Alors qu’il a déjà perdu en un an de 4 à 5 milliards d’euros, le propriétaire de SFR et de BFMTV serait sous le coup d’un redressement fiscal de 7,5 milliards.
Le fisc genevois compterait réclamer 7,4 milliards de francs, un montant jamais vu en Suisse, au milliardaire français Patrick Drahi, patron d’Altice et de BFMTV. L’intéressé nie les faits. Après une fuite de documents confidentiels sur le darknet, dont le site reflets.info s’est fait l’écho, Heidi.news et la RTS ont révélé le conflit autour du bien-fondé du forfait fiscal de Patrick Drahi, cette imposition avantageuse réservée aux riches étrangers.
Officiellement, Drahi est domicilié à Zermatt, où il bénéficie d’un forfait accordé par le Valais. Or, le fisc genevois, estimant que le milliardaire et sa femme résident en réalité à Cologny et qu’il ne peut bénéficier de ce régime fiscal, a ouvert en juin 2019 une procédure.
7,4 milliards de francs suisses d’arriérés d’impôts et de pénalités
Selon Heidi.news, Genève lui réclamerait 7,4 milliards de francs suisses, soit 7,5 milliards d’euros. C’est plus que la fortune du milliardaire, estimée à 3,7 milliards de dollars, et cela représente trois quarts du budget de l’État de Genève. Il s’agirait pour moitié d’arriérés d’impôts (de 2009 à 2016), et pour l’autre moitié de pénalités.
La loi prévoit en effet qu’en cas de soustraction fiscale l’amende peut aller du tiers au triple de la somme soustraite selon la gravité de la faute. Selon nos confrères, Patrick Drahi et ses avocats contesteraient en justice la domiciliation et le régime d’imposition. Cette question doit être tranchée pour que les éventuels rappels et amendes puissent être adressés.
Il s’agit d’un nouveau rebondissement dans la saga autour du forfait fiscal du milliardaire. Comme le racontait Challenges en novembre, la bisbille avec l’administration cantonale date d’il y a déjà quelques années. Mi-2019, une enquête avait été lancée après la révélation des déplacements du milliardaire et des courriers de ses conseillers fiscaux, à la suite d’une fuite de milliers de pages de documents informatiques.
Le Français avait aussitôt mobilisé ses avocats pour contester la mesure. Il a d’ailleurs déposé un recours, courant décembre 2021, devant le Tribunal administratif. Pour sa défense, l’étude d’avocats Oberson Abels, qui défend l’homme d’affaires français, a aussi exposé dans un courrier adressé en 2020 à l’administration « une synthèse générale du nombre de jours passés chaque année par Patrick Drahi et son épouse dans chaque lieu ». D’où il ressort qu’entre 2016 et 2019, Patrick Drahi aurait passé 127 jours à Zermatt contre 46 à Genève, en moyenne, par an.
Résident à Rolle, puis à Zermatt
Le milliardaire avait, il faut le dire, déployé beaucoup d’énergie pour devenir résident à Rolle, dans le canton de Vaud, puis à Zermatt, dans le Valais, dans les années 2000. D’abord installé à Genève, il s’y était fait refuser le statut de Résident à forfait fiscal. Un statut très intéressant. En Suisse, soit les étrangers résidents sont imposés sur leurs revenus, comme les autres citoyens, et leurs impôts peuvent alors être très élevés. Soit ils obtiennent le droit d’être imposés sur leur train de vie. On appelle cela le « forfait fiscal ». C’est un impôt finalement assez faible, réservé à ceux qui n’ont pratiquement pas d’activité en Suisse.
Une trentaine de (très) grandes fortunes françaises, présents dans notre classement 2022, en bénéficient, notamment Pierre Castel, lui aussi en brouille avec le fisc suisse.