Des lycéens de Jacques-Cartier se sont lancés dans un travail de mémoire considérable et passionnant : retracer l’histoire des hommes, femmes et enfants déportés de Saint-Malo. Lisez et donnez pour les aider!
Il s’appelait Daniel Albohair. Né à Saint-Malo en 1941, il est mort avec sa mère dès leur arrivée à Auschwitz-Birkenau, le 30 juin 1944.
Le gamin de 3 ans a été assassiné. Gazé par les Nazis. Du petit Daniel, dont le destin cruel a été rapporté plus de 75 ans plus tard par Marc Jean, le directeur des archives municipales, on ne sait pas grand-chose. Quelques lignes sur le parcours de sa famille juive, cherchant à fuir l’occupant. Sa date de naissance à Paramé. Et deux photos de sa courte vie, préservées par le Mémorial de la Shoah, nous montrant l’image d’un petit garçon souriant, aux jolies boucles d’or.
« Faire revivre son histoire »
Victime d’une idéologie funeste, Daniel Albohair est aujourd’hui au cœur d’un formidable travail de mémoire mené par deux classes de Terminale générale (68 élèves) du lycée public Jacques Cartier de Saint-Malo.
Avec leurs deux professeurs d’histoire Stéphane Autret et Fabienne Massard-Wimez, aussi passionnants que passionnés, ces jeunes vont travailler toute l’année scolaire sur un projet appelé « Parcours de déportés de Saint-Malo« .
« L’antisémitisme a été et peut encore être près de nous »
Avec leurs élèves, ils ont ainsi commencé à retracer le parcours de ces personnes, de ces familles liées à leur ville, Saint-Malo « où sont nés les élèves eux aussi ». Une origine commune qui « les touche, les concerne. Leurs parents également », poursuit Stéphane Autret. « Cela renforce leur engagement, car cela leur montre et leur font ressentir que l’antisémitisme a été et peut encore être proche de nous. »
Un travail colossal
Enquêtes, travail sur les archives et les sources de leurs informations, prise de contact avec les familles des survivants, conférences d’historiens…
Claire Zalc, directrice de recherches au CNRS, viendra rencontrer les élèves en janvier. Tal Bruttmann, spécialiste de la Shoah et de l’antisémitisme en France au XXe siècle et pendant Vichy, viendra à son tour en mars. Sans oublier Marc Jean qui « nous aide pour le projet pédagogique, mais aussi financièrement par l’intermédiaire du Souvenir Français dont il est le président », précise, reconnaissante, Fabienne Massard-Wimez.
Une cagnotte en ligne
Le point d’orgue de ce travail prendra la forme d’un voyage scolaire, du 14 au 16 avril, qui conduira près de 70 élèves au ghetto de Varsovie, au musée Schindler à Cracovie et… dans le sinistre camp d’Auschwitz-Birkenau. Pour les deux professeurs, « aller sur place c’est redonner une mémoire et un ancrage local à ceux qui n’en sont pas revenus et à ceux qui, comme Daniel Albohair, n’ont que très peu vécu ».
Le montant global du projet s’élève à près de 42 000 €. Le ministère des Armées, la Région Bretagne, la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public, la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et des entreprises publiques à l’image de la Menuiserie du pays de Saint-Malo et Thermi Froid ont apporté leurs concours pour faire baisser la facture. Mais sans une aide plus large, le voyage pourrait ne pas aboutir.
« Nous avons donc besoin de vous pour nous aider à boucler ce budget le plus rapidement possible et pour faire en sorte que les familles de nos élèves aient un reste à charge acceptable (autour de 200 €) et que surtout tous nos élèves puissent avoir la chance de pouvoir participer à ce voyage pédagogique riche en émotions. »
Pour récolter des fonds, les deux professeurs ont initié une cagnotte en ligne (cliquez ici pour participer) via le site de l’Éducation nationale, « la trousse aux projets ».
Une pierre à la mémoire du petit Daniel
Le travail de ces élèves « passeurs de mémoire » se terminera par la mise en ligne d’un site Internet dédié aux 63 déportés malouins. Et par un geste fort, au mois de mai prochain. « Nous souhaitons faire poser par la mairie de Saint-Malo, une Stolpersteine (pierre portant le nom et les dates de vie des victimes de l’extermination ou de la persécution nazie) devant l’endroit où est né le petit Daniel Albohair. ». C’était au n°1 du boulevard Chateaubriand. Il aurait 81 ans aujourd’hui.