dédié sa prochaine chanson, « Uri Ur » (Wake Up) aux fans des alentours de Gaza, dont certains ont reçu des billets gratuits pour le concert. Et puis il a continué à chanter, comme si tout était normal. Et incroyablement, nous, le public, avons continué à chanter et à danser comme si tout était normal. Comme promis, Geffen a amené sur scène certaines des plus grandes stars du rock d’Israël, de Yaheli Sobol à Beri Sakharov et Rami Fortis. Si quelqu’un avait annulé de peur d’être touché par des débris de roquettes, cela n’était pas remarqué. C’était une super soirée.
La vie continue normalement
Le matin du concert, j’étais sûr qu’il serait annulé. Comment un événement aussi énorme a-t-il pu se produire alors que des roquettes pleuvaient sur le centre d’Israël ? Ensuite, j’ai reçu un SMS de la société de production indiquant que le spectacle aurait lieu comme prévu. Le même message est apparu comme une notification de plusieurs sites d’information israéliens.
Ensuite, je me suis demandé s’il était sage de faire ce spectacle. Après tout, les gros titres sur le concert disaient juste au Jihad islamique où des dizaines de milliers d’Israéliens allaient se rassembler à l’extérieur. Plus tard, les spectateurs ont reçu un autre message disant que nous devrions nous allonger sur le sol pendant 10 minutes s’il y avait une sirène d’alerte de roquette.
C’était un peu imprudent de sortir comme ça, tout en insistant pour que mes trois enfants dorment dans la pièce sécurisée de notre maison, avec le matelas de mon aîné sur le sol entre les lits de ses frères. Mais les chances que quelque chose se produise semblaient très minces, et j’attendais ce concert avec impatience depuis des mois. J’ai donc donné à la baby-sitter des numéros de téléphone d’urgence supplémentaires et je suis partie.
Pendant le trajet en train vers Tel-Aviv, j’ai envoyé au Post des citations d’une source diplomatique disant qu’il n’y aura certainement pas de cessez-le-feu ce soir. Pourtant, même cela ne m’a pas préparée à la réalité : danser sous le Dôme de Fer.
Tel Aviv est souvent décrite comme une bulle. En fait, Tel-Aviv a été le site de certains des pires attentats terroristes de la dernière décennie, et il en a été de même lors de la deuxième Intifada, des attentats à la bombe dans les bus des années 1990 et autres. Mais Tel-Aviv est aussi intensément dynamique. C’est le centre névralgique de la culture israélienne. C’est une ville qui cherche n’importe quelle excuse pour organiser une grande fête. Aucun terroriste n’arrêtera cela.
Alors que certains critiquaient les gens qui faisaient la fête dans la bulle de Tel-Aviv alors que le Sud se cachait dans des abris, la vérité est plus complexe que cela. Ceux d’entre nous qui se trouvent dans un endroit suffisamment sûr pour quitter la maison et faire la fête doivent le faire, dans des limites raisonnables. Parce que si vous annulez vos soirées et que vous arrêtez de chanter et de danser, vous cédez aux terroristes. C’est bien mieux de leur faire un énorme doigt d’honneur, bien rock and roll, avec 40 000 personnes au Park Hayarkon.
Line Tubiana d’après Lahav Harkov (jpost)