Parmi les prévenus figure Éric Robic, le chauffard français qui avait écrasé l’Israélienne Lee Zeitouni à Tel-Aviv en septembre 2011 avant de prendre la fuite, et son passager Claude Khayat.
Des sociétés écrans, des fausses factures, des voitures achetées à crédit puis revendues et un pactole de plus d’un million d’euros qui transite par la Pologne et Israël: dix personnes sont jugées à partir de lundi à Bobigny pour une vaste escroquerie. Parmi les prévenus figure Éric Robic, le chauffard français qui avait écrasé l’Israélienne Lee Zeitouni à Tel-Aviv en septembre 2011 avant de prendre la fuite, et son passager Claude Khayat.
Les deux hommes n’en sont pas à leur premier coup d’essai. Déjà condamnés pour escroquerie, ils sont considérés comme les cerveaux de cette nouvelle fraude qui va opérer entre 2013-2014 et faire près d’une centaine de victimes. Pour mener à bien leur affaire, les protagonistes vont appliquer un véritable manuel de l’escroc.
D’abord ils réactivent des sociétés dormantes mais qui possèdent toujours une immatriculation auprès du registre du commerce afin d’appuyer leur crédibilité auprès des banques. Tonio «le ferrailleur» va apporter une mise de fond de 100.000 euros pour les aider à démarrer leur activité. À la tête de ces compagnies, ils vont placer des gérants de paille, souvent des proches comme leur femme ou leur oncle.
«Manu le banquier»
Les prête-noms vont ouvrir des comptes bancaires grâce à des bilans comptables falsifiés, des faux avis d’imposition et la complicité de «Manu le banquier». L’ex-banquier à la HSBC sert d’entremetteur entre les institutions bancaires et les membres du réseau d’escroquerie. Il obtient des cotations favorables aux sociétés fictives auprès de la Banque de France, précieux sésame pour faciliter l’acquisition d’un crédit.
L’argent en poche, une flopée d’entreprises, dont la principale Métaux Europe, vont pouvoir acheter des voitures en leasing, changer les plaques, puis les revendre à des prix défiant toute concurrence à des garages peu scrupuleux. Lors des perquisitions dans les locaux de Métaux Europe à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), les enquêteurs vont découvrir un site épuré de… 6m2, composé d’un bureau, d’une chaise et d’un ordinateur.
L’argent collecté par la vente d’au moins 18 véhicules (Smart, Mercedes-Benz, Clio) est transféré grâce à un montage financier sophistiqué vers la Pologne, la Hongrie ou Israël. Les fonds sont ensuite rendus aux malfaiteurs en cash moyennant quelques commissions à différents intermédiaires dont un comptable, M.H. alias «Majax», le prestidigitateur.
Escapade à Marrakech
Sur le dos de son employeur SAF, partie civile, il va créer de faux comptes fournisseurs avec de fausses factures et va permettre de décaisser l’argent. Ce mode opératoire rodé va être dupliqué sur d’autres arnaques par la société Groupe Allianz de France (GAF) qui va jouer avec l’ambiguïté du nom de l’assureur Allianz. Ce dernier va obtenir leur condamnation pour concurrence déloyale en 2014. GAF va embaucher des femmes de l’entourage d’Éric Robic et Claude Khayat sous des fausses identités et les faire passer pour des commerciales.
Elles vont démarcher des artisans trouvés sur les pages jaunes qui pensaient être lien avec une filiale du groupe d’assurance et leur proposer la création d’un site internet et la mise à disposition d’un portefeuille clients pour 5.000 euros. Les contrats ne seront jamais honorés et l’escroquerie va délester une cinquantaine d’entreprises pour un préjudice estimé à plus de 200.000 euros. Les chèques encaissés seront transférés et récoltés en Pologne, les cartes de crédit des sociétés utilisées à des fins personnelles pour acheter du caviar ou s’offrir une escapade à Marrakech ou Tel-Aviv.
«Une dette de poker»
Au total, huit hommes et deux femmes, âgés de 41 à 61 ans, sont jugés à partir de lundi devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour escroquerie, blanchiment ou recel en bande organisée. Plus d’une vingtaine de sociétés se sont constituées parties civiles. Le procès doit s’achever vendredi. Les dix prévenus: commercial, comptable, professeur de sport, directeur financier, architecte d’intérieur ou analyste ont reconnu à des degrés divers leur participation à l’escroquerie, certains l’ont justifiée par le remboursement d’«une dette de poker».
Éric Robic affirmera qu’il devait restituer la caution empruntée à un membre du clan Hornec, des figures du grand banditisme, et «ami d’enfance», après avoir été incarcéré pour homicide involontaire dans l’affaire Zeitouni et pour l’achat frauduleux de 35.000 euros de crustacés.