Amos Gitaï présente House au Théâtre de La Colline

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Le cinéaste israélien Amos Gitaï présente au Théâtre de La Colline House. Interprétée par des comédiens et des musiciens issus de tout le Moyen-Orient et de France, House raconte par les moyens de la scène l’histoire d’une maison de Jérusalem Ouest sur 25 ans.

House raconte l’histoire d’une Maison de Jérusalem Ouest pendant un quart de siècle au travers des récits de ses occupants successifs, Arabes et Juifs, Palestiniens et Israéliens. Au fil des années, ces fragments biographiques dessinent une mosaïque plus large, celle d’un territoire et d’un conflit tels qu’ils s’incarnent dans les existences de ce microcosme.
À partir de sa trilogie documentaire — La Maison (1980), Une maison à
Jérusalem
 (1997), News from Home News from House (2005) — Amos Gitaï revient sur les lieux en convoquant ces destins humains dans une création théâtrale qui remonte le cours du temps.

Sur le plateau du théâtre, l’histoire de la Maison devient une métaphore et le lieu d’un dialogue artistique entre des comédiens et des musiciens issus de tout le Moyen-Orient, aux langues, aux origines et aux traditions musicales différentes, réunis pour tenter de dire ensemble la mémoire du passé et la possibilité d’une réconciliation. Dans l’épaisseur du temps qui s’écoule, la Maison fabrique alors des places possibles pour tous. L’espace que l’on souhaiterait à chacun sur terre.

Le théâtre est-il toujours lié pour vous au cinéma, comme c’est le cas dans House ?

 Amos Gitaï : Pas du tout. La plupart de mes pièces de théâtre ne sont pas dérivées de films. À commencer par mon premier spectacle, Gibellina, metamorfosi di una melodia que j’ai créé en 1992 au festival de Gibellina en Sicile en m’inspirant de plusieurs textes : Les Manuscrits de la mer Morte et La Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, les Élégies de Rilke… L’avant-dernière pièce que j’ai présentée en France, Yitzhak Rabin : Chronicle of an Assassination (Festival d’Avignon, 2016) est une œuvre tout à fait autonome et différente du film qui l’a suscitée. C’est le cas aussi de House.

Le critique de cinéma Jean-Michel Frodon vous décrit comme « un cas rarissime de cinéaste, ou même d’artiste dans un sens plus large, ayant à la fois pensé son cinéma comme producteur d’archives et pensé l’usage de ses propres archives ». Est-ce en archiviste que vous retravaillez dans House la matière de votre trilogie documentaire ?

A.G. : Sans doute, mais autant qu’un geste d’archiviste et d’artiste, il s’agit pour moi d’un geste civique. Dans notre monde où gagne l’angoisse générale, il y a urgence à parler de la possibilité de réconcilier Israéliens et Palestiniens. C’est le sens de ce projet, qui raconte l’histoire d’une maison habitée successivement par des Arabes et des Juifs, des Palestiniens et des Israéliens.

Le critique de cinéma Serge Daney écrivait, à propos de votre premier film House : « Il arrive l’une des plus belles choses qu’une caméra puisse enregistrer en direct : des gens qui regardent la même chose et qui voient des choses différentes. Et que cette vision émeut » (Libération, 1 mars 1982). Pour la pièce, vous rassemblez au plateau non seulement des artistes de disciplines différentes, mais aussi d’origines diverses. Pour quelles raisons ?

A.G. : Toujours en vertu de ce sens civique, afin de faire vivre concrètement au plateau l’idée de dialogue entre les peuples, surtout ceux qui sont en guerre aujourd’hui. Les acteurs sont israéliens, palestiniens et français. Les musiciens sont iraniens et israéliens. Le chœur des chanteurs est conduit par Richard Wilberforce, avec qui j’ai déjà travaillé au Châtelet et à Londres. Je suis très heureux d’avoir avec moi autant de personnes de grand talent et d’horizons différents.

Comment s’est déroulé le travail avec cette équipe très large et plurielle ?

A.G. : Tout a été rendu possible par Wajdi Mouawad, qui partage avec moi les mêmes urgences, la même volonté de parler des problèmes du monde d’aujourd’hui au théâtre. Lui et son équipe m’ont beaucoup aidé à constituer la distribution ainsi qu’à toutes les étapes de la création. Il a mis par exemple une partie de l’équipe permanente de La Colline au service de House. J’ai commencé à travailler pendant cinq mois à Tel Aviv avec la partie israélienne et palestinienne de la distribution. Micha Lescot et Irène Jacob sont venus un temps. Puis le reste des répétitions a eu lieu à La Colline, où je me sens comme dans une maison organique, naturelle.

Du 14 mars au 13 avril 2023 au Grand Théâtre – spectacle en anglais, arabe, français, hébreu surtitré en français et en anglais

Propos recueillis par Anaïs Heluin

Avec colline et journal-laterrasse